La première adaptation sérielle de The Sandman débarque ce vendredi 5 août sur Netflix. L’occasion de retrouver le légendaire Marchand de sable de Neil Gaiman dans une création inventive et étonnante.
Il a longtemps martelé ne pas vouloir offrir d’adaptation cinématographique ou sérielle à The Sandman. Pourtant, Neil Gaiman s’est finalement laissé tenter. Après plusieurs projets avortés, dont un film avec Joseph Gordon-Levitt, Warner Bros. Television a trouvé un accord avec Netflix pour produire la série éponyme, l’auteur des comics à succès officiant ici en tant que coproducteur.
Attendu sur la plateforme ce vendredi 5 août, le show suit Morpheus, le roi des Rêves. Après un siècle d’emprisonnement, ce légendaire Marchand de sable a perdu ses pouvoirs. Pour les récupérer, il va devoir se lancer à la recherche de trois artefacts, annonçant un programme rythmé de péripéties et de personnages mystiques. À l’image des romans graphiques fantastiques, The Sandman ne s’attache pas à dépeindre une intrigue unique, mais plutôt à narrer, tels les albums originaux, les aventures de Rêve parmi les mortels.
Une série fidèle aux romans graphiques originaux
Ceci a pour but d’offrir une série dynamique, qui s’affranchit des codes de la narration classique. Un choix qu’a déjà fait Neil Gaiman dans ses contes, lorsqu’il les a écrits entre 1989 et 1996. Le format garde également l’essence de l’univers initial dans le mélange des genres. Le succès de The Sandman réside avant tout dans les inspirations de son auteur pour les caractères gothiques. On le remarque à travers le personnage de Lucifer, à qui Gwendoline Christie, la star de Game of Thrones (Brienne de Torth), prête ses traits, mais aussi, avec les costumes de Rêve ou encore les différents démons que la série présente.
Néanmoins, l’auteur a aussi distillé dans son œuvre les codes des contes de fées historiques et populaires, ceux de la tragédie, du merveilleux, des super-héros (coucou Constantine), ou encore du fantastique. Des inspirations que l’on retrouve dans la série et qui apportent une patte inédite à l’univers.
Finalement, The Sandman réunit plusieurs références qui font de cette adaptation une création fidèle aux romans graphiques. Ils reposent aussi sur des concepts métaphysiques comme la mort, le désir, le désespoir. La série sonde l’âme humaine et ces grandes idées, pour y ajouter une réflexion sur les rêves, les mensonges et l’espoir.
S’accrocher à son rêve
Cet aspect permet alors d’offrir une seconde partie de saison passionnante. Elle s’ouvre sur un épisode pivot à huis clos, intelligemment mené d’un point de vue scénaristique, mais aussi scénique. Le défi des plans-séquences et de ce décor unique permet à The Sandman de monter d’un cran en termes d’imagination de l’espace, là où l’esthétisme du show peine souvent à convaincre.
La série est l’une des plus grosses productions de Netflix. Pourtant, l’abondance d’images sombres est loin d’être convaincante et ne reflète pas toujours l’univers développé dans les comics. La patte de Neil Gaiman et son rapprochement avec Alan Moore n’imprègnent pas suffisamment la série, tout comme la mise en scène propre à Rêve qui s’approche par moments du travail de Frank Miller sur Sin City (1991-2000).
Mais que les fans des romans graphiques se rassurent, le Marchand de sable est caractérisé de façon fidèle. Le ténébreux Rêve n’est pas manichéen, à l’image des personnages qui habitent les pages des livres et de la série. Ceci fonde l’un des aspects les plus importants de l’univers, tout comme la violence et les codes horrifiques que s’autorisent les épisodes.
Ce parti-pris permet à la série de se dépasser, tout en affichant une maturité dans sa réflexion. Preuve qu’il faut continuer de s’accrocher aux aventures de Rêve. Là où les premiers épisodes servent son origin story plus ou moins modifiée et offrent une quête banale centrée sur ses artefacts, les derniers nous plongent dans un onirisme enivrant. Ils introduisent aussi de nouveaux personnages, des enjeux inédits autour de Désir et de Désespoir, tout en développant les grands concepts humains. On retiendra notamment un épisode aussi émouvant qu’étonnant sur La Mort, la sœur de Rêve, un contre-pied à la légendaire Grande Faucheuse.
Enfin, The Sandman fait le choix de ne pas dévoiler dès le premier épisode toute l’envergure de son casting. On pénètre dans ce monde à travers les yeux de Tom Sturridge. L’acteur dévoilé par la comédie anglaise Good Morning England (2009) a bien grandi et nous envoûte de sa voix grave et de ses cheveux en pétard, comme une sorte de rêve au saut du lit. Il partage l’écran avec David Thewlis, Gwendoline Christie, Charles Dance, Boyd Holbrook, Jenna Coleman ou encore Patton Oswalt, pour ne citer qu’eux. Des visages familiers de l’heroic fantasy que les fans apprécieront très certainement croiser au détour d’un épisode.
Tous ces éléments vaudront la peine que l’on s’accroche à The Sandman au fil des épisodes. Le manque d’esthétisme, malgré la somme colossale déboursée par le géant du streaming (15 millions par épisode) ainsi que certaines longueurs propres au pilote ne doivent pas effrayer les plus sceptiques de l’adaptation. Bien qu’elle prenne son temps pour définir son personnage principal et les enjeux autour de sa capture, il en ressort une création profonde, rythmée, et bourrée de références. Un curieux mélange des genres propre à l’onirisme du Marchand de sable, qui devrait étonner les abonnés et les plonger dans un songe comme Netflix en produit rarement.