Critique

The Gray Man : un action movie en zone grise

28 juillet 2022
Par Lisa Muratore
Ryan Gosling incarne Court Gentry dans “The Gray Man”. © Netflix
Ryan Gosling incarne Court Gentry dans “The Gray Man”. © Netflix ©Netflix

Disponible depuis le 22 juillet sur Netflix, The Gray Man met en scène un face-à-face entre Ryan Gosling et Chris Evans. Étonnant, mais un peu décevant.

La dernière fois qu’on l’apercevait au cinéma, Ryan Gosling embarquait pour un voyage lunaire dans First Man (2018). Pour son retour sur grand écran, quatre ans après le film de Damien Chazelle, la star planétaire a vu les choses en grand et s’essaie, avec The Gray Man, à l’action movie.

Il y incarne Court Gentry – nom de code : Sierra Six – un espion recruté par une branche obscure de la CIA. Autrefois tueur à gages pour l’agence, Gentry en est désormais la cible numéro 1. Les renseignements américains ont mis sa tête à prix et engagé Lloyd Hansen (Chris Evans), un ancien agent reconverti dans le privé, féru d’interrogatoires musclés.

Un casting alléchant

Pour l’occasion, l’interprète de Captain America retrouve Joe et Anthony Russo, après Avengers : Endgame (2019). Mais dans The Gray Man, l’acteur se désolidarise complètement de l’image de Steve Rogers pour prêter ses traits à un assassin sociopathe et moustachu. Un registre dans lequel les spectateurs aiment voir Chris Evans, après un premier essai convaincant devant la caméra de Rian Johnson pour À Couteaux Tirés (2019).

À ce propos, il retrouve sa partenaire de jeu d’alors, Ana de Armas. Celle-ci incarne Dani Miranda, le bras droit de Gentry. On retrouve également la star de Bridgerton (2020), Regé-Jean Page, loin du rôle de jeune premier, ainsi que la star montante d’Hollywood, Jessica Henwick. Avec leurs rôles respectifs, les réalisateurs sont parvenus à casser leurs images – un atout majeur pour le film.
Ils forment ensemble un casting cinq étoiles, aux côtés duquel les frères Russo jouent avec les codes de l’action movie. Trahison, chasse à l’homme, complots… le tout enrobé dans des phrases clichées et bourrues – ce cocktail qui rappelle les thrillers d’action et d’espionnage des années 1980-1990, qui voyaient les vedettes de l’époque se battre en duel.

Les frères Russo et Chris Evans sur le tournage de The Gray Man.©Netflix

Un action movie en surdosage

Même le look des personnages principaux est ici hérité de cette grande époque kitsch, mais ô combien jouissive. C’est d’ailleurs le mot qui pourrait le mieux définir le cinéma des frères Russo ! Tant du côté de la production (Tyler Rake, 2020) que celui de la réalisation (Infinity War, 2018, Endgame, 2020), le duo de cinéastes s’amuse de l’abus des effets spéciaux numériques, d’un rythme effréné et d’un montage rapide. The Gray Man ne fait pas exception et, à défaut d’un scénario révolutionnaire, il pousse à son paroxysme les lubies spectaculaires de ses réalisateurs. À coups de drones, d’explosions et de cascades, Joe et Anthony Russo signent ainsi par touches un film digne de l’univers de Michael Bay.

Il en ressort un long-métrage certes rocambolesque, mais étouffant d’action et qui tire en longueur. Fort heureusement, Ryan Gosling y trouve un terrain de jeu encore peu exploré par sa filmographie. Une réinvention en action hero convaincante pour le futur Ken de Barbie, qui montre tout l’éclectisme de l’artiste. La trame de fond aux côtés de Billy Bob Thorton et Julia Butters, pourtant assortie de clichés, apporte de la profondeur à son personnage.

On aurait aimé que le personnage de Chris Evans bénéficie d’une appréhension aussi travaillée, les frères Russo ayant prouvé avec Cherry (2020) être capables d’écrire les personnages… Mais on regrette surtout le manque d’étincelles entre les deux têtes d’affiche. Malgré leur charisme et leur statut, on est loin du duel au sommet et des face-à-face les plus cultes du cinéma.

Il faudra donc apprécier The Gray Man pour ce qu’il est, c’est-à-dire un pur divertissement signé Netflix, supérieur aux récentes créations originales. Une grosse production imparfaite réunissant le nouvel Hollywood dans un jeu du chat et de la souris jubilatoire.

Article rédigé par
Lisa Muratore
Lisa Muratore
Journaliste