Décryptage

On y était : dans les coulisses du GP Explorer 2

10 septembre 2023
Par Agathe Renac
Jonathan Cohen était présent lors de cette deuxième édition du GP Explorer.
Jonathan Cohen était présent lors de cette deuxième édition du GP Explorer. ©L'Éclaireur/Clémence Heyries

L’événement Twitch de l’année, organisé par Squeezie, s’est déroulé ce samedi 9 septembre au circuit Bugatti du Mans. Ambiance, interviews, rencontres… Retour sur cette journée exceptionnelle, vue de l’intérieur.

Autant l’avouer tout de suite : je ne connais rien à la Formule 1 – et encore moins à la Formule 4. Cependant, je regarde (beaucoup trop) YouTube et je suis de très près les actualités des créateurs de contenu. Parmi elles, le GP Explorer est un bel exemple de réussite.

Cette course de F4, organisée pour la première fois en 2022 par Squeezie et retransmise en live sur sa chaîne Twitch, a explosé tous les records d’audience de la plateforme en atteignant le million de spectateurs simultanés en ligne. Un exploit. Le principe est simple : 24 personnalités publiques (essentiellement des influenceurs) s’affrontent le temps d’une course sur le mythique circuit Bugatti du Mans.

Cet événement exceptionnel a permis de démocratiser un peu plus la discipline auprès du grand public, et il est même parvenu à susciter ma curiosité. À l’occasion de cette deuxième édition, Blizzard m’a proposé de suivre cette aventure avec l’équipe d’Overwatch 2, pour soutenir son écurie représentée par Lebouseuh et Kaatsup. Une fois mon syndrome de l’imposteure mis de côté, j’ai accepté l’invitation avec une mission en tête : vous faire vivre les coulisses de ce moment fou. Accrochez vos ceintures, la journée va être longue.

Le retour du drapeau breton

8 heures. Le GP Explorer est officiellement lancé. Sur Twitch, les premiers viewers découvrent le planning de cette deuxième édition, alors que, sur place, les visiteurs commencent à se perdre dans les nombreux stands aux couleurs de leurs influenceurs préférés. Aujourd’hui, plus de 60 000 personnes sont attendues et certaines sont arrivées à cinq heures du matin pour s’assurer la meilleure place.

11 heures. Les gradins sont déjà pleins et le thermomètre affiche plus de 25°C. Le pic sera de 33°C dans l’après-midi, et des petits génies ont pensé à apporter leur parasol pour se protéger de la chaleur. Leurs voisins de droite brandissent quant à eux fièrement un drapeau breton (que serait une rencontre sportive sans lui ?) et d’autres, un peu plus haut, celui aux couleurs de l’album Civilisation d’Orelsan. Sept heures avant le top départ, l’ambiance est déjà folle. Ça promet.

Le paradis des marques

11h30. Place à la visite des box de chaque écurie. Des dizaines de personnes s’agglutinent autour des barrières de sécurité pour voir les voitures qui vont concourir. Elles sont belles, colorées et surtout couvertes d’inscriptions au nom des sponsors. Parce que le GP Explorer, c’est aussi ça : le paradis des marques.

À droite, à gauche, en hauteur… Quelle que soit la direction dans laquelle on regarde, elles sont partout. Des Furets en passant par Samsung ou encore Deezer, les spectateurs sont confrontés à des panneaux publicitaires en permanence, jusqu’à l’overdose. Malgré cette invasion visuelle, il reste (beaucoup) de choses très chouettes à voir.

©L'Éclaireur Fnac, Clémence Heyries

On continue donc notre petite visite des stands, en admirant les monoplaces des équipes de Squeezie et Gotaga, Seb et Maghla, Kaatsup et LeBouseuh, Étienne Moustache et Amixem, Djilsi et Théodort, Maxime Biaggi et Ana on air, Billy et Kekra, Mister V et Théo Juice, Depielo et Manon Lanza, Sylvain et Pierre, et SCH et Soso Maness.

Parmi les dizaines de curieux qui nous entourent, on retrouve aussi bien des fans de la première heure en quête d’une photo de leur youtubeur préféré que des spectateurs habillés en Spider-Man ou portant des maillots floqués au nom de leur équipe fétiche du jour, ou des personnalités publiques. On a par exemple croisé Jonathan Cohen, Billy, Juste Zoé ou encore Michou et Inoxtag. Dans la foule comme dans les gradins, on interpelle les influenceurs, on les remercie, on demande des autographes, et le GP Explorer prend des airs de meet-up géant.

“C’est un peu notre Festival de Cannes”

13 heures. Direction les loges pour rencontrer les équipes de Blizzard. Dans les couloirs, on croise tout le YouTube game. Clémence, 22 ans, s’étonne de voir « toute [sa] For you page TikTok ». Adossé à un mur, on tombe sur Sora (@Universdesora, 2,47 millions d’abonnés) qui admire le travail réalisé par Squeezie aujourd’hui.

« C’est incroyable de voir qu’un youtubeur peut organiser un event d’une telle envergure. Ce GP est ouvert à tous : on retrouve des créateurs de contenu, des chanteurs, des acteurs… C’est fou ! » Son pronostic pour la course : Sylvain et Pierre, « mais j’ai aussi envie de voir l’équipe de Djilsi gagner ».

©L'Éclaireur Fnac, Clémence Heyries

Les youtubeurs et amis d’Amixem, Yvan Casta et Thomas Deseur, misent quant à eux sur Étienne, Maxime et Seb. Ils s’étaient déjà déplacés jusqu’au Mans l’an dernier pour suivre la première édition, et ils sont impressionnés par les allures que prend ce GP Explorer 2. « Il y a beaucoup plus de monde, d’organisation et de choses à voir au niveau des stands, explique Yvan dans un sourire. Une grosse partie de l’Internet français est présent aujourd’hui, c’est un très beau rassemblement. »

« C’est un peu notre Festival de Cannes à nous !, s’amuse Thomas. On n’a pas de film à présenter avec Yvan, mais on a une équipe à soutenir et on est là par solidarité pour nos collègues de tous les jours. Dans les studios, on parle du GP tout le temps : avant, pendant et après le jour J. Il fait clairement partie de notre quotidien. »

Une expérience unique dans le monde

14 heures. L’heure des qualifications a sonné. Le but : déterminer l’ordre de départ de la course finale en fonction du classement, au terme de ces trois phases qualificatives. Le vrombissement des moteurs nous fait sursauter et excite le public, qui se met à scander les noms de leurs pilotes favoris. Certains applaudissent, d’autres scrutent la piste avec des jumelles pour ne rien manquer.

À mes côtés, une journaliste passionnée par cet univers me donne quelques leçons express sur le caractère exceptionnel de cet événement et de ses enjeux. « Ce sont les seuls amateurs au monde à pouvoir s’affronter sur ce circuit avec une monoplace, confie Julia, 26 ans. Normalement, cette discipline est uniquement réservée aux professionnels. Ça ne peut pas être un hobby pour tout le monde, car les voitures coûtent très très cher et qu’il y a des règles de sécurité très strictes à respecter. »

©L'Éclaireur Fnac, Clémence Heyries

Amatrice de F1 depuis toute petite, la jeune femme voit ce GP Explorer comme une belle opportunité de faire découvrir ce sport au grand public, et surtout aux filles. « Aucune femme ne concourt en Formule 1, alors que les compétitions sont mixtes, se désole-t-elle. C’est un secteur très fermé, il n’y a que 20 pilotes dans le monde. Il y a un vrai problème de représentativité, contrairement à ce GP. Il n’y a pas une égalité parfaite, mais on voit des femmes pilotes et ça peut créer des vocations chez les petites filles. Cet événement nous donne plus de visibilité, et c’est génial. J’espère vraiment qu’une fille gagnera cette édition, j’ai beaucoup d’espoir en Ana ! »

Bienvenue à Disneyland

15h30. Fin des qualifications. Le classement est dominé par Depielo, Étienne Moustache, Sylvain et Lebouseuh. Ana se place cinquième, Julia est ravie. Le public, en revanche, l’est beaucoup moins. Les 30°C ont été dépassés, et la chaleur est difficile à supporter. Heureusement, un camion de pompier a été mobilisé pour l’occasion et fait le tour de la piste pour arroser les personnes présentes dans les gradins. La course tant attendue aura lieu dans trois heures.

Pour les faire patienter, quelques animations sont prévues, comme une démonstration surprise d’une F1 Alpine, dont le bruit est beaucoup plus puissant que celui des F4. Tout le monde regarde le pilote enchaîner les tours et faire son show, bouche bée. « Elle est insane la voiture ! », s’exclame une invitée de Blizzard. Le public commence à chanter la Marseillaise, et l’ambiance devient encore plus folle. Il est donc bouillant pour accueillir la parade des pilotes, qui saluent leurs fans depuis un camion, à la manière d’un spectacle Disney.

Au cœur de la course

16h45. Direction les écuries. J’ai la chance de pouvoir me glisser dans le box de Lebouseuh et Kaatsup pour voir leurs voitures d’un peu plus près. Rien à dire : c’est impressionnant et vraiment très beau. On croise le pilote, sourire aux lèvres, satisfait de sa performance et de sa quatrième place décrochée aux qualifications. On a à peine le temps de le féliciter qu’il est déjà appelé ailleurs. On comprend que son planning est millimétré.

©L'Éclaireur Fnac, Agathe Renac

Aux abords de sa monoplace, on retrouve ses amis proches, Théa et Fabien, qui partagent le « local » (un studio YouTube) avec lui et espèrent le voir sur le podium ce soir. « On a été derrière lui toute l’année, on le soutient à fond dans cette aventure », affirme Fabien, qui « rêve » de pouvoir participer à une prochaine édition du GP.

Théa, de son côté, est « giga impressionnée » par l’événement, « d’autant plus quand on connaît les pilotes ». Elle croit en son ami, et pense qu’il pourra « gratter une place pendant la course pour terminer au moins troisième ». Réponse dans moins de deux heures.

Sortie de route

18h15. La tension commence à monter, tant du côté des participants que du public. Les clappings s’enchaînent, des Olas improvisées se mettent en place, et Étoile interview les pilotes qui rejoignent leur voiture. Quand vient le tour de Squeezie, les spectateurs se mettent à hurler pour le remercier. Le youtubeur dit dans un sourire ému : « Vous voulez vraiment que je pleure là ? » À 20 minutes de la course, déjà 900 000 spectateurs sont connectés en simultané sur le live Twitch. Cette deuxième édition parviendra-t-elle à pulvériser le record de la précédente ?

©L'Éclaireur Fnac, Clémence Heyries

18h35. C’est le moment que tout le monde attendait : le top départ est lancé. Dès le deuxième tour (sur 15), Manon et Maxime entrent en collision et sortent du circuit. La course est très sûrement terminée pour eux, et un drapeau jaune est brandi pour éviter tout autre accident. Qui dit drapeau jaune, dit ralentissement des voitures et impossibilité de doubler les autres. La course continue donc au ralenti durant quatre tours, avant d’être complètement arrêtée au bout du septième. Le drapeau rouge est hissé : retour au box pour tout le monde.

©L'Éclaireur Fnac, Clémence Heyries

Sur l’écran géant, on voit un Maxime dépité par cette erreur fatale, contraint d’abandonner. Finalement, la course repart, et Depielo est largement en tête. La vraie bataille se joue entre Mister V et Gotaga pour la douzième place, et Seb et Théo Juice pour la quinzième.

Au douzième tour, nouveau drapeau jaune, avec ses contraintes. La course se termine avec un podium qu’on connaissait déjà lors des qualifications : Depielo est le grand gagnant, suivi de Sylvain, Étienne Moustache, Lebouseuh et Ana. Malgré ces nombreux ralentissements, le live a enregistré un nouveau record avec un pic à 1,35 million de viewers à 18h50. En moyenne, et sur la totalité du live, 564 000 personnes ont suivi l’événement sur la chaîne de Squeezie.

“C’est ciao”

19 heures. 35 minutes avant la remise des prix, les milliers de spectateurs envahissent le circuit, un large sourire aux lèvres. Ça chante, ça danse, et ça se presse pour être aux premières loges. 60 000 personnes sur une même piste, ça fait beaucoup de monde. Une demi-heure plus tard, les deux pilotes professionnels Pierre Gasly et Esteban Ocon remettent le trophée au vainqueur et une champagne shower est lancée sur le podium.

Le micro à la main, Squeezie remercie ses amis pour cette « expérience humaine formidable », avant d’être interrompu par tous les pilotes qui scandent « Merci Squeezie » en boucle. Il y a des sourires, des larmes, la fête peut commencer. Les spectateurs se dirigent vers la zone de concert pour assister aux performances d’Hamza et PLK. De mon côté, je repasse chaque moment de cette journée extraordinaire dans ma tête, avec une seule envie : rentrer et binger la série Netflix Formula 1 : pilotes de leur destin, à défaut de pouvoir, moi aussi, faire vrombir le moteur sur le circuit Bugatti.

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Article rédigé par
Agathe Renac
Agathe Renac
Journaliste