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Réussir l’adaptation d’un jeu vidéo à l’écran est loin d’être une histoire simple

03 avril 2022
Par Ugo Bocchi
L’adaptation sur grand écran du jeu “Resident Evil” fête ses 20 ans.
L’adaptation sur grand écran du jeu “Resident Evil” fête ses 20 ans. ©Constantin Film

Mortal Kombat, The Witcher, Warcraft, Sonic, Uncharted, Angry Birds, Super Mario Bros… Les adaptations de jeux vidéo en films et en séries sont nombreuses, et plus ou moins convaincantes, il faut bien le dire…

Dans un immense laboratoire souterrain, baptisé Hive, un virus est libéré. C’est la panique : des zombies attaquent de tous les côtés. Les scientifiques qui y travaillent se font massacrer. En robe rouge, un semi-automatique dans chaque main, Milla Jovovich se réveille, amnésique, dans un manoir et se fait embarquer sans trop savoir comment, ni pourquoi, dans un train direction l’épicentre de la contamination, pour empêcher que la situation ne dégénère au sein du complexe scientifique.

Bienvenue en 2002, date de naissance du film Resident Evil. Six ans après sa sortie et son succès sur PlayStation, le jeu vidéo d’horreur tente donc l’aventure au cinéma. Et clairement, l’année de ses 20 printemps, le bilan est mitigé (mais n’empêche pas Netflix de se lancer dans une série). Si les critiques sont plutôt mauvaises (aucun des films de la saga ne passe jamais la moyenne sur les sites spécialisés), les recettes, elles, sont franchement éloquentes : la série de films a rapporté plus d’un milliard de dollars depuis la sortie du premier opus.

Des adaptations aussi populaires et critiquées que bankables

C’est d’ailleurs souvent le paradoxe avec les adaptations de jeux vidéo en films ou en séries : pas très bien accueillies par la critique (à raison, la plupart du temps), mais hyper bankables. Sur Rotten Tomatoes, sorte d’Allociné américain, les films adaptés de jeux vidéo comptent pour environ 30 % des sorties. Autant dire pas grand-chose. C’est le cas pour Mortal Kombat, Lara Croft, Final Fantasy, Prince Of Persia, Hitman, Silent Hill, Dead or Alive, Alone in the Dark, Doom, Silent Hill, Tekken, Max Payne, Street Fighter, Need For Speed, Warcraft ou encore Uncharted, dernièrement. Les tentatives sont nombreuses et la plupart du temps, le résultat est le même : ils font envie, suscitent énormément d’attente, nécessitent un budget colossal pour, finalement, peu convaincre.

Uncharted, le film d’aventure avec Tom Holland a explosé le box-office.©Atlas Entertainment, PlayStation Productions, Columbia Pictures

Paul Tassi, journaliste spécialiste des jeux vidéo pour Forbes, avance sans détour : « Les jeux vidéo adaptés à l’écran ne reposent pas sur les meilleures histoires. » Autrement dit, on n’y joue pas pour le scénario mais plutôt pour le gameplay, l’univers, l’aventure. Pour Cara Ellison, conceptrice de jeux vidéo, « les jeux que les gens veulent adapter en film n’ont pas de bons ressorts dramatiques. Un bon scénario de film est concis, mais les grands jeux ne le sont pas. Ceux avec lesquels les studios de cinéma pensent pouvoir gagner de l’argent durent au moins 15 heures. Intégrer tous les trucs bizarres que les gens mettent dans un jeu dans un film de 125 minutes est un travail difficile – et probablement inutile ».

Pour le pire et le meilleur ?

C’est le cas notamment du premier film adapté d’un jeu vidéo d’Hollywood. Super Mario Bros., sorti en 1993, a été un échec sur tous les plans. Tournées en live-action, les aventures de Mario et Luigi, deux frères plombiers et moustachus, à la rescousse de la princesse Daisy, peinent à transporter le spectateur dans l’univers fantastique imaginé par Shigeru Miyamoto et développé par Nintendo. Intrigue simpliste, acteurs pas convaincants, esthétique pas en phase avec le produit de base… Bref, décevant pour la plupart des fans et surtout en termes de box-office : 39 millions de dollars de recette contre 48 millions de budget.

Arcane a été dans le top 10 des séries les plus regardées sur Netflix durant plusieurs semaines.©Netflix

Heureusement, il y a tout de même quelques exceptions : Detective Pikachu et Werewolves Within au cinéma ou encore The Witcher et Arcane (League Of Legends) en séries ont réussi à séduire à la fois la presse et le public. Prendre des libertés avec le scénario de base, comme par exemple pour le film Pokémon ou la série tirée de LOL, est donc une possibilité, voire une sérieuse piste à creuser. Les spectateurs aiment retrouver un monde dans lequel ils ont évolué, mais ont également envie de s’en détacher, de découvrir une autre histoire, inédite, une sorte de spin-off fidèle et sobre, qui tiendrait en un format série ou film. Bref, la recette miracle n’a pas encore été trouvée.

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Ugo Bocchi
Journaliste