Véritable architecte de sa propre version littéraire de Brooklyn, l’auteur américain a su, en plus de 40 ans de carrière, captiver ses admirateurs du monde entier avec une œuvre romanesque inimitable dans laquelle la lecture prend des allures de jeux de miroirs.
L’écrivain américain nous a quittés mardi dernier à l’âge de 77 ans. Son œuvre passionnée, labyrinthique et post-moderne a fait de lui un incontournable de la littérature contemporaine. Cet héritier de grands auteurs américains du XIXe siècle tels que Ralph Waldo Emerson, Henry David Thoreau ou encore Edgar Allan Poe a constitué une œuvre unique où le quotidien prend des allures de jeu d’énigmes à la fois pour ses lecteurs et ses protagonistes. S’il laisse derrière lui de nombreux scénarios, recueils de poésie et autres essais littéraires, ce sont sur ses romans que nous avons décidé de nous replonger aujourd’hui.
1 – Baumgartner
Commençons par celui qui est, à l’heure actuelle, le moins lu. Et pour cause, il s’agit de l’œuvre la plus récente d’Auster. Véritable chant du cygne du romancier, le sujet du deuil traverse l’entièreté de Baumgartner. Et bien qu’il soit ardu de parler d’œuvre autobiographique (surtout lorsqu’il s’agit de la bibliographie du romancier du New Jersey), il semble complexe de dissocier totalement ce récit de la vie de son auteur.
Elle raconte l’histoire de Sy Baumgartner, un professeur de philosophie septuagénaire spécialiste de Søren Kierkegaard. Endeuillé par la perte de la femme de sa vie, Anna, ce dernier entraîne le lecteur dans ses souvenirs. Après l’annonce du cancer de Paul Auster par son épouse, Siri Hustvedt, il semble difficile de ne pas voir un écho entre la tragédie qui pesait sur le couple dans la vraie vie et celle qui a frappé Baumgartner. Rien de surprenant à ce que le fantôme de Kierkegaard, philosophe admiré par les mélancoliques du monde entier, ne pèse sur cette ultime publication de l’écrivain.
2 – Le Livre des Illusions
Conversations avec Chateaubriand pour ce livre de Paul Auster, Le livre des Illusions est considéré par de nombreux critiques comme l’un de ses meilleurs. On y retrouve un autre professeur endeuillé, David Zimmer, qui a perdu 11 ans auparavant sa femme et ses deux fils dans un crash d’avion. Après une longue période de dépression et d’égarements alcooliques, le veuf commence petit à petit à trouver un sens à la vie à travers les films d’Hector Mann, un acteur mystérieusement disparu qui a sombré dans l’oubli de nombreuses années auparavant. David commence une quête à travers le monde pour découvrir la filmographie du comédien. Mais très rapidement, cette aventure le mènera à croiser la route d’une personne qui prétend avoir partagé la vie d’Hector Mann…
3 – La Trilogie new-yorkaise
Il fallait bien clôturer ce palmarès par l’œuvre la plus populaire de Paul Auster. Ce triptyque (composé de Cité de verre, Revenants et La Chambre Dérobée) offre à ses lecteurs des romans de détective dans lesquels ils avaient parfois l’impression de mener eux-mêmes l’enquête. Ici, Auster s’approprie la Big Apple avec une virtuosité qui rappelle celle qui habitait le Dublin de James Joyce.
Les fins ouvertes de cette trilogie qui brise toutes les conventions nous poussent à nous interroger sur notre propre identité, et la lecture se mue en véritable jeu de piste dans un palais des glaces d’encre et de papier. Non content d’avoir fait émerger Auster sur le devant de la scène littéraire, cette trilogie constitue sans nul doute le meilleur point d’entrée vers son œuvre iconoclaste.