Trois ans après son dernier album, le groupe britannique Gorillaz est de retour avec une nouvelle création baptisée Cracker Island. Un opus aux références multiples et aux collaborations surprenantes. Brillant.
L’été dernier, Gorillaz enflammait le festival We Love Green. Le groupe culte avait donné rendez-vous à ses fans français en plein cœur du Parc de Vincennes. Moins d’un an après le concert événement, la formation britannique est de retour, depuis le vendredi 24 février, avec un nouvel album, Cracker Island. L’occasion de replonger dans l’univers psychédélique du groupe formé en 1998 par le graphiste Jamie Hewlett et le compositeur de Blur, Damon Albarn.
Ce nouvel opus fait suite à Song Machine Season One – Strange Timez (2020), un album qui annonçait déjà la renaissance du groupe, après les passables The Fall (2011) et Humanz (2017). Avec Cracker Island, Gorillaz parachève une trilogie initiée en 2018 avec The Now Now et nous embarque sur un nouveau terrain de jeu, entre musique électronique, pop, rock et hip-hop. Ces genres ont toujours nourri les créations du quatuor emmené par le personnage virtuel de 2D. Aux côtés de Murdoc Niccals (basse), Russell Hobbs (batterie) et Noodle (guitare), le leader du groupe – incarné sur scène par Damon Albarn – offre un opus toujours aussi proche de l’univers dystopique de Gorillaz. L’album tire le meilleur du groupe, entre influences diverses et featurings inattendus. Une réussite.
Un album du collectif
Titre éponyme tiré du premier morceau de l’album, Cracker Island annonce la couleur à coups de bangers électro et pop. Gorillaz inaugure le nouvel opus en collaborant avec Thundercat. L’artiste américain, connu notamment pour These Walls de Kendrick Lamar apporte une touche funk grâce à un riff de basse implacable. Il en ressort ainsi un morceau dansant, idéal pour lancer cette création inédite, malgré la mélancolie qui se dégage des textes.
C’est d’ailleurs le contraste entre la rythmique électrisante et les paroles désabusées qui a toujours fondé l’univers de Gorillaz. Que ce soit dans le mélange des sonorités avec des thématiques profondes sur l’imaginaire, ou bien à travers les différentes collaborations, Cracker Island catalyse toutes les références d’un des groupes les plus éclectiques de la scène pop contemporaine. À ce propos, Damon Albarn a d’ailleurs défini l’album au micro de la BBC comme « le lieu dans lequel les gens qui ont des idées un peu folles peuvent vivre heureux ensemble ».
Dans cette optique, le groupe a invité sur son île paradisiaque une variété d’artistes. Parmi eux, on retrouve Beck sur le lunaire Possession Island, Stevie Nicks de Fleetwood Mac sur le tube pop Oil, ou encore Bad Bunny. La superstar cosigne Tormenta, un morceau aussi caliente qu’envoûtant. Avec ce titre, les membres de Gorillaz prennent un risque en s’essayant à des sonorités rarement explorées dans leur discographie.
Pourtant, ce passage au latino est largement réussi, tout comme le morceau New Gold que le quatuor partage avec Tame Impala. Les deux groupes étaient faits pour travailler ensemble tant leurs univers psychédéliques se marient bien. Les couplets hip-hop de Bootie Brown associés aux thèmes électroniques du synthétiseur apportent à la tracklist une fraîcheur et une puissance de composition.
Le synthétiseur et le piano ont une grande importance dans cet album, en témoigne le morceau Silent Running en duo avec Adeleye Omotayo, dont les vocalises profondes nous emportent dans un univers blues inspirant. Quatrième morceau du disque, le titre reflète l’importance du collectif dans Cracker Island, Gorillaz dépassant les featurings classiques pour réunir une véritable troupe d’artistes.
Vient ensuite Baby Queen. Dévoilé il y a quelques semaines, ce morceau regroupe tout ce qui a fait le succès de Gorillaz à ses débuts. Les sonorités électro, bercées par les tonalités du piano, et la voix rêveuse de 2D offrent un titre entêtant qui rappelle les tubes les plus cultes du groupe comme Feel Good Inc ou On Melancholy Hill, respectivement extraits des albums Demon Days (2005) et Plastic Beach (2010).
Dixième et dernier morceau de l’album, Skinny Ape offre un final explosif. Le diptyque entre guitare acoustique et électro laisse place à des tonalités teintées de rock, tout droit venues des années 1980. Un mélange étonnant qui représente parfaitement la richesse de Cracker Island.
Avec ce nouvel album, Gorillaz se place au carrefour des influences. Grâce à des collaborations inattendues, des inspirations tirées d’une variété des genres et une virtuosité à les assembler, le quatuor signe une création pop addictive et collective sur laquelle 2D laisse éclater le naturel de sa voix. Du grand Gorillaz.
Cracker Island de Gorillaz, disponible depuis le 24 février 2023.