C’est un fait, incroyable mais vrai : plus de la moitié de la population française joue aux jeux vidéo ! Conspuée et souvent mal vue, l’industrie vidéoludique a su séduire tous types de profils… sans avoir besoin de cheat codes.
37 millions ! Ce n’est pas la somme que l’on peut gagner en remportant le Championnat de France de Mario Kart ou en revendant sa Nintendo DS, mais bien le nombre de consommateurs de jeux vidéo en France (chiffre SELL, Syndicat des éditeurs des logiciels de loisirs).
Comprendre le succès du jeu vidéo en France est avant tout une histoire de chiffres. Pour la première fois depuis 2019, le jeu vidéo a connu un ralentissement de croissance en 2022. 2021 avait été une année record pour le marché français du jeu vidéo avec 5,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Dans un contexte d’inflation sur fond de guerre en Ukraine, une inquiétude sur la chute des ventes était logiquement à craindre… Mais l’industrie et l’engouement des Françaises et des Français pour le jeu vidéo n’ont pas flanché, comme le prouvent les 5,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2022. Une légère baisse qui ne remet pas en cause l’intérêt du public pour le jeu vidéo. Il faut simplement y voir un coup de mou logique, et attendu, après les dernières années assez folles, entre le « business » du confinement et la folie de la next-gen, avec la PlayStation 5 en tête.
Des chiffres fous qui ont de quoi donner le tournis !
En attendant d’avoir les premiers chiffres, il y a fort à parier que l’année 2023 sera du même acabit, voire meilleure, grâce notamment à des jeux AAA (prononcer triple A, ces jeux dotés de budgets de développement colossaux sont à l’univers du jeu vidéo ce que les blockbusters sont à celui du cinéma) tels que Zelda: Tears of the Kingdom, Hogwarts Legacy, Call of Duty Modern Warfare III ou Marvel’s Spider-Man 2, Super Mario Bros. Wonder ainsi qu’un accès plus simple aux consoles next-gen.
Alors, comment expliquer cette adoption massive du jeu vidéo par le public français ? Car, oui, les chiffres sont là et incontestables. On peut citer le succès de la plateforme grand public de Nintendo, la Switch qui, en janvier 2023, est devenue la deuxième console la plus vendue de l’histoire en France (plus de 7 millions d’unités vendues). Tout comme sa grande sœur la Wii à l’époque, la console hybride a ce côté « rassembleur » et convivial, qui pousse les parents à jouer aux côtés de leurs enfants.
Comment ne pas citer également la démocratisation du jeu vidéo grâce aux smartphones. Ces derniers sont aujourd’hui la première plateforme de jeux des Français. Dans les transports, chez soi ou lors de la pause déjeuner, quelle plus grande simplicité que de dégainer son smartphone et d’enchaîner partie sur partie ?
Évoquons aussi une offre toujours plus riche et variée (Pokémon, Call of Duty, Need for Speed…), même pour zéro euro. Si le marché reste toujours dominé par le secteur des consoles avec un chiffre d’affaires de plus de 2,568 milliards d’euros, les « écosystèmes » PC Gaming et Mobile n’ont pas à rougir, avec respectivement des chiffres d’affaires de 1,548 milliard d’euros et 1,415 milliard d’euros.
Après la forte hausse de 2020 à +11,3 % et la légère croissance à +1,6 % en 2021, 2022 est une année de stabilisation avec une légère baisse -1,6 %. La bonne santé du marché vidéoludique se retrouve également du côté de l’offre, où la création d’entreprises accélère pour atteindre les 1 200 entités en France, majoritairement concentrées dans le bassin francilien.
Plus seulement spectatrice, la France est aussi une actrice majeure du jeu vidéo
La popularité grandissante du jeu vidéo auprès du public français peut aussi s’expliquer par la bonne presse qu’obtient le secteur auprès de ce même public. Finis les « Arrête les jeux vidéo, ça t’abrutit » ! L’art vidéoludique est enfin reconnu à sa juste valeur.
Selon les récentes études, l’opinion des Françaises et des Français sur le jeu vidéo est plus que positive. D’après des chiffres fournis par le SELL, nous sommes 80 % à reconnaître le jeu vidéo comme un secteur innovant, 77 % à considérer que les jeux vidéo sont créés par des artistes et 59 % à penser que le jeu vidéo permet le développement de compétences.
C’est un fait : jeu vidéo rime aujourd’hui avec savoir-faire et spécificité française. En mars dernier, la Game Developers Conference organisée à San Francisco réunissait les acteurs majeurs à l’échelle planétaire du secteur du jeu vidéo. Un événement où la délégation française s’est fait remarquer, avec pas moins de 26 exposants, signe de la très bonne vitalité du secteur. Rien que sur l’année 2022, le jeu vidéo à la française s’est offert une belle publicité.
Le meilleur exemple est assurément Stray, développé par BlueTwelve Studio et édité par Annapurna Interactive et iam8bit. Jeu dans lequel on incarne un chat errant dans une cité cyberpunk uniquement peuplée de robots et d’autres félins, Stray a été unanimement salué comme une réussite pour son gameplay, son ambiance et ses qualités techniques, notamment le réalisme de son animation. Le titre développé par le studio montpelliérain a également été un phénomène sur les réseaux sociaux, une sorte de passage obligatoire qui n’était autrefois réservé qu’aux AAA américains ou japonais.
Et comme si le succès du chat errant n’était pas suffisant, la production française a véritablement brillé en 2022 avec Sifu (un jeu de kung-fu exigeant et développé à Paris par Sloclap), ou encore A Plague Tale: Requiem, du studio Asobo situé à Bordeaux.
Un secteur en constante mutation pour s’adapter à son public
Maintenant que le jeu vidéo est solidement installé et que son succès est plus que confirmé, une question se pose : quel avenir pour le secteur en France ?
Systématiquement prêt à s’adapter aux nouvelles tendances et à mettre en avant les nouvelles technologies, le jeu vidéo a encore de belles années devant lui, tant les problématiques ne manquent pas. Si la PS3 avait apporté la HD et la PS4 la 4K, la PS5 a fait encore plus fort avec le ray tracing, offrant des effets d’éclairage plus réalistes que jamais. La technologie progresse et permet ainsi de faire naître des jeux avec une expérience de plus en plus immersive.
Le futur du jeu vidéo promet donc encore des parties mémorables à ses partisans et partisanes. Sujet phare du moment, l’intelligence artificielle aura bien entendu son mot à dire, avec pour objectif de construire des jeux avec des scénarios et des gameplays hyper-réalistes. Imaginez un jeu capable d’en apprendre assez sur le joueur pour ajuster le gameplay en l’orientant soit vers l’action, soit un aspect plus stratégique…
En plus du cloud gaming ou de la réalité augmentée, impossible de ne pas évoquer l’e-sport, devenu source de véritables événements populaires en France. À l’instar des États-Unis ou du Japon, des salles habituellement réservées aux concerts accueillent désormais des rencontres et des tournois d’e-sport, comme la récente organisation des LEC Season Finals sur League of Legends à la Sud de France Arena de Montpellier. De son salon à la télévision, en passant par les salles de concert et autres stades, le jeu vidéo a fait son trou en France et celui-ci n’a pas fini de susciter toujours plus de curiosité et d’adhésion.
