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AgriTech : le numérique est dans le pré

07 février 2023
Par Marion Piasecki
AgriTech : le numérique est dans le pré
©vector pouch/Shutterstock

Tous les secteurs ont leur transformation technologique et numérique, y compris l’agriculture. Cela s’appelle l’AgriTech ou l’AgTech. À quoi ressemble-t-elle ?

Nous connaissons déjà la FoodTech, qui rassemble toutes les technologies autour de l’alimentation. L’une de ses filières, l’AgriTech, attire elle aussi de plus en plus l’attention. Pour preuve, le gouvernement a débloqué début janvier un fonds de 65 millions d’euros pour financer un programme sur le thème « Agroécologie et numérique ». En septembre dernier, la société de capital-risque Capagro a également lancé le Capagro Agri-Food Innovation Fund, un fonds de 200 millions d’euros pour financer des projets de FoodTech et d’AgriTech. À l’heure où les consommateurs veulent plus de naturel et d’authenticité, quelle place les technologies prennent-elles dans l’agriculture ?

Des utilisations variées

Dans l’imaginaire collectif, l’innovation dans l’agriculture se limite aux tracteurs et aux produits chimiques, et elle est nécessairement synonyme de cultures intensives qui nuisent à l’environnement. L’AgriTech est en réalité bien plus large que cela. Les objets connectés permettent par exemple de suivre la météo, d’analyser l’hygrométrie et la composition des sols, ou d’améliorer la gestion de l’eau, des données devenues capitales avec les sécheresses de ces dernières années. Différents types d’agricultures se développent aussi grâce à l’AgriTech, comme l’agriculture verticale qui consomme moins d’eau et ne nécessite pas de pesticides.

Le numérique est également indispensable pour les questions de logistique et de distribution, pour créer des liens plus efficaces entre les producteurs et leurs clients. Cela vaut autant pour livrer de grandes quantités aux entreprises et aux restaurants que pour vendre des produits locaux en circuit court, directement au consommateur. En utilisant l’analyse de données et l’intelligence artificielle pour estimer la demande et avoir le moins de stock possible, la FoodTech permet aussi de réduire drastiquement le gaspillage alimentaire lors de la production, de la transformation et de la distribution. Finalement, l’AgriTech ne s’oppose pas à l’écologie et à la sobriété, elle veut seulement utiliser tout le potentiel du numérique pour y parvenir.

« C’est le consommateur qui décide à la fin. Si le consommateur ne se renseigne pas, ne s’éduque pas et ne se pose pas la question de ce qu’il a dans son assiette, le changement sera plus long. »

Antoine Pulcini
Vice-président de La Ferme digitale

Des enjeux sociaux et environnementaux

Loin d’être hors-sol, l’AgriTech veut donc répondre aux problématiques les plus urgentes du secteur. L’enjeu social est particulièrement important : les agriculteurs ne sont pas rémunérés à leur juste valeur et 50 % d’entre eux prendront leur retraite d’ici 2030, il est donc nécessaire de recréer un équilibre et de penser à l’avenir de la filière. La résilience face au changement climatique est également cruciale pour assurer des récoltes suffisantes et de bonne qualité.

C’est parce que les enjeux sont aussi importants que la filière se structure, par exemple avec l’association La Ferme digitale qui rassemble plus de 100 entreprises en France. Le gouvernement s’intéresse aussi particulièrement à l’AgriTech. En 2021, l’ancien ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation Julien Denormandie avait même exprimé son ambition de faire de la France « le berceau mondial de l’AgriTech ».

Malheureusement, l’un des plus gros obstacles pour les startups françaises, selon un rapport de La Ferme digitale, est la longueur des procédures, que ce soit pour obtenir une aide financière, faire approuver un produit ou avoir accès aux marchés internationaux. Cependant, ils ont aussi espoir que la part grandissante de numérique dans l’agriculture attire les jeunes diplômés et les personnes en reconversion professionnelle vers ce secteur.

L’AgriTech ne peut pas tout faire toute seule, elle a aussi besoin d’une remise en question de la part de ses clients pour avancer. Lors de la conférence « Numérique & agriculture : comment l’IT passe à table » au Sirha, Antoine Pulcini a en effet rappelé le rôle indispensable du consommateur pour accompagner ces transitions dans nos modes de consommation : « C’est le consommateur qui décide à la fin. Si le consommateur ne se renseigne pas, ne s’éduque pas et ne se pose pas la question de ce qu’il a dans son assiette, le changement sera plus long. »

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Article rédigé par
Marion Piasecki
Marion Piasecki
Journaliste