Critique

L’Arabe du futur 6 : Riad Sattouf s’élève au sommet de sa plume

25 novembre 2022
Par Clara Authiat
L’Arabe du futur 6 : Riad Sattouf s'élève au sommet de sa plume
©Marie Rouge/Allary Éditions

Le très attendu tome 6 de L’Arabe du futur débarque en librairie. Un ultime opus qui couvre la période 1994-2011 et qui met fin à l’autobiographie dessinée de Riad Sattouf, dans laquelle il raconte sa jeunesse entre la Syrie et la Bretagne. Notre critique.

C’est le phénomène BD de cette fin d’année. Et, sans être voyant, on imagine que ce sera l’un des cadeaux de librairie les plus populaires pour les fêtes.

Petit rappel : L’Arabe du futur est une série vendue à plus de trois millions d’exemplaires depuis 2014 et traduite dans 23 langues. Riad Sattouf y raconte son enfance entre le Moyen-Orient et la France, sur un ton mêlant le drame et l’humour.

Si vous n’avez pas lu les cinq premiers tomes, il vous suffit de savoir que Riad Sattouf est né d’un père syrien et d’une mère bretonne, et qu’il passe les premières années de sa vie sous les dictatures, de Kadhafi en Libye et de Hafez Al-Assad en Syrie. Un jour, sa mère, fatiguée du virage religieux radical de son mari, décide de rentrer en Bretagne avec ses enfants. Une séparation qui met un terme à ce mariage.

Et c’est le moment où Riad va devoir affronter… l’adolescence. Une période charnière, qui ne va pas l’épargner. Il écrit lui-même : « En 1994, j’avais 16 ans et j’étais un semi-psychopathe. »

©Riad Sattouf

En finir avec l’insupportable suspense du tome 5

Très attendu, ce dernier tome clôture donc une saga entamée en 2014 par Riad Sattouf, mais, surtout, elle apporte une réponse au cliffhanger du tome 5 paru il y a deux ans. Inutile de préciser que l’attente s’est révélée fort longue, car l’enjeu émotionnel était impressionnant.

En effet, à la fin du quatrième tome, le père de Riad enlève Fadi, le petit frère de Riad, et l’emmène avec lui en Syrie. Dans le cinquième volume, la mère met tout en œuvre pour récupérer son enfant, sans succès. Mais, alors qu’on arrive aux dernières pages du livre, son père, Abdel, réapparaît ! Il promet de ramener Fadi. Le fera-t-il ? Quelle que soit l’issue de cette promesse (no spoiler…), Riad est, lui, marqué à jamais par le drame familial qui irrigue ce tome 6 tout en tons bleutés et rouge.

Une chronique adolescente fine et décomplexée

Pourtant – et c’est tout le charme de L’Arabe du futur –, malgré les drames, Riad continue d’explorer les problématiques universelles d’un ado de 16 ans : il n’est pas populaire, se languit des filles qui ne le remarquent même pas et s’ennuie ferme au lycée.

Pour autant, pas de déprime en vue, car ce dernier tome est aussi l’occasion de voir le jeune Riad s’extirper de cette vie monotone et morose pour devenir l’artiste reconnu qu’il est aujourd’hui. De la Bretagne à Paris, on l’accompagne dans sa quête pour devenir auteur de « bédés ».

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Des premiers festivals de BD à la réalisation de son premier film Les Beaux Gosses (2009), en passant par les rencontres précieuses et inoubliables avec les dessinateurs Christophe Blain, Joann Sfar et Mathieu Sapin, Riad parvient à faire son trou.

Cet album est la consécration de son talent de dessinateur et d’auteur : on le voit élaborer son propre trait, faussement simpliste mais expressif, à la limite de la caricature. Un talent déjà repéré par sa grand-mère bretonne – sa première lectrice – alors qu’il n’avait que 5 ans et qu’il venait de dessiner Georges Pompidou.

Entretien
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Son album le plus introspectif

Avec ce tome 6, Riad Sattouf s’élève ainsi au sommet de sa plume, qui raconte et dessine avec tendresse et précision quelque chose de notre époque, quelque chose qui nous touche. Mais il livre ici aussi un dernier tome tout particulièrement touchant, car très introspectif, puisque le jeune Riad se laisse convaincre par la psychanalyse. Le but ? Se libérer du passé.

Tout au long de l’album, Riad reste hanté par son père, qui lui apparaît dans des interludes rouge vif. Le jeune garçon imagine sans cesse ce que son père aurait à lui rétorquer – et, peu à peu, il parvient à s’en détacher.

L’Arabe du futur, de Riad Sattouf. En librairie depuis le 24 novembre 2022.

Alors, bye bye L’Arabe du futur… Mais après ? Riad Sattouf a d’ores et déjà ouvert un nouveau cycle autobiographique l’an dernier avec Le Jeune Acteur. On se réjouit déjà de cheminer avec lui…

L’Arabe du futur, de Riad Sattouf, Allary Éditions, 184 p., 24,90 €. En librairie depuis le 24 novembre 2022.

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