Article

Apple et l’IA : trop de prudence ? Ce que révèle la WWDC 2025

13 juin 2025
Apple et l’IA : trop de prudence ? Ce que révèle la WWDC 2025
©DenPhotos/Shutterstock

À rebours de la frénésie autour de l’intelligence artificielle, Apple a adopté une posture beaucoup plus mesurée lors de sa conférence développeurs. Une stratégie assumée ? Ou le signe d’un retard stratégique face à ses rivaux ? Décryptage.

Depuis plusieurs mois, les rumeurs bruissaient : cette WWDC 2025 – qui s’est tenue du 9 au 13 juin – serait la grande année de l’IA chez Apple. Dans les coulisses, on parlait d’un Siri réinventé, dopé à l’intelligence artificielle générative, d’une intégration native dans l’ensemble de l’écosystème, et même d’un partenariat historique avec OpenAI. Les fans s’attendaient à un one more thing en lettres majuscules.

Il y a quelques mois, en octobre 2024 avec iOS 18 pour iPhone, Apple a dégainé Apple Intelligence, une suite d’outils dopés à l’IA… mais avec une extrême prudence sur la sémantique comme sur le déploiement. En surface, Siri a gagné (un peu) en fluidité, comprend mieux les demandes complexes, et peut désormais faire appel à ChatGPT, tout en précisant qu’aucune donnée n’est partagée sans l’accord explicite de l’utilisateur. Du côté de l’écriture, l’IA peut résumer des notes, reformuler des messages ou trier des mails… Mais rien de renversant à l’heure où les concurrents multiplient les avatars vocaux et assistants proactifs. La WWDC 2025 devait tout bouleverser. Il n’en a rien été.

Pendant ce temps, la concurrence s’emballe

Chez Google, Gemini est désormais partout. Dans Gmail, dans la recherche, sur Android, dans les outils bureautiques… l’assistant IA s’impose comme un nouveau centre de gravité. Microsoft a fait de Copilot son OS bis, et Meta dégaine des avatars vocaux génératifs aux visages de célébrités. Même Samsung, longtemps discret, propose avec Galaxy AI un assistant embarqué capable de traduire en temps réel, d’organiser vos photos ou de réécrire vos messages.

Apple Intelligence Siri
©Apple

Dans ce paysage en pleine explosion, la stratégie d’Apple détonne. Pas d’IA omnisciente, pas d’agent conversationnel proactif, pas d’interface repensée autour du langage naturel. Juste une série de micro-usages bien ciblés, souvent utiles mais jamais spectaculaires. Pas de quoi nourrir une keynote d’anthologie — ni calmer l’impatience des développeurs comme des utilisateurs.

On peut s’étonner, mais ce choix s’inscrit dans l’ADN d’Apple : ne pas lancer une technologie tant qu’elle n’est pas maîtrisée de bout en bout. La marque a souvent été jugée en retard — sur les écrans larges, les smartphones pliables ou les assistants vocaux — mais lorsqu’elle entre dans la danse, c’est en misant sur l’expérience utilisateur, la fluidité et l’intégration. Ses ordinateurs, par exemple, ne sont pas toujours les plus puissants sur le papier, mais ils brillent par leur autonomie, leur fiabilité et leur longévité. Son approche de l’IA semble suivre cette même logique.

Une stratégie du pas de côté pour Apple

Plutôt que de chercher à épater la galerie avec une IA omniprésente, mais pas toujours efficace, Apple trace sa voie. L’ambition ? Une intelligence artificielle discrète, utile, et surtout alignée avec ses principes historiques : la confidentialité, le contrôle local, l’intégration native. C’est d’ailleurs ce que Tim Cook martelait déjà en 2018 : « L’IA doit être personnelle, contextuelle et respectueuse de vos données. »

1 142€
1 229€
En stock
Acheter sur Fnac.com

Le choix attentiste de la firme à la pomme est peut-être clivant, mais s’inscrit dans l’histoire de la société. Apple Intelligence ne remplace pas Siri, ne prend pas le contrôle de votre écran, ne génère pas de vidéos spectaculaires. Elle intervient là où elle peut vraiment simplifier la vie : résumer un article dans Safari, proposer une réponse plus claire à un mail, retrouver une photo grâce à une requête en langage naturel. Pas de magie, mais des frictions en moins — si tout fonctionne bien. Mais cela ne veut pas dire que les choses n’évoluent pas.

« Nous franchissons une étape importante en offrant aux développeurs un accès direct au modèle de base sur appareil qui alimente Apple Intelligence, leur permettant ainsi d’exploiter une intelligence puissante, rapide, respectueuse de la vie privée et disponible même hors ligne. Nous pensons que cela donnera naissance à une toute nouvelle vague d’expériences intelligentes dans les applications que les utilisateurs utilisent au quotidien. Nous avons hâte de voir ce que les développeurs créeront », a déclaré Craig Federighi, vice-président senior de l’ingénierie logicielle d’Apple, lors de la keynote introductive à la WWDC la semaine dernière.

Une prudence stratégique ou un manque de maturité ?

Apple Intelligence ne remplace pas Siri, ne prend pas le contrôle de votre écran, ne génère pas de vidéos spectaculaires. Elle intervient là où elle peut vraiment simplifier la vie : résumer un article dans Safari, proposer une réponse plus claire à un mail, retrouver une photo grâce à une requête en langage naturel. Pas de magie, mais des frictions en moins — si tout fonctionne bien.

Pour certains analystes, cette prudence est avant tout le signe d’un retard technique. Apple ne disposerait tout simplement pas, en interne, d’un modèle d’IA générative aussi avancé que Gemini ou GPT-4o. D’où ce partenariat avec OpenAI — présenté comme une option — et cette logique d’intégration progressive. D’autres évoquent des tensions internes entre les équipes historiques de Siri et les nouveaux pôles IA créés depuis 2023.

Et si Apple misait sur une IA invisible (mais durable) ?

Mais d’un point de vue stratégique, Apple joue peut-être une autre carte. En refusant de transformer l’iPhone en chatbot, la marque reste fidèle à sa ligne : proposer une technologie qui reste au service de l’utilisateur — pas l’inverse. Un pari risqué à court terme, tant l’imaginaire de l’IA générative est encore porté par le spectaculaire. Mais peut-être gagnant à long terme, si les promesses trop tape-à-l’œil de la concurrence finissent par lasser.

Derrière son apparente frilosité, Apple semble défendre une autre vision de l’IA. Une intelligence artificielle non pas centrale, mais contextuelle. Non pas omnisciente, mais précise. Elle ne cherche pas à remplacer l’humain ni à se faire passer pour lui. Elle s’insère doucement dans l’écosystème Apple, à la manière de fonctionnalités utiles qu’on finit par utiliser tous les jours sans même s’en rendre compte.

À partir de
409,99€
En stock
Acheter sur Fnac.com

Les nouveautés Apple Intelligence annoncées à la WWDC 2025

Au-delà de ces réflexions sur la stratégie globale d’Apple en matière d’intelligence artificielle, le géant de Cupertino a tout de même présenté une série d’évolutions pour son système Apple Intelligence, désormais étendu à l’iPhone, l’iPad, le Mac, l’Apple Watch et le Vision Pro. Voici l’essentiel à retenir :

Traduction en direct dans Messages, FaceTime et Téléphone
Les conversations sont traduites en temps réel, à l’écrit ou à l’oral, directement sur l’appareil.

Image Playground et Genmoji
Création d’images personnalisées et de nouveaux emoji à partir de descriptions ou de photos, avec plus de contrôle créatif.

Intelligence visuelle étendue
Interaction directe avec le contenu à l’écran (textes, objets, événements) pour faire des recherches ou créer des rappels en un geste.

Workout Buddy sur Apple Watch
Suggestions d’entraînement personnalisées et messages audio générés en temps réel, avec respect total de la vie privée.

Ouverture aux développeurs
Accès au modèle embarqué via le framework Foundation Models, pour créer des applis IA utilisables même hors ligne.

Raccourcis boostés à l’IA
Automatisations plus puissantes, avec intégration d’Apple Intelligence et possibilité de faire appel à ChatGPT si besoin.

Toutes ces fonctionnalités seront disponibles à l’automne sur les appareils compatibles, puis dans plusieurs langues supplémentaires d’ici fin 2025.

À lire aussi

Pour aller plus loin