Critique

The Car : Arctic Monkeys prolonge la route de la tranquillité 

21 octobre 2022
Par Apolline Coëffet
Arctic Monkeys signe son grand retour avec la sortie de “The Car”.
Arctic Monkeys signe son grand retour avec la sortie de “The Car”. ©Zackery Michael

Arctic Monkeys signe son grand retour ce vendredi 21 octobre avec l’arrivée de The Car. Si le groupe de rock anglais a pris un virage dans sa carrière, ce septième album poursuit le chemin emprunté avec Tranquility Base Hotel + Casino, sorti en 2018.

Le très attendu The Car vient de sortir. Seulement trois extraits – dont le dernier a été diffusé ce mercredi – en donnaient un avant-goût. Et ont suffi à charmer les fans de la formation britannique : partout dans le monde, sa tournée affiche déjà complet. À l’origine de ce succès pérenne ? Sans doute sa propension à se réinventer constamment, provoquant la surprise, et ce, toujours avec brio. S’il est vrai que certains fidèles de la première heure semblent hermétiques à cette évolution, Arctic Monkeys n’en demeure pas moins talentueux. La qualité de ses albums ne faiblit pas avec le temps, bien au contraire.

Ce nouvel opus de dix titres aux accents funk et blues s’inscrit immanquablement dans le prolongement de Tranquility Base Hotel + Casino, sorti en 2018. Bien loin des rythmes électriques qui ont fait le succès de leur jeunesse, le disque avait laissé quelques nostalgiques – peu enclins à cette évasion spatiale – sur le bord de la route. The Car les réconciliera peut-être avec le quatuor de Sheffield. « Il n’est pas question de science-fiction sur ce disque. On est de retour sur la terre ferme », expliquait Alex Turner dans un entretien exclusif donné à The Big Issue en septembre dernier. « Avec cet album, je crois que nous nous rapprochons d’un son plus amélioré et plus dynamique. »

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Un rock orchestral et baroque

Dès l’ouverture, There’d Better Be a Mirroball – premier titre dévoilé cet été – nous plonge dans une atmosphère feutrée qui donne le ton. Le chatoiement doré de cymbales jazz et les envolées de violons nous accompagneront tout au long d’un rock orchestral et baroque, habité par une mélancolie lancinante qui décline ses variations sous la plume riche et élégante d’Alex Turner. D’une voix de crooner veloutée, le chanteur raconte ainsi la fin douloureuse d’une relation.

Les airs psychédéliques de « I Ain’t Quite Where I Think I Am » et « Jet Skis On The Moat » rappellent quant à eux les mélodies de David Bowie ou celles des années 1960-1970 tandis que les cordes dramatiques de « Sculptures of Anythong Goes » et « Big Ideas » sont dignes de la tracklist d’un James Bond. Dans le premier, la formation rock évoque un thème cher à Alex Turner au travers de vers sibyllins : la dichotomie entre chimères et réalité. Dans le second, il revient sur le processus d’écriture de l’album : « I had big ideas / The band was so excited / The kind you’d rather not share over the phone » (« J’avais de grandes idées / Le groupe était si excité / Le genre que vous préférez ne pas partager au téléphone »).

La pochette de « The Car », le septième album studio d’Arctic Monkeys.©Domino Records

S’émanciper du système de l’industrie

« Body Paint » entremêle l’ensemble de ces thèmes en s’adressant d’emblée à un amour passé ou un à un « master of deception and subterfuge » (« un maître de la tromperie et du subterfuge »). Jamie Cook s’adonne alors à quelques solos de guitare qui subliment les images convoquées par le texte. Questions existentielles et expérimentations prennent corps dans la métaphore et la parabole qui laissent place aux interprétations de chacun.

Mais le véritable tour de force d’Arctic Monkeys se trouve certainement dans sa volonté de s’émanciper du système de l’industrie musicale. Fini les tubes, chaque album sera désormais concept. Hôtel sur la Lune ou voiture vagabonde, Alex Turner parvient à créer des ambiances singulières, tout en détail et géniales d’harmonies, qui ne se ressemblent pas. Après tout, dès ses balbutiements, le quatuor nous avait prévenus en titrant son premier opus Whatever People Say I Am, That’s What I’m Not (2006). Seize années plus tard, une question – qui, là encore, fait écho à leurs débuts, et plus particulièrement à leur deuxième EP sorti la même année – subsiste irrémédiablement : qui peut bien être Arctic Monkeys ?

The Car, d’Arctic Monkeys (Domino Records), 10 titres. Disponible depuis le 21 octobre 2022. Un vinyle exclusif est disponible sur le site de la Fnac.

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Article rédigé par
Apolline Coëffet
Apolline Coëffet
Journaliste
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