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Jackie Brown : l’héroïne afro modernisée

06 mai 2022
Par Clément D.
Jackie Brown : l’héroïne afro modernisée

Ces personnages ont changé l’image de la femme au cinéma. Elles ont marqué les esprits par leur singularité, leur courage, ou encore leur charisme. Nous revenons aujourd’hui sur le personnage de Jackie Brown, du film éponyme de Quentin Tarantino, dont le charisme et l’intelligence stratégique sont le pilier de ce film hommage à la Blaxploitation.

Qui est Jackie Brown ?

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Hôtesse de l’air, Jackie Brown arrondit ses fins de mois en profitant de son poste pour écouler de la cocaïne pour Ordell Robbie (Samuel L. Jackson), un caid de L.A. Arrêtée par la police, elle ressort libre, mais Robbie a l’habitude de tuer ceux qui se font prendre par peur qu’ils le balancent. Jackie Brown parvient toutefois à négocier un marché avec Robbie : elle écoulera 550000$ de sa coke tout en faisant semblant d’aider les flics. Mais elle ignore que l’associé et la petite amie de Robbie, Louis Gara (Robert de Niro) et Mélanie Ralston (Bridget Fonda), ont prévu un plan pour arnaquer Robbie. Pendant ce temps, les détectives Nicolette et Dargus (Michael Keaton et Michael Bowen) tendent eux aussi leurs filets. Malgré cet enchevêtrement de complots, Jackie Brown ne se laisse pas démonter et affronte, flingue au poing, quiconque se met en travers de son chemin. Elle ne cherche pas seulement à sauver sa vie mais cherche aussi à tirer profit de ce nid de guêpes en plumant tout ce petit monde.

A l’écran, Jackie Brown est incarnée par Pam Grier.

Jackie Brown : un hommage aux héroïnes de la Blaxploitation

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A ce jour, Jackie Brown est l’unique film de Quentin Tarantino à ne pas s’appuyer sur un scénario original, Jackie Brown est en effet une adaptation relativement fidèle de Punch créole, un roman d’Elmore Leonard écrit dans le style percutant, familier typique de l’auteur. Cette base naturaliste et la structure policière à double tiroir permettent à Tarantino de crier son amour pour les films de la Blaxploitation 70’s, ces films faits d’abord pour un public afro-américain comme alternatives à la suprématie blanche d’Hollywood. Jackie Brown est ainsi la digne héritière des héroïnes décidées de ces films : féminité traditionnelle, tempérament fort, à l’aise avec les armes à feu, revendiquant son propre pouvoir.

La croisade des héroïnes de Blaxploitation, contre les abus commis par certaines personnes blanches et masculines hommes (blancs et noirs), se retrouve aussi dans Jackie Brown. Femme noire (elle est blanche dans le roman), donc doublement discriminée, isolée face à une armée d’hommes dangereux, elle utilise toutes ses ressources physiques et mentales pour se sauver et même rouler dans la farine une kyrielle d’ennemis expérimentés. Le film revendique ainsi une certaine imagerie féministe, qu’on retrouve dans les œuvres de Jack Hill, influence de Tarantino, notamment Foxy Brown. Ce dernier film raconte la croisade vengeresse de l’héroïne éponyme contre les violences qu’elle a subies, à la violence graphique. Que Tarantino ait repris le nom « Brown » (Burke dans le roman) et son actrice Pam Grier – icone de la Blaxploitation ayant participé à 6 films rattachés au genre – est tout sauf une coïncidence.

L’originalité de Jackie Brown

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Si Jackie Brown n’a pas la violence radicale de la série B 70’s (c’est d’ailleurs le film le moins violent de Tarantino), l’esprit, davantage que la lettre, est bien présent. Le focus est toutefois moins sur l’action pure que sur les plans à double détente de chacun des personnages, même si on y retrouve l’argot de la région et la patte habituelle de Tarantino pour les dialogues. Contrairement à l’époque dont il s’inspire, Jackie Brown est donc une vision plus édulcorée de la violence typique de la Blaxploitation. Cet apparent dépouillement (tout relatif !) permet cependant de s’intéresser davantage au personnage de Jackie Brown, ses failles, ses doutes, ses réflexions, au-delà du symbolisme racial. Si Jackie Brown dégaine volontiers les flingues, la violence du film est surtout le fait des hommes, Brown ne l’utilisant qu’en autodéfense. Son triomphe final trouble la recette de la Blaxploitation où les climax sont davantage dans les scènes physiques alors qu’ici, elle est dans les twists des différents plans de chacun.

En la rendant plus vulnérable, Tarantino estompe la quasi-invincibilité des héroïnes du genre, systématique dès lors qu’elles se relèvent de leurs épreuves initiales. Autant que le film que son héroïne sont une version respectueuse de l’esprit de la Blaxploitation, mais passée au crible de l’originalité de Tarantino. Pam Grier invoque la froide fermeté de ses grands rôles passés, et trouve en Jackie Brown le personnage parfait pour amorcer une nouvelle carrière après une traversée du désert.

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Article rédigé par
Clément D.
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