Voilà, le 28 mai dernier, le Festival de Cannes a remisé paillettes, tapis rouge et bulles de champagne, achevant sa 75e édition par un palmarès à la fois surprenant et attendu. Entre habitués souvent récompensés et nouveaux venus qui vont compter, voici ce qu’il faut retenir des choix du jury porté par son président, Vincent Lindon.
La Belgique à l’honneur
Trois films belges étaient en compétition et aucun n’est reparti bredouille, bien au contraire. Est-ce parce que le président du jury, Vincent Lindon, est sensible aux films engagés et ancrés dans le réel ? Toujours est-il que Close de Lukas Dhont, histoire d’amitié adolescente tirant à sa fin, a remporté l’un des deux grands Prix du jury ex aequo et bénéficié, lors de sa projection, de douze minutes de standing ovation. Jean-Pierre et Luc Dardenne, qui ont déjà tout raflé, ont obtenu le Prix du 75e anniversaire, créé tout spécialement pour l’occasion, pour leur chronique sociale sur fond d’immigration Tori et Lokita. Quant au couple de réalisateurs Charlotte Vandermeersch et Félix Van Groeningen, il peut se féliciter de son Prix du jury ex aequo pour leur film tourné en Italie, Les Huit Montagnes.
Des artistes récompensés étonnants
Lukas Dhont est d’ailleurs sans conteste un réalisateur à suivre tout particulièrement. À la manière d’un Xavier Dolan, il est l’un des plus jeunes cinéastes (31 ans) à glaner un prix aussi prestigieux, lui qui s’était déjà fait remarquer pour son premier long, Girl, Caméra d’or en 2018. Mais il n’est pas le seul à faire parler de lui. Diamétralement opposé, le réalisateur polonais de 84 ans, Jerzy Skolimowski, s’est vu décerné ex aequo, le Prix du jury pour le film Hi-Han, avec six ânes pour héros.
L’Iranienne Zar Amir Ebrahimi a créé la surprise en coiffant au poteau Marion Cotillard, une des favorites dans la catégorie Prix d’interprétation féminine, pour son rôle dense et bouleversant dans Les Nuits de Marshhad d’Ali Abbasi. Le Prix du scénario revient à Boy from Heaven du Suédois Tarik Saleh, thriller situé en Égypte sur une histoire inspirée par Umberto Eco quelques années auparavant. Enfin, la Caméra d’or a distingué War Pony de Riley Keough et Gina Gammell, nouveau duo de réalisatrices à suivre tout particulièrement.
Les trophées des habitués
Outre les frères Dardenne, rois de la Croisette à chaque édition ou presque, d’autres habitués des podiums ou des sélections cannoises ont également été récompensés. C’est le cas notamment de Claire Denis pour son drame moite situé au Nicaragua, Stars at Noon, elle qui fut présidente du jury courts-métrages et de la Cinéfondation lors de l’édition 2019 du Festival. Ou celui du Sud-coréen Song Kang-ho, acteur fétiche de Park Chan-wook et Bong Joon-ho, Prix d’interprétation masculine pour le nouveau film de Kore-eda Hirokazu, Les Bonnes Étoiles. Ce dernier avait d’ailleurs reçu le Prix du jury en 2013 pour Tel père, tel fils et la Palme d’or en 2018 pour le sublime Une affaire de famille.
Quant à Park Chan-wook justement, l’un des réalisateurs sud-coréens les plus reconnus à travers le monde, son Decision to Leave repart avec le Prix de la mise en scène. Ce polar étrange rejoint donc Old Boy, Thirst, ceci est mon sang et Mademoiselle dans la liste de ses films récompensés à Cannes. Enfin, le Suédois Ruben Östlund rejoint le cercle fermé des réalisateurs doublement palmés : sa critique acerbe de la lutte des classes Sans filtre, fait aussi bien que sa critique acide du monde de l’art contemporain The Square. Rendez-vous en 2023 pour certains d’entre eux ?