Projet de longue haleine de Cameron, Avatar était peut-être déjà assuré, avant même sa sortie, de devenir le plus gros succès cinématographique de tous les temps. Le film s’apprête à ressortir au cinéma le 21 septembre prochain, avant la sortie en salles de Avatar : la voie de l’eau, prévue au mois de décembre.
En 2009, James Cameron revenait sur le devant de la scène plus de dix ans après Titanic avec une nouvelle promesse de révolution cinématographique : Avatar, film au budget pharaonique de près de 400 millions de dollars, réalisé quasi intégralement en images de synthèse. Au mois de décembre, les spectateurs du monde entier débarquaient sur Pandora, planète fictive au centre de l’intrigue d’Avatar, le septième long-métrage de James Cameron. Attendu comme l’événement cinématographique de la fin des années 2000, Avatar demeure à ce jour le film le plus lucratif de l’histoire du cinéma – du moins sans prendre en compte l’inflation, Autant en emporte le vent (1939) restant le film ayant enregistré le plus grand nombre d’entrées –, avec près de trois milliards de dollars au box-office mondial.
Le film, suivi de très près par Avengers: Endgame (2019) des frères Russo, devrait néanmoins conserver sa couronne un certain temps, puisque le film de James Cameron s’apprête à ressortir au cinéma le 21 septembre prochain, dans une version 4K et HDR remasterisée, juste à temps pour la sortie tant attendue d’Avatar : la voie de l’eau au mois de décembre. Plus de dix ans après la sortie du premier film, cette suite devrait à nouveau faire trembler le box-office et promet de repousser, une fois de plus, les limites du cinéma, ou au moins de son pendant spectaculaire. Mais ce deuxième volet – premier des quatre supplémentaires déjà prévus, le troisième opus ayant déjà été tourné et le quatrième étant à présent sur les rails – parviendra-t-il à reproduire le succès à la fois démesuré et prévisible du premier Avatar ?
The greatest showman
Avatar n’aurait probablement pas rencontré un tel succès, à la fois dans les rangs de la critique et du public, si James Cameron n’en avait pas été à l’origine. Après des débuts dans le milieu des effets spéciaux, James Cameron signe un premier long-métrage de commande en 1981, Piranha 2. Mais son premier coup d’éclat arrive en 1984 avec Terminator, qui marque son entrée tonitruante dans le cinéma de science-fiction et confirme au passage le rang de star mondiale d’Arnold Schwarzenegger.
Cameron enchaîne alors les chefs-d’oeuvre de SF, à l’instar d’Aliens : le retour (1986) puis Terminator 2 : le jugement dernier (1991) qui, en plus d’être un véritable récital de storytelling et de mise en scène, franchit à son époque un palier dans le domaine des effets visuels avec notamment le redoutable T1000 incarné par Robert Patrick, cyborg en métal liquide réalisé grâce au progrès du morphing et des images de synthèse.
Un résultat révolutionnaire (récompensé aux Oscars) né du perfectionnisme forcené de Cameron, qui avait déjà commencé à se pencher, dès son précédent film, Abyss (1989), sur les effets visuels et le tournage – alors éprouvant – en milieu aquatique. Après un nouveau film d’action avec Schwarzy (True Lies, un remake de La Totale ! de Claude Zidi), Cameron s’est alors attelé à un projet d’une ampleur inédite : le bien nommé Titanic qui, malgré son budget hors norme pour l’époque, a raflé 11 Oscars et est devenu, pendant un temps, le plus grand succès de l’histoire du cinéma – y compris en France, où le film culmine à plus de 21 millions d’entrées (il ressortira d’ailleurs en février 2023 pour son 25e anniversaire). Le seul nom de James Cameron devait alors suffire à propulser n’importe quel film au sommet du box-office. Le succès d’Avatar était déjà presque assuré.
Une révolution technologique
James Cameron a donc attendu près de 20 ans pour pouvoir réaliser Avatar, projet fou né dans les années 1990 mais qui a dû patiemment attendre le perfectionnement de la technologie dans le domaine des effets visuels pour pouvoir être mis en forme. Un pari réalisé, dans sa quasi totalité, en images de synthèse.
Cameron a maintes fois confessé qu’Avatar n’aurait pas été possible sans le progrès fulgurant des CGI (computer generated effects) – et plus particulièrement la motion et performance capture – dans les années 2000, avec pour chef de file le studio d’effets visuels créé par Peter Jackson, Weta Digital, dont le travail titanesque sur la trilogie du Seigneur des Anneaux marqua durablement les esprits. Le rendu bluffant de personnages photo-réalistes tels que Gollum ou Davy Jones dans Pirates des Caraïbes a finalement convaincu Cameron de passer à l’action en 2006, laissant alors de côté son projet d’adaptation du manga Gunmm – qui reviendra des années plus tard entre les mains de Robert Rodriguez avec Alita: Battle Angel (produit et écrit par Cameron).
Le cinéaste américain, alors associé à Weta Digital, ambitionne de réaliser un film intégralement en 3D et va jusqu’à développer son propre système de caméra pour les besoins du long-métrage. Il met également sur pied « The Volume », un gigantesque décor conçu exclusivement pour la performance capture, technologie qui n’a cessé d’être perfectionnée depuis, de La Planète des Singes au dernier Avengers. Le budget du film est colossal : près de 400 millions de dollars, marketing compris, un record pour l’époque. La bande originale est signée par le maestro James Horner (décédé dans un accident aérien en 2015), qui avait déjà composé celle de Titanic. Cameron compte ni plus ni moins donner vie à un monde autonome, avec sa propre mythologie, sa cosmogonie, ses coutumes, envisagées à travers une odyssée cinématographique brassant de grands thèmes tels que l’écologie, la colonisation, le rapport de l’homme à la nature.
À une certaine échelle, Avatar opère un changement paradigmatique décisif dans le paysage hollywoodien en ouvrant la voie à un imaginaire entièrement numérique.
Les salles de cinéma doivent s’équiper massivement en projecteurs numériques pour pouvoir répondre à l’ampleur du phénomène annoncé ; Avatar sonne alors l’avènement des projections numériques et le délaissement progressif de la pellicule au début des années 2010. Après la sortie d’Avatar, la 3D devient quasiment systématiquement pour les blockbusters, mais l’argument commercial – les films étant globalement convertis en 3D une fois en postproduction, à l’exception de certains films pensés d’entrée de jeu (et à juste titre) pour la 3D, à l’instar de Gravity d’Alfonso Cuaron ou Hugo Cabret de Martin Scorsese – ne sera que rarement à la hauteur de l’approche visuelle de Cameron et son sens accru de l’espace. La révolution amorcée par Avatar est ainsi à la fois technologique et industrielle.
Avatar et ses suites, un lot de promesses
Reste que la 3D, loin d’être devenue le phénomène annoncé, n’a pas su tenir ses promesses et a progressivement été délaissée aussi bien par les spectateurs que par les exploitants de salles. La 3D ayant été largement éprouvée ces dix dernières années, James Cameron parviendra-t-il à convaincre professionnels de l’industrie et spectateurs de faire à nouveau confiance à cette technologie et ainsi réitérer le même exploit que le premier Avatar, qui partait avec cet avantage de présenter une dimension résolument novatrice ?
Avatar : la voie de l’eau, passé sous la houlette de Disney depuis le rachat de la Fox et qui se déroule une dizaine d’années après les événements du premier film, a présenté un nouveau défi au réalisateur de Titanic : tourner une fois de plus un film en performance capture, mais essentiellement sous l’eau et le tout en high frame rate (pouvant porter certaines séquences de 48 à 120 images par seconde, au lieu des 24 images par seconde habituelles). 2D, 3D, 4K, HFR, IMAX, etc. : rarement un film aura été proposé en autant de formats différents. Sacré challenge en vue pour les circuits de salles.
Le cinéaste, décidément obsédé par les fonds marins – en 2012, Cameron était parti explorer, en solo, la fosse des Mariannes à bord du mini sous-marin Deepsea Challenger – a ainsi pris le temps de mettre en place un dispositif à la hauteur de ses ambitions. Pour les séquences aquatiques, Cameron a fait construire une immense cuve d’eau, un réservoir de plus trois millions de litres équipé d’une pompe spéciale pour répliquer vagues et courants océaniques et d’une couche de billes afin d’empêcher les interférences de la lumière avec les capteurs placés sur les comédiens.
Acteurs et actrices immergées – enfants et adolescents compris, les personnages principaux Jake et Neytiri ayant désormais une famille à protéger –, scrutées par des dizaines de caméras, ont ainsi dû s’entraîner à retenir leur respiration pendant de longues minutes afin de réduire le nombre de prises. Kate Winslet, une des recrues de ce second volet, aurait ainsi tenu en apnée pendant sept minutes, un record pour un long-métrage de fiction. Idem pour la vétérane Sigourney Weaver, avec six minutes d’apnée.
Il ne nous reste alors plus qu’à retenir notre souffle jusqu’à la sortie d’Avatar : la voie de l’eau le 14 décembre prochain et de s’offrir, d’ici là, une grande respiration avec la ressortie majestueuse d’Avatar prévue le 21 septembre.
Avatar de James Cameron, 2h42, avec Sam Worthington, Zoe Saldana, Michelle Rodriguez, Sigourney Weaver, Stephen Lang, ressortie au cinéma le 21 septembre 2022.