Il fut le premier de cordée au début des années 1980. Le DynaTAC 8000x est le premier téléphone portable commercialisé. Un dinosaure qui ne passe pas inaperçu car très loin des standards actuels ! C’est aussi le symbole du savoir-faire de Motorola, acteur toujours présent dans le paysage des smartphones.
Motorola, pionnier de la téléphonie mobile
Le premier appel depuis un téléphone portable a été passé le 3 avril 1973 à New York. Et c’était avec un téléphone Motorola, un prototype du DynaTAC. Au grand désarroi du destinataire de l’appel, Joel Engel, un ingénieur de Bell System. Son laboratoire, connu pour avoir inventé le premier téléphone en 1876, avait déjà réussi à intégrer un téléphone dans une voiture. Et il travaillait activement à la création… d’un téléphone portable. Mais le monde Joel Engel s’est effondré ce 3 avril 1973, car l’auteur du coup de fil n’était autre que Martin Cooper, un ingénieur de Motorola qui tenait plus que tout à informer son concurrent qu’il avait franchi le premier la ligne d’arrivée, d’une phrase devenue célèbre : « Allô ? Je suis dans la rue ! » Il eut pour toute réponse un long silence…
Certes, ce premier téléphone mobile n’a pas toutes les caractéristiques d’un appareil nomade. Il pèse plus d’un kilo, et sa batterie ne permet même pas d’atteindre la demi-heure de conversation. Mais quand bien même, Motorola est pionnier sur ce produit dont la démocratisation sera bien plus tardive. Le taux de pénétration du téléphone portable a dépassé 100 % au niveau mondial en 2016 ! En 2022, il s’est ainsi vendu plus de 1,20 milliard de smartphones. Et si Motorola est désormais un fabricant parmi tant d’autres, l’entreprise américaine originaire de Chicago – qui équipait les GI’s de talkie-walkie lors de la Seconde Guerre mondiale – a contribué à en faire un appareil grand public. Tendance même. Avant qu’Apple ne casse le game avec l’iPhone dans les années 2000, la marque a dominé le marché naissant de la téléphonie mobile outre-Atlantique jusqu’en 1997.
Ce si cher DynaTAC 8000x
Entre le premier appel en 1973 et la commercialisation du premier téléphone portable de Motorola, il se déroule une longue ellipse de dix ans ! Ce n’est en effet que le 6 mars 1983 que le DynaTAC 8000x fait son apparition sur le marché américain. Pourquoi une telle attente ? Pour laisser le temps au constructeur de l’Illinois d’obtenir les homologations auprès de la Federal Communications Commission, et surtout au réseau cellulaire d’être déployé sur le territoire des Etats-Unis grâce à AT&T. Prix affiché : 3995 dollars, soit l’équivalent de plus de 11 000 euros d’aujourd’hui avec l’inflation. Il fallait bien en effet rentabiliser les plus de 100 millions de dollars investis par Motorola dans la recherche & développement pour ce modèle pionnier !
Pour ce tarif dissuasif – à une époque où le salaire horaire minimum était de 3,35 dollars de l’heure aux US, le téléphone portable de Motorola se présente comme un combiné pour le moins encombrant : 25 cm de haut sous la toise – prolongés d’une antenne de 13,5 cm – et 783 grammes sur la balance. A titre de comparaison, l’iPhone 14 est inférieur à 15 cm de haut et pèse seulement 172 grammes. Néanmoins, ce format pouvait être enfin qualifié de nomade pour l’époque, celle où les téléphones se transportaient dans des valises ! A noter qu’il était disponible en trois coloris (gris sombre, gris et blanc, blanc clair).
Pas d’écran tactile évidemment sur le DynaTAC 8000x, mais un pavé numérique assorti de neuf touches fonctionnelles (recall, clear, send, volume, power, function, store, end, lock, function) et d’un écran d’une ligne affichant le numéro composé en LED de couleur rouge. Bienvenue dans les années 1980 ! Son autonomie est d’une heure… pour une durée de de recharge de dix heures. Là encore, les valeurs se sont inversées en quatre décennies mais qu’importe : ce DynaTAC 8000x était prêt à révolutionner les usages.
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Les évolutions successives
Malgré son coût prohibitif – sans compter l’abonnement de 50 dollars par mois pour l’utiliser –, le DynaTAC 8000x a trouvé son public. Des professionnels essentiellement, et notamment les agents immobiliers. Le premier téléphone portable de Motorola leur a en effet permis de rester joignable même lorsqu’ils assuraient leurs visites sur le terrain. Les traders aussi l’adoptent, à l’image de Gordon Gekko alias Michael Douglas qui l’arbore dans le film Wall Street en 1987 !
La série DynaTAC connaitra de nombreuses autres déclinaisons jusqu’en 1994. En 1987, le Dynatac 8500X débarque au Royaume-Uni. Il faut attendre le modèle International 3200 pour voir un téléphone portable Motorola en France en 1992. Il pèse alors 520 grammes et mesure 33 cm de haut antenne comprise. La version 3300 apportera une innovation majeure : les SMS ! C’est la série MicroTAC qui prendra le relais, avec une miniaturisation spectaculaire. Le StarTAC va quant à lui populariser le téléphone à clapet dans les années 1990.
Vite concurrencé à l’international par Nokia, Ericsson et consorts, Motorola connaîtra ensuite des hauts et des bas. La sortie du Razr en 2004 entretiendra la fibre « flip phone » du constructeur américain, qui sera ensuite racheté par Google puis Lenovo.
Le symbole des années 1980
Aujourd’hui, la vision du DynaTAC 8000x provoque rires et moqueries en raison de son format surdimensionné pour un téléphone portable avec nos lunettes actuelles. On l’appelle d’ailleurs le « Brick Phone » en raison de son épaisseur. Mais c’est oublié la révolution qu’a apportée ce téléphone visionnaire dans les années 1980. Il a ouvert la voie à un appareil qui nous semble aujourd’hui indispensable. Il a rendu les communications possibles partout tout le temps, malgré des contraintes techniques importantes en termes d’autonomie et une certes praticité perfectible. C’est un pionnier, un symbole, celui des années Reagan et du capitalisme triomphant de Wall Street !
L’histoire est néanmoins pleine de contradictions, puisqu’après la mode de la miniaturisation à l’extrême des téléphones portables au tournant des années 1990/2000, la tendance avec les smartphones et leur écran tactile a été à l’inflation de la taille de l’écran, jusqu’aux phablettes de près de 7 pouces à l’instar du Galaxy Note 20 Ultra ou de l’iPhone 16 Pro Max.
Le DynaTAC 8000x rappelle par ailleurs la vocation première d’un téléphone mobile : passer et recevoir des appels. Il s’agissait alors de son unique fonctionnalité, quand aujourd’hui un smartphone est avant tout un appareil photo, une console de jeux et un outil pour consulter et alimenter les réseaux sociaux, éventuellement pour envoyer des « vocaux » par WhatsApp ou Facebook Messenger.
