Décryptage

50 ans de culture Hip-Hop – Partie 4 : 2002-2012

10 mai 2023
Par Christophe Augros
50 ans de culture Hip-Hop - Partie 4 : 2002-2012

Un évènement va tout changer pour le Hip-Hop et pour la musique en général : l’arrivée du haut-débit dans les foyers. Résultat : fini les investissements et le développement de carrière. Un label s’impose comme majeur aux USA : Interscope. Une décennie surprenante, déstabilisante mais intéressante.

La carte du rap US se diversifie

En dix ans, quelques grosses structures réussissent à s’en sortir et à résister face à la restructuration du marché du disque. Mais globalement, c’est le retour des petites structures indépendantes, plus souples, plus à même de s’adapter aux changements. Citons ici Stones Throw, BBE, !K7, Roc-A-Fella…La décennie est celle du rapper Eminem. 6 albums sur la période et des niveaux de vente très élevés grâce, en partie, à son mentor Dr Dre. Les Black Eyed Peas de Will.i.am marquent également la période surtout avec The E.N.D. (2009 sur Interscope) et The Beginning (2010 toujours sur Interscope). Un certain Pharrell Williams devient vite incontournable. Globalement, le rap est multiple, multiculturel et mieux réparti sur la carte du pays. Atlanta, Detroit et Chicago rivalisent avec Los Angeles et New-York. Désormais, le graffiti et la danse n’attirent plus vraiment le grand-public. Ils sont entre les mains des seuls passionnés ou de personnes qui ne viennent pas forcément du hip-hop. Les Battle Of The Year, plus grande compétition internationale de breakdance, reste néanmoins très populaire. Le graffiti s’est institutionalisé. Il est en galerie et les prix des toiles atteignent parfois des records. Il y a longtemps que Lee, Futura, Jon et les autres ne sont plus dans la rue.

Changement de modèle économique

Itunes est créé en 2001 mais son développement est fort à partir de 2002, MySpace en 2003, YouTube en 2005 et Bandcamp en 2007. En dix ans, la distribution et la promotion de la musique ainsi que sa vente changent complètement de visage et de mains. Les restructurations sont importantes mais la musique est encore bien vivante, différente mais vivante. Il en va de même pour le rap qui fête ses 33 ans depuis le Rapper’s Delight de 1979.

En France, Diam’s règne sur les années 2000

C2C

Sur la période, on assiste à la disparition des précurseurs à l’exception du groupe IAM qui fait bien mieux que résister. Le rap français est prolifique et multiple. Ces dix années ont de nombreux marqueurs mais s’il fallait en garder deux, ce serait probablement le charisme de Diam’s et l’incroyable polyvalence des Hocus Pocus. Dans une culture où les femmes ne sont pas très nombreuses et ceci quel que soit la discipline (DJ, Danse, graffiti, rap), Diam’s réussit à dominer les années 2000 en l’espace de trois albums : Brut de femme (2003), Dans Ma Bulle (2006) et S.O.S. (2009). Les Nantais d’Hocus Pocus réussissent l’exploit de rassembler toutes les disciplines, fidèles à ce qu’était le Hip-Hop vingt ans plus tôt. Une partie du groupe est dans C2C (meilleurs DJ du monde), 20syl est également un graphiste redoutable. De plus, les Hocus Pocus sont d’excellents musiciens acoustiques, comme l’étaient ceux du label Sugarhill Records. À côté de cela, une variété de styles incroyables dans laquelle Kery James et Youssoupha côtoient Rohff, Abd Al Malik ou Grand Corps Malade. Au passage, le terme Slam ressurgit des entrailles des années 1970. Hormis les C2C (4 fois champions du monde consécutifs DMC en équipe), il ne reste plus beaucoup de DJ. Les précurseurs ont monté leurs structures et en vivent parfois très bien. Mais la transmission est fragile.

Dans les oreilles

Eminem – The Eminem Show (2002, Interscope)

Nelly – Suit (2004, Universal)

50 Cent – Get Rich Or Die Tryin’ (2003, Interscope)

The Black Eyed Peas – Elephunk (2003, Interscope)

Outkast – Speakerboxxx (2003, LaFace / Arista)

LudacrisChicken-N-Beer  (2003, Def Jam)

IAM – Revoir Un Printemps (2003, Delabel)

Pete Rock – Hip-Hop Underground Soul Classics (2003, Rapster)

Manu Key – Prolifique (2004, Alariana prod)

Rohff – La Fierté Des Nôtres (2004, Delabel / Virgin)

Hocus Pocus – 73 Touches (2006, On and On)

The Roots – Game Theory (2006, Def Jam)

J Dilla – Donuts (2006, Stones Throw)

Diam’s – Dans Ma Bulle (2006, Hostile)

Abd Al Malik – Gibraltar (2006, Atmospheriques)

T.I. – King (2006, Atlantic)

Little Brother – Getback (2007, ABB Records)

Youssoupha  – À Chaque Frère (2007, Hostile)

Kery James – À l’ombre du show business (2008, Up)

Grand Corps Malade – Enfant De La Ville (2008, AZ)

Kanye West – My Beautiful Dark Twisted Fantasy (2010, Roc-a-fella)

*NDRL : Sur ces quatre dossiers, j’ai essayé de dresser un tableau de la culture hip-hop en restant neutre. Bien sûr, il y aura des oublis qui sembleront peut-être essentiels à certains. Il ne s’agit en aucun cas de détenir la vérité mais juste de relater l’histoire telle que je l’ai vécue et d’être utile à ceux, trop jeunes, qui n’ont pas vécu ces périodes. Au début, beaucoup ne donnaient pas cher de la culture hip-hop. Voici maintenant 50 ans qu’elle est là même si c’est surtout le rap qui a survécu. Mais la danse est entrée au programme des Jeux Olympiques et des artistes comme 3D, Mode2, Futura, Jon, Lee et d’autres vivent de leur art et sont devenus des sources d’inspiration pour les générations suivantes. Quelle belle histoire !

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Article rédigé par
Christophe Augros
Christophe Augros
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