Critique

Hunger Games : lever de soleil sur la moisson est-il le meilleur tome de la saga ?

21 mars 2025
Par Robin Negre
Hunger Games : lever de soleil sur la moisson est-il le meilleur tome de la saga ?
©Pocket Jeunesse

Le nouveau livre de Suzanne Collins est disponible depuis le 20 mars 2025 en librairies et permet de découvrir le mystérieux passé d’Haymitch.

Depuis son revival en 2020 avec le roman La ballade du serpent et de l’oiseau chanteur, la saga Hunger Games se porte particulièrement bien. En adoptant le genre du préquel, l’autrice Suzanne Collins enrichit son histoire originale et peut développer différentes périodes, dévoilant d’autres éditions des Jeux de la faim.

Avec Hunger Games : lever de soleil sur la moisson, elle révèle ainsi le passé d’Haymitch Abernathy – mentor de Katniss Everdeen dans la trilogie –, alors qu’il participe aux 50e Hunger Games. Un ouvrage brutal, immédiat, qui parvient à développer un propos passionnant.

Le jour de ses 16 ans, Haymitch Abernathy participe, une nouvelle fois, à la terrible moisson, la cérémonie cruelle tirant au sort deux tributs dans chacun des 12 districts (un adolescent et une adolescente) pour participer aux annuels Hunger Games.

Choisi par un cruel jeu du sort et séparé de celle qu’il aime, il tombe l’année de l’Expiation, une édition anniversaire des jeux, tous les 25 ans, qui contient une particularité unique. Lors de cette seconde Expiation, il a été décidé que le nombre de tributs serait doublé : ils ne seront donc pas 24, mais 48 à descendre dans l’arène pour s’affronter.

Briser Haymitch

En prenant place 24 ans avant le premier Hunger Games et plus de 40 ans après le premier préquel (centré sur le futur Président Coriolanus Snow), Lever de soleil sur la moisson a instantanément une place particulière dans la saga littéraire. Tout en faisant le pont entre deux périodes, le fait qu’il soit publié après les autres lui confère une saveur particulière. Si ce nouveau tome de Hunger Games est si réussi, c’est aussi en partie grâce à ce qu’il y a eu avant et après dans l’esprit du lecteur, que cela soit le parcours de Katniss ou l’émergence des Jeux. En se plaçant au milieu de la saga, l’évolution des Hunger Games sur 75 ans se conçoit enfin.

L’autre force du livre est de placer Haymitch au centre de l’intrigue. Personnage essentiel et emblématique de la saga, il n’est plus l’archétype du mentor – qui accompagne et aide les autres candidats –, mais bien le protagoniste jeté dans la gueule du loup. S’il n’y a que peu de suspense concernant la victoire d’Haymitch, la construction minutieuse de son personnage par Suzanne Collins est fascinante à découvrir. Comment le jeune Haymitch, narrateur du livre, amoureux et naïf, est-il devenu ce vieux mentor alcoolique et reclus ? Une promesse de narration qui dépasse le simple stade des Jeux, et qui fait de ce Hunger Games le tome le plus brutal de la saga.

La violence politique, physique et institutionnelle ressentie est particulièrement forte. Lors de la première trilogie, l’espoir de voir le régime de Panem s’effondrer offrait aux personnages (et aux lecteurs) une lueur d’espoir. Dans le premier préquel, les événements étaient si éloignés de ceux de Katniss que la construction et l’élaboration des jeux permettaient en soi une sorte de curiosité légèrement morbide. Dans Lever de soleil sur la moisson, il n’y a aucune perspective de victoire, de joie ou de renversement de l’ordre établi. Chaque tentative de révolte ou d’insurrection ne peut mener qu’à plus de souffrance. Panem semble à son apogée, surpuissante.

À travers un récit pervers et mesquin, Suzanne Collins accepte la fatalité de son histoire et s’en donne à cœur joie pour faire souffrir les nombreux personnages. Si la saga Hunger Games reste de la littérature Young Adult, elle a toujours été l’une des plus violentes de par son postulat de mise à mort d’adolescents. Plus de 15 ans après les premiers tomes, l’autrice semble avoir acté que son lectorat a aussi grandi avec elle et développe plus en profondeur ses thématiques politiques, sans jamais abandonner son écriture précise, simple et efficace. 

Un intérêt constamment renouvelé 

Hunger Games : lever de soleil sur la moisson est un véritable page-turner. Les chapitres s’enchaînent avec rythme et Suzanne Collins sait également utiliser au mieux sa structure pour ne jamais rendre ce nouveau livre lassant. Car, au bout du cinquième roman Hunger Games, le mécanisme du récit est forcément connu par le lecteur : moisson pour désigner les tributs, voyage jusqu’à la capitale, préparation des candidats, affrontement dans l’arène… Mais l’autrice parvient à dynamiser l’ensemble grâce à la particularité de cette 50e édition, avec ses 48 tributs et son arène tenue secrète le plus longtemps possible.

Tout est familier, mais reste différent. Les nouveaux personnages introduits, que cela soit ceux du District 12 aux côtés d’Haymitch ou les autres tributs, portent le récit grâce à leur personnalité. Quand vient le moment de l’arène, la violence physique comme psychologique est multipliée, et les Jeux de la faim sont une nouvelle fois dévastateurs.

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L’aspect politique de Hunger Games : lever de soleil sur la moisson termine enfin d’offrir au livre toute sa richesse. Manipulation, propagande, contrôle de l’image, déformation des messages par les puissants pour soumettre les plus faibles… Le livre conserve des thèmes déjà abordés, mais Suzanne Collins, n’ayant pas besoin de convier l’espoir dans ce tome, s’en donne encore une fois à cœur joie pour rendre tout le système politique de ce Hunger Games puissant, violent et déprimant.

Par quelques touches, elle pose également les bases de Hunger Games : l’embrasement et Hunger Games : la révolte (les deuxième et troisième tomes de la saga) en faisant intervenir des personnages connus du lecteur. Le Président Snow, pour sa part, est appréhendé de façon différente, quelques années après l’avoir suivi dans La ballade du serpent et de l’oiseau chanteur, et n’a jamais été aussi cruel et implacable.

HUNGER GAMES PLAQUETTE

Hunger Games : lever de soleil sur la moisson serait-il aussi réussi s’il était sorti seul ou en tant que premier tome ? La maîtrise de Suzanne Collins dans la création de l’intrigue et le développement des personnages suffit à répondre par l’affirmative, mais force est de constater que ce cinquième tome de Hunger Games est d’autant plus fort et passionnant qu’il arrive après les autres. Offrant à l’un des meilleurs seconds rôles de la saga le statut de personnage principal, l’autrice fait aussi preuve d’une grande inventivité dans la torture et la cruauté de son protagoniste.

La désolation et la tristesse sont à l’honneur, les puissants règnent sans partage, tandis que les minorités sont écrasées sans pitié. Haymitch Abernathy en devient d’autant plus passionnant et surprenant à suivre. Hunger Games se porte définitivement bien depuis son revival en 2020. Après un excellent préquel dédié à la figure de l’antagoniste, Snow, c’est la figure du mentor, Haymitch, qui a le droit de briller. De quoi se demander quel sera l’archétype du prochain livre.

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