Suite au scandale qui a secoué la quinzième édition de la grande exposition documenta, grand rendez-vous quinquennal de l’art contemporain, sa directrice, Sabine Schormann, a remis sa démission. Une fresque du collectif indonésien Taring Padi avait déclenché la polémique après l’inauguration de l’exposition le 18 juin dernier.
Suite – et fin ? – d’une affaire qui agite le monde de l’art depuis maintenant plusieurs semaines, si ce n’est plusieurs mois. Sabine Schormann, directrice de la prestigieuse Documenta, a été démise de ses fonctions ce week-end en réponse à la polémique qui a entaché cette quinzième édition de la célèbre foire d’art contemporain fondée en 1955.
Après avoir exprimé sa « profonde consternation sur le fait que des motifs clairement antisémites aient pu être observés », le Conseil de surveillance de la manifestation, qui doit en principe durer jusqu’au 25 septembre prochain, s’est réuni ces jours-ci et est parvenu à trouver un accord avec sa directrice afin de résilier son contrat. Une direction intérimaire va être mise en place, en attendant le nom du futur directeur ou de la future directrice d’une des plus grandes manifestations d’art contemporain au monde (plus d’un million de visiteurs attendus).
La partie émergée de l’iceberg ?
L’exposition quinquennale, qui dure habituellement 100 jours, a été notamment ébranlée le mois dernier par la présence d’une fresque (People’s Justice, réalisée en 2002 pour un festival australien) du collectif d’artistes indonésiens Taring Padi, dont les traits antisémites furent rapidement relevés par l’ambassade d’Israël et des représentants des juifs d’Allemagne, qui demandèrent expressément le retrait de l’oeuvre.
Un des pans de la fresque affichait en effet la caricature plus que douteuse d’un soldat affublé d’une tête de porc, le casque flanqué d’une étoile de David et de l’inscription «Mossad», quand un autre représentait cette fois-ci un homme aux dents pointues, cigare à la bouche, portant papillotes et kippa, ainsi qu’un chapeau accompagné de l’inscription « SS », rappelant les caricatures antisémites des juifs orthodoxes.
Un premier temps recouverte, l’oeuvre sera finalement décrochée par la direction de la Documenta qui, déjà pointée du doigt en début d’année pour avoir invité un collectif appelant au boycott de l’État d’Israël, ne parviendra jamais réellement à éteindre une polémique qui a également jeté la lumière sur les origines peu glorieuses de Documenta. L’artiste allemande Hito Steyerl a notamment décidé, début juillet, de se retirer de l’événement, emboîtant ainsi le pas à Meron Mendel, directeur de l’établissement d’enseignement Anne Frank, qui démissionna quelques jours plus tôt de son poste de conseiller pour la Documenta face à l’inaction des organisateurs sur la question de l’antisémitisme.
Hito Steyerl, artiste mondialement reconnue, qualifiera ni plus ni moins l’événement de « désastre » auprès de Libération.