Il avait le jazz dans le sang, mais sa vie aurait pu être un morceau de rock & roll. L’écrivain Boris Vian n’a pas cessé de manœuvrer entre excès, passion, maladies mais surtout infatigable besoin de créer. Un des destins les plus fulgurants du XXe siècle. Retour sur un personnage et une œuvre hauts en couleur.
Une biographie tumultueuse
Né en 1920 à Ville d’Avray (dans les actuels Hauts-de-Seine), Boris Vian est issu d’une famille assez aisée, à l’âme artistique (en témoignent les nombreuses fêtes organisées dans leur demeure). Le krach boursier de 1929 met fin à une période d’insouciance et plonge la famille dans la difficulté. Le jeune homme gardera pourtant cet esprit fêtard et libre tout au long de son existence. Bien qu’accablé par des maladies diverses dès l’âge de 12 ans (rhumatismes, insuffisance cardiaque, fièvre typhoïdique), Boris Vian croque la vie à pleine dents. Professionnellement, son parcours est assez simple : brillant élève, il devient ingénieur mais se lasse assez vite de cette carrière. Il entre alors chez Phillips où il dirige une collection dédiée au jazz. Mais son CV d’artiste est autrement plus foisonnant, la preuve ultime de son amour débordant de la vie : il est ainsi tour à tour écrivain, poète, parolier, chanteur, musicien, directeur artistique, scénariste, traducteur, conférencier, acteur et peintre ! Autant de vies et de projets concentrés en un laps de temps malheureusement trop court. Boris Vian s’éteint le 23 juin 1956, lors de la projection d’un film adapté d’un de ses romans les plus célèbres J’irai cracher sur vos tombes.
Une œuvre méconnue
Boris Vian est certes un auteur célèbre, mais il gagne pourtant à être mieux connu. C’est dire que le personnage dépasse largement l’auteur. Un décalage dû en partie à son côté prolifique et à une appréciation tardive de son œuvre. De son vivant, les écrits de Vian se voient rejetés par la critique et ne trouvent pas leur public. Les livres qu’il publie sous pseudonymes (Vernon Sullivan avant tout) ont ainsi plus de succès que ceux qu’il signe de son nom propre. L’œuvre de Vian étonne par son infinie richesse. Pas étonnant qu’elle suscite des vocations et devienne l’objet de nouvelles recherches. Il y a encore tant de choses à découvrir ! Par exemple : bien que des artistes célèbres tels Joan Baez ou Jacques Higelin aient interprété ses chansons, beaucoup de ses compostions restent encore inédites. Vian a publié 11 romans, 4 recueils de poésie et de multiples pièces de théâtre, et pourtant ce corpus considérable ne représente que le sommet de l’iceberg…
Un héritage bien vivant
Boris Vian reste ainsi un auteur bien vivant, un auteur que chacun peut s’approprier. Ce qui s’accorde avec son amour du swing, du jazz, une musique organique, toujours en mouvement. Protéiforme et passionnant, l’héritage de Vian réserve encore des surprises, comme ses peintures qui ont récemment connu l’honneur d’une exposition à succès. Redécouvert dans les années 1960, quand L’Écume des jours devient le livre de chevet d’une génération révoltée, l’œuvre de Boris Vian résonne avec une jeunesse qui redécouvre son engagement, son énergie débordante et son amour immodéré de tout ce que la vie peut offrir. La dernière adaptation de Michel Gondry montre bien l’intérêt qui persiste pour un des artistes les plus atypiques du XXe siècle.
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