Les technologies et innovations dont nous profitons aujourd’hui nous paraissent aller de soi, mais elles sont parfois le fruit de l’esprit de génies à la trajectoire tragique ou qui ont vécu une fin dramatique. Découvrons ensemble ces grands esprits et leur fin difficile.
Ada Lovelace /1815-1852
Fille du grand poète britannique Lord Byron (qu’elle ne connut guère, elle ne le revit pas après la séparation de ses parents alors qu’elle avait 1 an), Ada Byron devint plus tard Comtesse de Lovelace par son mariage avec William King en 1835. Ce n’est cependant pas son carnet mondain qui nous intéresse ici, mais bien son apport décisif à un domaine qui nous concerne tous aujourd’hui, l’informatique.
Ada Lovelace fit preuve très précocement d’un vif intérêt – et de grandes prédispositions – pour les mathématiques. De santé fragile, elle dut jongler entre ses obligations familiales, plusieurs fausses couches (très fréquentes à cette époque) et sa passion pour les chiffres et les calculs complexes.
Cela ne l’empêcha pas de s’intéresser au concept de machine à calculer programmable, concept imaginé -mais jamais réalisé- par le mathématicien anglais Charles Babbage. Et c’est en participant à son développement que Ada Lovelace laissa son empreinte dans l’histoire en écrivant ce qui restera comme le premier programme informatique au monde. Ada Lovelace a été la première à concevoir un algorithme dans un langage qui lui permettait d’être exécuté par une machine qui préfigurait nos ordinateurs modernes.
La fin d’Ana fut très difficile puisqu’elle mourût à 36 ans dans de grandes souffrances, des suites d’un cancer de l’utérus, et qui plus est complétement ruinée.
Comme cela a été le cas pour de nombreuses figures féminines, l’apport de cette pionnière a été largement oublié dans les années qui suivirent. Heureusement, elle fut réhabilitée à l’avènement de l’informatique moderne. On retrouve ainsi son portrait en filigrane sur les logos d’authentification des produits Microsoft, l’architecture de la dernière génération de cartes graphiques Nvidia (série 4000) porte son nom et de nombreuses œuvres de fiction lui ont rendu hommage ces derniers années, enfin !
Si vous voulez en savoir plus sur ce destin exceptionnel, de nombreux livres lui ont été consacrés, dont l’Incroyable destin d’Ada Lovelace et La Petite Encyclopédie-Ada Lovelace.
Sylvester H Roper / 1823-1896
Injustement méconnu de nos jours, Sylvester H Roper est pourtant resté dans l’histoire comme l’inventeur du vélocipède à moteur, qu’on peut voir comme un très lointain ancêtre autonome de nos vélos électriques modernes.
Après plusieurs évolutions, il parvient à créer un vélocipède autonome qui pouvait grimper des côtes et atteignait une vitesse de pointe de 64 km/h.
Très tôt, il fit preuve d’un vrai génie pour la mécanique et pour les inventions, avec notamment la création dès 12 ans d’une machine à vapeur, alors même qu’il n’en avait jamais vu. Il conçut également dès ses 14 ans un moteur de locomotive.
Il fut un pionner de la fabrication de voitures et de vélo à moteur. Mais il œuvra aussi dans d’autres domaines assez éloignés, puisqu’on lui doit de nombreuses inventions et améliorations dans des domaines aussi variés que les armes ou les machines à coudre.
Un cerveau aussi inventif ne pouvait pas connaitre une fin banale, et Sylvester H Roper trouva la mort au cours d’un test de vitesse d’un de ses prototypes sur un circuit pour cyclistes. Il avait … 73 ans !
Johann Wilhelm Ritter / 1776-1810
Voici un personnage aussi déroutant que génial. Même si la postérité l’a un peu oublié, ses travaux et ses découvertes l’ont amené à faire deux découvertes qui servent toujours aujourd’hui dans notre quotidien : les ultra-violets, notamment utilisés dans les appareils pour désinfecter et les accumulateurs.
Johann Wilhelm était absolument obsédé par les courants électriques et par l’invention de la pile électrique par l’italien Alessandro Volta. A tel point qu’il n’hésita pas, toute sa vie durant, à tester des courants électriques sur son propre corps, notamment sa langue et ses yeux.
Ce chercheur habité par son sujet s’infligeait donc des courants électriques dans divers endroits, y compris ses parties génitales… Le but étant d’en étudier les effets, il s’auto-infligea des courants de plus en plus élevés, au détriment de sa santé. Il en vint même à prendre des drogues pour pouvoir supporter la douleur.
C’est pousser un peu loin la curiosité scientifique, à mon avis. Les expériences d’électrocutions de plus en plus longues, de plus en plus intenses et de plus en plus violentes seraient d’ailleurs la cause de sa mort à seulement 34 ans.
Alan Turing /1912-1954
Si Ada Lovelace a été longtemps injustement oubliée, il n’en est pas de même d’Alan Turing. Ce génie anglais a ainsi inventé un modèle mathématique abstrait qui porte son nom, la Machine de Turing. Bien qu’imaginé en 1936, ce modèle sert encore aujourd’hui en informatique théorique.
Mathématicien et cryptologue, Alan Turing est considéré comme le père de l’informatique moderne. Enfant précoce, il aurait appris à lire tout seul en 3 semaines. On ne sait si cette affirmation relève de la réalité ou d’une légende, toujours est-il que tout au long de sa scolarité, il montra de très grandes facilités en sciences et en mathématiques.
Si Turing a posé les bases scientifiques de l’informatique, il est surtout connu du grand public pour sa contribution au décodage d’Enigma. Ces machines allemandes, destinées au chiffrement des communications, étaient notamment utilisées par les nazis pendant la seconde guerre mondiale. On estime que le décryptage des messages allemands aurait raccourci de 2 ans la durée de la guerre
Les travaux de Turing sont aussi considérés comme fondateurs de la biologie théorique et de l’intelligence artificielle, laquelle prend aujourd’hui une importance croissante dans les activités humaines.
Largement reconnu pour ses travaux, Turing a pourtant souffert dans sa vie privée du fait de son orientation sexuelle. Homosexuel, il fut condamné pour pratiques indécentes en compagnie d’un autre homme en ces temps où l’homosexualité constituait un crime. Il fut alors confronté à une terrible alternative, la prison ou la castration chimique par œstrogènes.
Ce traitement, qui dure une année, s’accompagne de nombreux effets secondaires. Un an après la fin de son traitement, il est retrouvé mort dans sa chambre, la cause du décès étant attribuée à un suicide par empoisonnement au cyanure. Il avait 41 ans.
La vie d’Alan Turing a notamment fait l’objet d’un film, The Imitation Game, avec l’excellent Benedict Cumberbatch dans le rôle principal.
Steve Jobs / 1955-2011
S’il est une figure reconnue universellement dans l’univers High Tech, c’est bien Steve Jobs. Tout le monde connait l’histoire devenue légendaire de la création d’Apple Inc, avec Steve Wozniak et Robert Wayne. La suite appartient à l’histoire avec la commercialisation du premier Macintosh en 1984.
Parti en 1995 fonder Next, spécialisée dans les ordinateurs à destination du monde pro et de l’éducation, il revient dans l’entreprise à la faveur d’un rachat et apporte dans ses bagages le code source de ce qui deviendra MacOS X.
Visionnaire et génial communicant, Steve Jobs a su saisir l’air du temps et anticiper les attentes des consommateurs. Résultat, au cours de ses 14 ans à la tête d’Apple après son retour, sont apparus sur le marché des produits aussi iconiques que l’iMac, l’iPod et l’iPhone, sans oublier iTunes et les Apple Store.
Aujourd’hui, Apple, passé tout près de la faillite avant le retour de Steve Jobs, figure sur le podium de plus grandes capitalisations boursières et enchaine les succès technologiques et commerciaux, symbolisés par ses ordinateurs portables MacBook, ses écouteurs sans fil AirPods ou encore ses tablettes tactiles iPad, et surtout le produit star de la marque, l’iPhone, smartphone le plus vendu au monde.
Steve Jobs n’est hélas plus là pour apprécier les succès qu’il a largement contribué à initier. Atteint d’un cancer rare, il refuse de suivre les conseils de ses médecins qui souhaitent l’opérer et choisit dans un premier temps de suivre des thérapies douces. Las, la tumeur grossit et lorsqu’il finit par se faire opérer, les médecins lui découvrent des métastases au niveau du foie. Il finit par perdre son long et difficile combat contre la maladie et décède le 5 octobre 2011, à 56 ans.
Pour en savoir plus sur sa vie, le « Steve Jobs » de Walter Isaacson fait autorité.
Dernières publications
Aaron Swartz
Bien que peu connu du grand public, le nom d’Aaron Swartz fait pourtant figure de symbole dans le monde de l’internet. Talent très précoce, il a contribué dès ses 14 ans à la rédaction de la spécification 1.0 du flux RSS, cette technologie bien connue qui vous permet d’être informé des dernières publications d’un site qui vous intéresse. Plus guère utilisés aujourd’hui, les flux RSS ont eu leur heure de gloire il y a 15-20 ans.
Aaron Swartz avait une vision très ouverte de l’informatique et voyait internet comme un univers de partage et d’échange. Dès ses 14 ans, il crée The info Networks, une encyclopédie participative qui jouera un rôle précurseur, 2 ans avant la création de Wikipédia.
Toujours fidèle à ses idéaux, il a aussi participé à la création des licences libres Creative Commons. Ces licences facilitent à la fois la protection du droit d’auteur et le partage des œuvres.
Activiste très engagé, Aaron Swartz a aussi participé aux début de Reddit et est crédité en qualité de co-fondateur. Il quitte le site communautaire en 2006, dénonçant sa dérive commerciale suite à son rachat par un géant de la communication, Condé Nast.
Aaron croit aux vertus du partage et est persuadé qu’échanger et rendre libre d’accès les publications scientifiques facilitera le progrès et la justice. En 2012 il est accusé d’avoir téléchargé pas moins de 4,8 millions de documents – à accès payant – d’un site d’archivage de publications scientifiques pour les rendre accessibles gratuitement au public.
Bien que l’organisme en question n’ait pas porté plainte -Aaron Swartz n’a pas diffusé les documents et a restitué les disques de stockage sur lesquelles ils étaient conservés- le bureau du procureur a maintenu les chefs d’inculpation. Menacé de sanctions pouvant aller jusqu’à 35 années d’emprisonnement, Aaron Swartz choisit de se donner la mort par pendaison peu avant le procès, à 26 ans.
Il est depuis devenu une icone de l’internet libre, et a fait l’objet de nombreux livres, parmi lesquels « Ce qu’il reste de nos rêves » de Flora Vasseur. Il a lui-même beaucoup publié d’articles, de blogs et de tribunes, et je vous invite à consulter le recueil de ses récits « Celui qui pourrait changer le monde »
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