Les raisons de cette annulation restent floues, mais l’existence même du projet relance l’évidente implication politique des comics.
Lors d’une interview avec le site CBR, le scénariste Ho Che Anderson a décrit les contours pour le moins ambitieux d’une mini-série autour de Luke Cage, écrite avec l’accord de principe de Marvel sur un sujet brûlant de l’actualité, au retentissement mondial. En effet, dans celle-ci, l’auteur voulait revenir sur le meurtre de George Floyd par l’officier de police Derek Chauvin en 2020.
Et plutôt que d’adopter une vision binaire, il y voyait l’occasion de nuancer les circonstances, ne pas faire des forces de l’ordre des brutes sanguinaires, ni des victimes des engeances vengeresses systématiques. Dans le comics, c’est d’ailleurs la mère de George Floyd qui devait engager le privé, sans doute pour avoir l’assurance que le procès de l’assassin de son fils ait bien lieu.
Annuler plutôt qu’assumer
Seulement voilà, comme l’explique de façon très honnête le scénariste, déjà auteur dans le passé d’une biographie sous forme d’une BD de Martin Luther King, cela n’a pas été possible. L’auteur, aux idées engagées, était pourtant bien décidé à traiter des sujets d’actualité, ou politiques, jugeant que les comics avaient un rôle à jouer dans ce domaine.
L’ironie démontre d’ailleurs que la fin du comité Comics Code Authority, qui a longtemps castré les envies des auteurs de BD américaines, a finalement été remplacé par une forme « d’anticipation », alors que les exemples néanmoins contraires abondent.
Après des débuts encourageants autour du projet, quoique son auteur sache que le sujet brûlant pouvait à tout moment donner lieu à des problèmes, l’éditeur a finalement décidé de l’annuler purement et simplement, via une simple visioconférence Zoom avec Anderson.
Extrême droite ou extrême marketing ?
Selon le scénariste, les raisons avancées par son éditeur étaient liées aux risques encourus par l’auteur face à l’extrême droite et ses nombreuses dérives, menaces de mort en tête. Mais Anderson n’était pas prêt à lâcher son œuvre pour autant… sans que Marvel ne revienne sur sa décision. Ce qui lui a fait penser que toute autre trame qu’un méchant face à un héros serait rejetée.
Après une brève remise en question, il a finalement continué à collaborer avec Marvel, tout en restant sur des sujets plus neutres. Et de regretter que seuls les auteurs les plus « bankables » puissent s’aventurer en zone à risque, l’aspect financier étant assuré… La censure des comics a donc un nouveau visage : le profit.
