Décryptage

Mario & Luigi – L’Épopée fraternelle : pourquoi Mario ne serait rien sans Luigi

05 novembre 2024
Par Antistar
”Super Mario Bros. le film” est sorti le 5 avril 2023 au cinéma.
”Super Mario Bros. le film” est sorti le 5 avril 2023 au cinéma. ©Nintendo/Illumination

Luigi est le plus célèbre des faire-valoir du jeu vidéo et, en 40 ans de carrière, il n’a cessé d’exister dans l’ombre de Mario, tout en s’offrant ses moments de gloire avec Luigi’s Mansion. Le nouvel épisode de la série Mario & Luigi est donc l’occasion parfaite pour démontrer pourquoi l’homme en vert de Nintendo est si important dans le succès de son aîné.

Si vous connaissez Super Mario et que vous avez connaissance de l’existence de son frère Luigi, il y a fort à parier que vous sous-estimiez grandement son importance. Et pour cause : Nintendo aime le reléguer au second plan depuis des décennies, lui faisant jouer un rôle de second couteau assumé et parfois tourné en dérision, à tel point que de nombreux fans prennent fait et cause pour cette version « alternative » du plus célèbre des plombiers moustachus.

Plus grand, plus mince, mais aussi plus maladroit et surtout peureux, Luigi n’en demeure pas moins une pièce maîtresse dans l’échiquier du constructeur japonais. Si c’est bien Mario qui récolte quasiment tous les lauriers et joue le rôle d’icône, son petit frère n’y est pas étranger. Mieux encore : sans lui, le héros à casquette rouge ne bénéficierait sans doute pas de l’aura qui est la sienne dans l’univers de la pop culture dont il est l’une des plus grandes mascottes. La sortie de Mario & Luigi – L’Épopée fraternelle était donc l’occasion de réparer cette injustice et de rendre hommage à celui sans qui Mario ne serait (presque) rien.

Derrière chaque grand homme, il y a un petit frère

En 1981, alors que Mario n’est pas encore la star de Nintendo, c’est à Donkey Kong que revient le rôle de vedette de la firme japonaise. Grand succès de l’âge d’or de l’arcade, la licence mettant en scène le primate joue davantage sur son charisme de grand méchant que sur la personnalité de l’avatar incarné par le joueur.

Initialement appelé « Jumpman » (littéralement « l’homme qui saute »), le plombier rouge n’est alors qu’un personnage anecdotique, à qui Nintendo fait même endosser le costume du vilain dans Donkey Kong Jr. en 1982, jeu qui le voit assez paradoxalement se faire enfin un nom (ou plutôt un prénom).

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Mario est alors le méchant à son tour, rôle qu’il ne jouera d’ailleurs plus jamais, et c’est en 1983 qu’il aura droit à son propre jeu. Ce dernier s’intitule Mario Bros., et laisse donc supposer qu’il a un frère (bros. étant l’abréviation américaine de brothers, frères).

Celui-ci n’est autre que Luigi, un protagoniste qui trouve ses origines dans un bête « palette swap », technique aussi paresseuse qu’efficace consistant à réutiliser un élément déjà exploité, mais avec d’autres couleurs, et à laquelle Nintendo a régulièrement eu recours dans les années 1980.

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Deux ans avant Super Mario Bros. et ses célèbres buissons qui ne sont rien d’autre que les nuages du même jeu colorés en vert, le constructeur la jouait déjà à l’économie, rusée, mais efficace, en offrant à son héros un frère sous forme de clone, mais dont la tenue serait à dominante verte au lieu du rouge de Mario. Luigi est né, et le titre du jeu ainsi que le visuel principal de sa boîte en disent long sur l’importance égale des deux frères. Il est certes arrivé après Mario, mais ce ne doit pas être qu’un simple « joueur 2 ».

En vert et avec tous

Dès Super Mario Bros., en 1985, son statut évolue… mais pas forcément dans le bon sens. Malgré le titre de l’œuvre, qui laisse supposer que l’on partira à l’aventure en compagnie des frères Mario, c’est bel et bien l’aîné à casquette rouge qui hérite du premier rôle.

Luigi n’est jouable que par un second joueur et seulement lorsque Mario perd une vie. Cette étiquette de « player 2 » lui collera à la peau dans presque tous les épisodes de la série, avant d’évoluer à nouveau – et cette fois, dans le bon sens.

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En effet, il est jouable alternativement avec Mario (mais toujours sur la seconde manette) dès que ce dernier termine un niveau dans Super Mario Bros. 3 et Super Mario World. Et surtout, il bénéficie enfin de ses propres capacités et cesse de n’être qu’un clone vert de Mario dans les deux versions de Super Mario Bros. 2.

Ce jeu est différent pour les Japonais et les Occidentaux, mais le rôle de Luigi est bien plus intéressant dans cet opus très difficile, puisqu’il peut y être incarné à volonté par le joueur. Mieux encore : il en est clairement le plus intéressant à jouer des deux. Bien qu’un peu plus « glissant » en termes de maniabilité, il saute plus haut et plus loin que Mario, ce qui est bien pratique dans un jeu aussi délicat, et, surtout, deviendra sa marque de fabrique en termes de gameplay.

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Il bénéficiera en effet des mêmes attributs dans le Super Mario Bros. 2 occidental paru en 1988, où il est là aussi jouable n’importe quand, puisque le joueur est amené à choisir le personnage qu’il souhaite incarner avant chaque niveau. Il faudra cependant attendre 1993 pour le voir endosser la casquette du héros dans le jeu éducatif Mario is Missing! où, comme son titre l’indique, il doit venir en secours à son frère retenu prisonnier par Bowser dans un château basé en Antarctique.

Le héros d’autres genres

Présent parmi les huit personnages jouables de Super Mario Kart (1992) avec une conduite identique à celle de Mario dont il est une fois de plus un clone, Luigi est cependant le grand absent de Super Mario 64, la révolution absolue du jeu vidéo opérée par Nintendo en 1996.

D’innombrables théories de fans laissent supposer qu’il en fait plus ou moins partie, a minima quelque part dans son code source, mais à partir de là, il n’existe plus que dans les jeux Mario de sport et autres dérivés multijoueurs.

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Heureusement, la Game Cube lui offre en 2001 l’opportunité d’une vie : celle d’incarner le héros d’un vrai jeu vidéo ambitieux aux allures de claque technique, Luigi’s Mansion, un jeu d’horreur plein d’humour jouant sur sa personnalité de poltron malchanceux.

Avec ce titre adoré par les joueurs, Luigi se forge enfin une personnalité, que le studio AlphaDream va façonner et même polir dans le premier épisode de la franchise Mario & Luigi – Superstar Saga, sur Game Boy Advance en 2003. Protagoniste devenu obligatoire dans tout jeu Mario qui se respecte, il reste un faire-valoir ou un personnage jouable alternatif dans les épisodes de plateforme Super Mario.

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Toutefois, la manière assez touchante dont Nintendo l’utilise dans un Super Mario Galaxy (2007) montre bien qu’il compte aux yeux de Mario et qu’il constitue un rouage absolument essentiel sans lequel la mécanique ne tournerait pas aussi bien. L’évolution de la saga Mario & Luigi, riche de quatre autres épisodes, ainsi que de Luigi’s Mansion (deux suites en 2013 et 2019, très bien vendues par Nintendo), n’a fait que renforcer son importance.

Band of Brothers

En effet, Nintendo a préféré donner à Luigi un rôle différent en faisant de lui la star de jeux d’un autre genre, mais il a bien compris à quel point ce grand dadais vêtu de vert plaisait aux joueurs, mieux, combien ils y étaient attachés. Ainsi, il convient davantage d’en faire un prisonnier (soit temporaire, soit tout au long de l’aventure) qu’une alternative devenue assez inutile à Mario en termes de gameplay.

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Cela n’a finalement rien de nouveau et, si l’on veut accorder de l’importance au lore de la franchise, on constate que Mario et Luigi étaient séparés dès leur naissance lors de l’attaque de la cigogne les transportant vers leurs parents.

Le mythique Yoshi’s Island nous contait en 1995 cette fable mélancolique à l’issue aussi heureuse que touchante et donnait le ton d’une nouvelle proposition scénaristique où Luigi, même nouveau-né, devenait alors la victime que Mario devait libérer.

©Nintendo, Universal

De plus, à l’heure où sauver la princesse Peach relève du synopsis trop facile et surtout totalement démodé, Luigi endosse ce rôle avec plus d’efficacité et même d’humour, ce que l’adaptation de Super Mario Bros. au cinéma est parvenue à transcender en 2023.

Luigi est terriblement précieux aux yeux de son frère, comme le traduisent de nombreuses scènes particulièrement émouvantes qui renforcent le sens du titre si légendaire de la franchise. Après tout, dès 1983, et encore plus en 1985, ce n’était pas juste « le jeu de Mario », mais bel et bien « le jeu des frères Mario ».

40 ans de carrière

Quatre décennies plus tard, ces deux-là sont plus inséparables que jamais et le succès de l’un n’ira pas sans la présence essentielle de l’autre. En 40 ans de carrière, Luigi n’a quasiment jamais goûté aux joies du premier rôle lorsque Mario était également jouable, sauf peut-être lors d’un épisode trop retors de Super Mario Bros. réservé aux joueurs japonais. Cependant, l’importance constante de sa présence dans chaque jeu ou presque, couplée à sa personnalité si attachante, en fait un personnage absolument essentiel dans le succès sans égal de son frangin.

Sans son côté un peu gauche et benêt, il manquerait quelque chose aux aventures de Mario, à tel point que son absence est systématiquement remarquée, pour ne pas dire regrettée, y compris au sein des plus grands chefs-d’œuvre de l’histoire du jeu vidéo comme Super Mario 64.

En outre, il a réussi à atteindre une notoriété méritée avec sa propre licence, et fait on ne peut mieux la paire avec son aîné dans une excellente série de RPG les mettant tous deux en scène à égalité depuis maintenant 20 ans. Sans Luigi, Mario n’en serait pas où il est, tout simplement.

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Mario & Luigi – L’Épopée fraternelle sera disponible en exclusivité sur Nintendo Switch le 7 novembre prochain.

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