Décryptage

Lovecraft : comment a t-il influencé le cinéma d’épouvante mondial ?

26 juin 2020
Par Auxence
Lovecraft : comment a t-il influencé le cinéma d'épouvante mondial ?
©dano, dibujando

H. P. Lovecraft, l’homme, la légende, a laissé un héritage vertigineux qui ne cesse d’inspirer les créateurs d’histoires d’épouvante partout sur le globe. Par quel tentacule prendre l’affaire ?

H. P. Lovecraft, l’homme, la légende, a laissé un héritage vertigineux qui ne cesse d’inspirer les créateurs d’histoires d’épouvante de par le globe. Par quel tentacule prendre l’affaire ?

H. P. Lovecraft, le père de l’horreur venue d’ailleurs

On ne peut parler du genre de niche qu’est la fiction horrifique sans évoquer l’un de ses pères fondateurs, l’illustre Howard Phillips Lovecraft.

VP-LovecraftNé le 20 août 1890 et mort le 15 mars 1937 à Rhode Island, États-Unis, H. P. Lovecraft est un romancier, nouvelliste et poète spécialisé dans un genre bien précis, la science-fiction horrifique. L’ensemble de son œuvre, labyrinthique et mystique, décrit comment l’homme est confronté à des horreurs indescriptibles, souvent cosmiques, qu’il ne peut comprendre et encore moins affronter. Ainsi, à travers ses écrits qui abondent en adjectifs narrant l’« indicible », l’ « inénarrable », il replace l’homme dans sa microscopique existence, le faisant descendre du piédestal sur lequel le christianisme et le siècle des Lumières l’ont présomptueusement placé. C’est pourquoi Lovecraft met un point d’honneur à rendre ses récits les plus tortueux et abstraits possibles, évitant tout anthropocentrisme dans ses représentations de monstres et entités cosmiques, se moquant autant des tares humaines et des mœurs décadentes de son époque que des réponses absolues apportées par la science et la religion, deux voies qu’il rejette.

Il est le créateur de monstres et d’univers devenus cultes et repris allègrement dans la fantasy et la science-fiction modernes, comme le Mythe de Cthulhu, un dieu des abysses aux mille tentacules, le Necronomicon, un grimoire secret écrit par l’Arabe fou Abdul al-Hazred, ou encore l’entité magique atemporelle Yog-Sothoth. Inventeur d’un nouveau langage narratif, d’une nouvelle spiritualité tournée vers le cosmicisme et le fatalisme, Lovecraft est aussi influent pour la postérité qu’Edgar Allan Poe, l’une de ses influences, bien que son succès fut confidentiel de son vivant. Quelques-unes de ses œuvres les plus célèbres incluent L’Appel de Cthulhu (1926), La Couleur tombée du ciel (1927), L’Affaire Charles Dexter Howard (1927), Le Cauchemar d’Innsmouth (1931), Les Montagnes hallucinées (1931) et Dans l’abîme du temps (1935).

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Son influence sur des auteurs contemporains est aussi insondable que l’étendue de son univers effrayant, mais citons quand même son disciple August Derleth, qui a publié ses œuvres à titre posthume et étendu son œuvre, ou encore Stephen King et Alan Moore qui s’en réclament. Figure controversée, à qui l’on attribue une grande misanthropie et un racisme féroce, H. P. Lovecraft n’en reste pas moins un auteur incontournable qui possède une force de suggestion incroyable et dont les œuvres ont été, parfois justement, souvent en vain, illustrées par des artistes et portées à l’écran.

Une œuvre d’une grande puissance cinématographique

 

La terreur philosophique suscitée par le cosmicisme de Lovecraft a été retranscrite maintes fois au cinéma (on compte une centaine d’adaptations sorties entre 1963 et 2020). Bien que moins focalisés sur le gore et les effusions de sang que la moyenne des films d’horreur, les films dits d’horreur « lovecraftienne » partagent des similarités avec le genre du body horror, où déformations des corps côtoient possessions et mutations. Comme ses œuvres, les films qui s’en inspirent prennent un malin plaisir à décrire la torture psychologique de ses personnages, poussés à la démence par les apparitions et événements incompréhensibles auxquels ils font face. Ainsi, le potentiel cinématographique de l’œuvre de Lovecraft est illimité, car chaque créateur peut mettre en avant sa propre vision fantasque du mythe. Quelques pépites du cinéma de genre :

 

 

La malédiction d’Arkham (1963)

 

Première adaptation au cinéma d’une nouvelle de Lovecraft, La malédiction d’Arkham de Roger Corman met en scène l’arrivée inquiétante de Charles Dexter Howard, descendant d’un impie, dans un petit village brumeux et marécageux. Horreur gothique expressionniste, ambiance de fantômes et le grand Vincent Price (la voix off dans Thriller de Michael Jackson !) sont de la partie.

 


The Thing (1982)

 

Soyez prévenus, chef-d’œuvre ! Impossible de passer à côté de The Thing, réussite totale d’horreur lovecraftienne (bien que tirée d’une nouvelle de John W. Campbell, Jr.), voire le plus réussi des films de John Carpenter. Une créature insaisissable vient terroriser les scientifiques d’une expédition polaire… Des effets spéciaux artisanaux touchant le génial, une bande sonore glaçante, un suspens monstrueux. Le premier film de la « trilogie de l’Apocalypse » de Carpenter, avec les non moins terrifiants Prince des ténèbres (1987) et L’Antre de la folie (1995).

 




From Beyond : Aux portes de l’au-delà (1986)

 

Bon, une fois n’est pas coutume, From Beyond de Stuart Gordon se veut une interprétation particulièrement gore et tordue de De l’au-delà, nouvelle de 1920. Fans d’horreur délicieusement dégoulinante, de dépravation physique et morale exacerbée, vos yeux en tomberont (littéralement).


Evil Dead II (1987)

Qu’est-ce qui peut manquer à une bonne dose d’horreur WTF, sinon de l’humour noir encore plus WTF ? Cette émancipation de la raison et de la santé mentale porte un nom, et c’est Evil Dead II, benjamin d’une trilogie signée Sam Raimi. A savourer au 666e degré.


The Mist (2007)

Saviez-vous qu’avant de réaliser/produire la série The Walking Dead, Frank Darabont avait adapté par trois fois Stephen King (et par ricochet, feu Lovecraft ?). Dans The Mist, des habitants d’une petite ville de province américaine se réfugient dans un supermarché, entourés d’une brume meurtrière… Un déluge d’aberrations grouillantes qui feront le bonheur des doctorants ès Chtulhu.


The Lighthouse (2019)

LE film d’horreur de l’année dernière, récompensé à Cannes et Deauville, The Lighthouse raconte l’histoire hypnotique de deux gardiens de phare (Willem Dafoe et Robert Pattinson) sur une île mystérieuse et reculée de Nouvelle-Angleterre dans les années 1890. OVNI filmé en noir et blanc, faisant appel aux vieilles légendes marines, celui-ci brouille volontiers délire et réalité, rêve et éveil, démons et merveilles.

© Visuel d’illustration : dano sur Dibujando

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