Décryptage

« La Haine » : pourquoi c’est culte ?

09 octobre 2024
Par Lucile B.
"La Haine" : pourquoi c'est culte ?

« Jusqu’ici tout va bien… Jusqu’ici tout va bien… Jusqu’ici tout va bien. Mais l’important, c’est pas la chute. C’est l’atterrissage ». Bientôt trente ans que cette réplique culte hante les fans du film de Kassovitz. A l’occasion de la création de la comédie musicale La Haine : jusqu’ici rien n’a changé, revenons sur ce chef d’œuvre cinématographique.

Des acteurs iconiques

Avant tout, La haine, c’est un pari risqué. Hubert KoundéSaïd Taghmaoui et Vincent Cassel, trois acteurs anonymes au moment du tournage, qui dès lors, ne le sont absolument plus.

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Revenons sur les personnages qui les ont ancrés dans l’imaginaire collectif par le biais de la claque monumentale qu’ils offrent aux spectateurs. Pour leurs noms, on reprend le nom des acteurs, une manière de faire en sorte que le rôle leur colle à la peau. Cassel incarne ainsi Vinz, un homme particulièrement agressif, écervelé et quelque peu torturé. Taghmaoui interprète Saïd, un jeune délinquant pas vraiment pris au sérieux par ses amis et enfin Koundé joue Hubert, le boxeur « force tranquille », très raisonné et raisonnable.
Ils incarnent tous trois le parfait trio « Black-Blanc-Beur », qui représente dans les années 90 l’idée que les gens se font des cités. Des rôles impactants, une prestation scénique complète, une puissance sans égale et un choc collectif. Un cocktail qui laissera sans voix plus d’un spectateur et qui lancera la carrière du trio. Une fois sorti, le film n’est pas seulement acclamé par la critique, il connaît également un énorme succès au box-office.

Un réalisateur ambitieux

Les premiers succès cinématographiques de Mathieu Kassovitz se font, non en tant qu’acteur, mais en tant que cinéaste. Après Métisse, son premier long-métrage, Kassovitz réalise La Haine. Un véritable étendard dressé contre les violences policières. Un film ambitieux, dénonciateur, impactant et choquant qui alertera sur la brutalité vécue par les jeunes de banlieue. Le long-métrage est inspiré par la bavure policière ancrée autour du décès de Makomé M’Bowolé, mort d’une balle tirée dans la tête, à bout portant, durant un interrogatoire. Un terrible fait divers qui est malheureusement l’écho de mille autres et qui poussera le cinéaste à s’interroger sur la haine entretenue entre la cité et les forces de l’ordre.

L’utilisation érudite de techniques cinématographiques

Le succès de La Haine réside également dans son image ! Nous ne pouvons nier l’effet qu’a eu le Dolly Zoom des garçons, sur nous spectateurs. Pour le plaisir, on vous le remet !

Au-delà de ça, La Haine, c’est une pleine maitrise des procédés cinématographiques. Des scènes impactantes, rythmées par différents plans (épaules, rapprochés, américains), qui permettent de mettre en avant la singularité, l’intériorité et la profondeur des protagonistes. Le plus célèbre d’entre eux ? Sûrement le plan épaule amené par un sublime travelling avant qui met en scène la très impactante réplique de De Niro dans Taxi Driver, reprise ici par Vinz face à son miroir. Un plan qui montre l’influence du cinéma au sein de la banlieue tout en rendant un très bel hommage au film de Scorsese. 


Également, penchons-nous sur la couleur, ou plutôt sur l’absence de celle-ci. Pourtant tourné en couleur, le cinéaste a proposé, pour la sortie en salle de son long-métrage, de le passer en noir et blanc. Véritable parti pris, l’utilisation du noir et blanc, brut, loin d’être esthétisé, renforce la teneur du film. L’ancrant dans un passé pas si lointain et semblant illustrer les méandres d’une mémoire. Le noir et blanc, c’est aussi le deuil et l’hommage, de quoi pousser le propos du film à son paroxysme.

L’influence de la musique

On ne peut évidemment pas nier l’importance du son et donc de la musique dans un film. Dans La Haine, on constate que celle-ci est très peu présente. On ne relève que deux occurrences dont une est celle de DJ Cut Killer, mixant le morceau Sound of da police de KRS-One (samplé par le célèbre groupe de rap français NTM) avec Non je ne regrette rien d’Edith Piaf. De quoi mettre en avant l’importance des samples et d’agrémenter notre article en soulignant le fait que ce qui participe d’autant plus à rendre culte le film de Kassovitz, c’est l’influence qu’il a engendrée sur la culture rap.

Anecdotes en veux-tu, en voilà

Bien que Kassovitz serve une cause honorable, on ne peut s’empêcher de penser qu’il n’est pas le mieux placé pour illustrer ce qu’au fond, il n’a jamais connu. Pour faire taire aux rumeurs d’appropriation de la culture urbaine, le cinéaste ainsi que l’équipe de tournage, ont vécu, tout au long dudit tournage, dans deux appartements au cœur de la cité de la Noé à Chanteloup-les-vignes. En outre, pour légitimer son film et « faire moins peur » à l’agglomération, Kassovitz prêtera à La Haine le titre temporaire de Droit de cité.

Fun fact supplémentaire : quelques autres grands acteurs font de petites apparitions dans le long-métrage. Parmi eux on compte : Karin ViardBenoît Magimel, Vincent Lindon… On soulignera également la performance de Kassovitz, qui heurtera fortement Cassel au point que celui-ci trouve qu’il incarnerait mieux Vinz que lui-même. Kassovitz laissera pour autant son rôle à Cassel et interprétera un skinhead mis à mal par notre trio.

Côté résonnance internationale, l’actrice Jodie Foster, qui aurait particulièrement apprécié le long-métrage, a proposé à l’équipe du film de le marrainer aux Etats-Unis. Selon cette information, et donc grâce à elle, des monstres sacrés du septième art ont pu visionner La Haine, et parmi eux, le très célèbre Martin Scorsese, qui, on l’espère, a souri face au clin d’œil fait à Taxi Driver 

La Haine : jusqu’ici rien n’a changé

Rien n’a changé, ou presque ! Mathieu Kassovitz garde les commandes de son long-métrage en l’adaptant sur scène dès le 10 octobre, avec des dates dans toute la France. Il confère à son œuvre un caractère contemporain en mêlant chant, danse et rap à l’esthétique originelle de son film. Une adaptation très attendue, qui on l’espère fera perdurer le mythe de La Haine.

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Article rédigé par
Lucile B.
Lucile B.
Rédactrice fnac.com
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