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Ils ont converti leurs parents aux mangas

27 novembre 2022
Par Laurent Frey
L'anime culte “Nicky Larson”, adapté de “City Hunter”.
L'anime culte “Nicky Larson”, adapté de “City Hunter”. ©Aniplex

Quel adolescent n’a jamais entendu des adultes dénigrer les mangas ? Les parents estiment qu’ils sont plus pauvres, plus bêtes ou plus violents que la BD, mais certains font l’effort de s’y intéresser. Et on les a rencontrés.

« Quand j’ai compris que les BD que lisait mon fils étaient les mêmes que les dessins animés que je regardais dans le Club Dorothée, je m’y suis intéressé d’un peu plus près », nous avoue Éric, père de famille devenu lecteur de mangas sur le tard. Cette révélation, il l’a eue lorsqu’il a regardé par-dessus l’épaule de son fils de 16 ans, qui lisait un tome de City Hunter. Le titre ne lui disait rien. Pourtant, il était persuadé de reconnaître un personnage familier dans les pages du manga. Après une brève recherche sur Google, il s’est aperçu que City Hunter n’était autre que le héros de son adolescence, Nicky Larson.

Des témoignages comme ceux-là, on en compte par dizaines. Les parents ont du mal à laisser leurs enfants lire des mangas, qui, malgré sa popularité grandissante, est encore victime de sa réputation de la fin des années 1990 et du début des années 2000. Ces œuvres seraient bêtes, visuellement laides, elles prôneraient la violence et la perversité, et seraient à des années-lumière en dessous de notre bonne vieille BD franco-belge. Pourtant, aujourd’hui, plus d’une bande dessinée achetée sur deux est un manga, et les enfants ne sont plus le seul public de la BD japonaise.

“Le noir et blanc, le sens de lecture… En fait, il fallait juste s’adapter”

Convertir ses parents au manga, voilà une mission périlleuse. Quel lecteur adolescent ne s’est jamais pris une réflexion de la part de ses parents, méprisant le manga et tout ce qu’il représente ? Et quel lecteur n’a jamais voulu répondre : « Lis-en au moins un, et tu comprendras » ? Le premier pas vers la compréhension, c’est évidemment la connaissance.

Aujourd’hui, plus d’une bande dessinée achetée sur deux est un manga.©Kana

« Pour que mes parents comprennent mieux le manga, je leur ai fait lire Bakuman« , nous explique Théo, 14 ans. Un très bon choix, qui est effectivement une belle porte d’entrée. Écrit par les auteurs de Death Note, ce manga raconte l’histoire de deux apprentis mangakas dont le rêve est d’être publié dans le célèbre Weekly Shonen Jump et de voir leur œuvre adaptée en anime. En plus de révéler les rouages de la publication de manga au Japon à un degré quasi documentaire, Bakuman insuffle aussi à son histoire tous les codes du shonen nekketsu (à l’image de One Piece, Naruto, Dragon Ball…). Le manga réussit donc, autant sur le fond que sur la forme, à être le parfait exemple de ce qu’est le genre du shonen, ultrapopulaire aujourd’hui.

Bakuman est la meilleure porte d’entrée pour mieux comprendre le marché du manga au Japon.©Kana

« Au début, c’était difficile, ajoute Théo. Habitués au roman et à la BD française, ils ont eu du mal à se faire à cette forme particulière, le petit format, le noir et blanc, le sens de lecture inversé… Mais ce ne sont que des détails. En fait, il fallait juste s’adapter. Finalement, c’est l’histoire qui compte. On en trouve des centaines dans le manga, et dans tous les genres. »

Le manga est une forme plus qu’un genre en soi

Ce qui revient le plus souvent chez les lecteurs de mangas, qu’ils soient enfants ou adultes, c’est évidemment la migration vers des œuvres plus matures au fil des années. « Quand ma mère m’a demandé ce que j’aimais dans les mangas, je lui ai répondu que ce n’était pas le manga en lui-même qui m’intéressait, mais la qualité des œuvres qu’on y trouve, nous confie Lucie, une autre jeune lectrice. Je lui ai montré les œuvres de Naoki Urasawa, de Junji Ito et de plusieurs autres auteurs aux œuvres beaucoup plus matures. »

Finalement, le meilleur moyen de convaincre ses parents de se lancer dans les mangas, c’est de leur faire lire des œuvres adaptées à leur âge ou à leurs goûts. Le manga ne se résume pas qu’au shonen nekketsu. Ils aiment les thrillers ? Qu’ils se lancent dans Monster, de Naoki Urasawa. Ils aiment se faire peur ? Ils adoreront Spirale de Junji Ito, qui a traumatisé des générations de lecteurs et a largement inspiré le cinéma d’horreur, même américain. S’ils sont attirés par l’histoire, de nombreuses séries les plongeront dans des événements du passé, que ce soit Reine d’Égypte, Kingdom ou Bride Stories.

Monster, le thriller passionnant de Naoki Urasawa.©Kana

Il faut garder en tête que le manga n’est que le nom japonais de la bande dessinée et que, si vous n’aimez pas ce genre, il n’y a aucune raison pour que vous aimiez les comics ou la BD franco-belge, car on y trouve la même diversité. Seule la forme est différente.

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