Écrivaine, comédienne, et metteur en scène, Yasmina Reza, l’auteure de Conversations après un enterrement et d’Art – pièces au succès international – publie, en cette rentrée littéraire, Babylone. Un roman construit en huis clos dont on imagine déjà l’intrigue et les dialogues portés sur grand écran ou sur les planches, tant ses personnages et ses situations relèvent de la mise en scène.
60 ans… la vie file
Elisabeth, la narratrice, vient de passer la soixantaine. Elle voit le temps filer sans regret. « Une fille fait les 400 coups, se trimbale juchée et peinturlurée et tout à coup elle a 60 ans ». Sa mère vient de mourir, elle estime que le plus dur est fait et que sa vie mérite un petit 12/20, ni plus ni moins, mais c’est pour ne pas vexer son entourage. Cependant, elle n’est pas déprimée, et se sent prête à se lancer dans des amitiés et des aventures improbables.
Un héros de Robert Franck
Elisabeth se rapproche de son voisin du dessus, Jean-Lino, « un héros de Robert Franck d’aujourd’hui ». Un homme discret, marié à une douce et fatigante écolo-excentrique, amie des animaux. Un soir, après une fête chez Elisabeth et son mari, l’homme descend leur annoncer calmement qu’il a commis un acte pour le moins répréhensible. Et Yasmina Reza de nous conter alors sous la forme d’un vaudeville policier les hésitations, le cheminement de nos deux héros pour affronter une situation singulière… Leur part sombre mais attachante se révèle petit à petit.
Dérapage contrôlé
Comme toujours, Yasmina Reza excelle dans la description chirurgicale de scènes de la vie sociale. Ce moment précis où de petits riens déclenchent des catastrophes. Son pessimisme sur les rapports humains, la mort, le couple, en devient drôle et mordant. Et elle n’a pas son pareil pour faire dégénérer une situation et nous plonger dans des réflexions inhabituelles. Babylone, un roman élégant et pertinent sur la rencontre de deux solitudes.
—
Prix Renaudot 2016
Paru le le 31 août 2016 – 220 pages
