Décryptage

Le rock allemand : une valeur sûre

27 janvier 2021
Par Mathieu M.
Le rock allemand : une valeur sûre

Alors que The Notwist s’apprête à sortir son onzième album, l’Allemagne continue d’être l’une des scènes musicales les plus vivaces d’Europe. Des années 1960 à nos jours, le pays du krautrock, des pionniers de l’électro et du métal continental accueillent nombre d’acteurs influents du rock. Décryptage.

L’Allemagne, un pays de rock dès les années 1960

Black-monk-time-180grC’est à Hambourg que le rock européen, et en particulier britannique, a trouvé un premier berceau. Le Star Club, dancing du quartier chaud de la cité portuaire, accueillait au début des sixties de nombreuses pointures. Les Beatles en ont fait leur lieu d’apprentissage du live en 1962, bientôt rejoints par d’autres formations anglaises.

Pour ce qui est d’une production nationale, il faut attendre le milieu des années 1960 pour voir émerger un groupe à grand succès, The Monks. Bien que composé au 4/5ème de musiciens américains – d’anciens GI’s – ce quintet aura posé les premiers jalons du punk, en mêlant le son des Beatles à des expérimentations sonores à base de feedbacks et de riffs saturés.

Rejeté par les milieux conservateurs, le rock allemand devient rapidement synonyme de liberté, de politique et de spiritualité. À la fin des années 1960, le son psychédélique de Pink Floyd gagne certains jeunes artistes, de Cologne à Berlin. Ils forment alors de nombreux collectifs, avec des idées bien ancrées à gauche, un certain goût pour le L.S.D., et une apparence de hippie.

Le krautrock, le genre le plus représentatif du rock Allemand

Can, Amon Düül, Faust, The Cosmic Jokers, Ash Ra Tempel… À la charnière des années 1960-1970, émerge d’Allemagne une musique envapée et composée de longues improvisations où le jazz et le courant minimaliste américain ne sont jamais loin. Malgré le caractère parfois très expérimental de cette esthétique, le son allemand gagne progressivement l’Europe. Cette « Kosmische Musik », appelée chez nous « krautrock » flirte avec la science-fiction ou le mysticisme indien, et tend à faire planer un large public.

C’est au sein de ce courant que naît également la musique électronique telle qu’on la connaît aujourd’hui. Elle est le fruit de quelques pionniers, portés au pinacle depuis, comme Klaus Schulze et son groupe Tangerine Dream, mais aussi et surtout Kraftwerk. Depuis quarante ans, l’Allemagne accueille avec bienveillance les sons de synthétiseurs, de boîtes à rythmes et de samplers : la techno y a trouvé, après Détroit, sa deuxième terre d’élection à Berlin.

Le hard rock et le métal allemand, une exportation réussie

En marge du krautrock, pléthore de groupes allemands ont connu la gloire chez eux au début des années 1970. Eloy, proche des musiques progressives, a séduit l’Europe, avant que deux ou trois rouleaux compresseurs ne conquièrent le monde, à commencer par Scorpions, qui a accueilli le guitar hero teuton, Michael Schenker, parti rejoindre ensuite UFO, un groupe britannique à l’influence considérable, sans oublier les Lucifer’s Friend et autres Birth Control.

Dans les années 1980, c’est le metal qui a explosé en Allemagne. Du côté du heavy, Accept a cartonné et continue régulièrement d’être tête d’affiche des plus grands festivals. Leur nouvel album, Too Mean to Die, paraît ce vendredi, signe de leur longévité qui n’a rien cédé côté intensité !

TOO-MEAN-TO-DIE

Précurseur du power metal, titillant les fans d’heroïc fantasy et de titres épiques, Blind Guardian connaît une popularité retentissante. On peut évidemment associer à ce courant pléthores de groupes encore plus extrêmes, dont la notoriété européenne n’est plus à démontrer, comme Sodom, Gamma Ray ou les vétérans d’Helloween. Que ce soit au niveau des festivals (comme le Wacken Air) et des labels (comme Nuclear Blast ou Century Media), nos voisins d’Outre-Rhin aiment le metal et réservent un accueil de roi aux stars anglaises et américaines du genre.

Et puis, vers la fin des années 1990, un groupe germanophone a réussi à s’imposer mondialement. Rammstein s’est emparé de la musique post-punk, gothique et industrielle typiquement allemande (que l’on songe à Atari Teenage Riot, Einstuüzende Neubauten ou Deutsch-Amerikanische Freundschaft) l’a mêlé au metal et percé grâce à une imagerie scénique remarquable.

L’Allemagne, un pays de tubes… et d’adolescents gothiques

Fool’s Garden et leur Lemon Tree, Liquido avec Narcotic, Trio le temps de Da Da Da… Les ondes radio mondiales ont plébiscité dans les années 1980-1990 certaines formations allemandes, qui avaient la particularité de faire du rock en anglais.

Mais des artistes très installés outre-Rhin ont aussi conquis le monde, comme Nena, qui a connu un succès retentissant avec 99 Luftballoons, et qui demeure une star là-bas, de la même manière que la chanteuse punk Nina Hagen.

Plus récemment, ce sont les Tokio Hotel qui ont prolongé la faculté du rock allemand à produire des tubes. Avec leur imaginaire inspiré du manga, leur look gothique/emo, leur pop-rock tranchant, la bande des jumeaux Bill et Tom Kaulitz a été un véritable phénomène pour les adolescents du milieu des années 2000. Ils viennent d’annoncer une nouvelle tournée pour 2021, le Beyond the World Tour, prouvant qu’il continue de rendre nostalgique bien des jeunes adultes de par le monde… 

The Notwist, BOY… Le rock indé allemand toujours en pointe !

Ouverte à la culture des métropoles mondialisées, l’Allemagne a, on l’a vu, toujours accueilli les genres musicaux anglo-saxons pour mieux les transformer et en faire quelque chose de neuf. Depuis les années 1990, une scène indie pop très intéressante a vu ainsi le jour. Elle est représentée notamment par The Notwist, initialement tourné vers le punk avant d’adopter une formule mêlant electronica, jazz, et indie rock, qui leur permet de tenir la comparaison avec Radiohead. Leur onzième album, Vertigo Days, apparaît comme un digne successeur de Shrink, leur disque culte.

Vertigo-Days

Les filles de BOY, les membres de Super700 ou Giant Rooks, moins médiatisés, poursuivent l’œuvre de The Notwist grâce à des compositions éclatantes, qui font figurer l’Allemagne sur la carte de l’indie pop mondiale. Moins célèbres de nos jours que leurs épigones electro, ces groupes prouvent néanmoins que nos voisins ont bon goût, depuis des décennies, en matière de musique !

Article rédigé par
Mathieu M.
Mathieu M.
Disquaire sur Fnac.com
Sélection de produits