Concept de plus en plus incontournable, il est à la base du metaverse et de bon nombre de nouveautés dans le monde du jeu vidéo. La réalité virtuelle mérite un décryptage.
Jouer aux fléchettes avec un ami qui n’habite pas la même ville ni le même pays. Visiter la station spatiale internationale comme si vous étiez Thomas Pesquet. Faire de la boxe contre un personnage en 3D qui n’existe pas. Se balader dans des mondes parallèles… Autant de situations rendues possibles grâce à la réalité virtuelle (à ne pas confondre avec la réalité augmentée ou la réalité mixte). Ce terme désigne la technologie qui permet de simuler numériquement la présence physique d’une personne dans un environnement artificiel.
Une histoire qui remonte aux années 1950
La première expérience de réalité virtuelle a été présentée en 1955. Imaginée par le cinéaste américain Morton Heiling, Sensorama – c’est son nom – consiste alors à installer une personne dans une sorte de bulle, assez similaire à une grosse borne d’arcade enveloppante, qui fait appel aux différents sens : siège qui bouge pour simuler des mouvements, écran stéréoscopique avec un large angle de vue et des haut-parleurs stéréo pour le côté immersif, soufflerie pour recréer l’effet du vent sur la peau, diffuseur de parfum pour stimuler l’odorat… Tout est pensé pour transporter le cobaye très loin de là où il est, dans un monde « virtuel ». Trop cher à construire, Sensorama ne dépasse pas l’étape du prototype fonctionnel présenté en 1962.
Le premier casque de réalité virtuelle a, lui, été imaginé en 1965, toujours aux États-Unis. Le scientifique Ivan Sutherland, de l’université de l’Utah, a décrit les principes de l’Ultimate Display cette année-là, avant de lui donner vie en 1968. Des images générées par ordinateur sont montrées aux yeux du cobaye par l’entremise de deux tubes cathodiques. Ces images s’affichent en superposition de la réalité. On peut donc parler de casque de réalité augmentée (des images 3D en surimpression du monde « physique »). Ce prototype révolutionnaire était si lourd qu’un bras accroché au plafond aidait à le porter. Ce dispositif lui a valu le surnom d’épée de Damoclès.
La réalité virtuelle, comment ça marche ?
En utilisant un casque de réalité virtuelle ou une application, la personne se retrouve immergée dans un environnement numérique totalement imaginaire. Cette expérience est pensée pour être extrêmement immersive et pour permettre à l’utilisateur d’interagir et d’explorer ce monde virtuel, qui peut être soit une reproduction très réaliste, soit un univers totalement fantasmé. La personne plongée dans cet environnement a le contrôle de ses faits et gestes. Elle peut se déplacer à loisir et regarder là où bon lui semble. À l’aide d’éventuelles manettes, elle peut aussi interagir avec ce monde, en se saisissant d’objets par exemple. Enfin, il est possible d’en sortir à tout moment.
Sur le plan technique, la réalité virtuelle naît d’images simulées par ordinateur, qui permettent de créer un environnement 3D entier. Ce monde peut être partagé avec d’autres personnes grâce à une connexion Internet, mais aussi être peuplé de personnages totalement virtuels animés eux aussi par ordinateur. La personne qui a enfilé le casque existe dans cet univers par l’entremise d’un avatar, dont l’apparence est modifiable à loisir (couleur de peau, de cheveux, morphologie, vêtements portés, âge, sexe, etc.). Une personne peut se recréer de manière réaliste ou, au contraire, s’imaginer en quelqu’un d’autre, voire se muer en dragon ou en elfe.
Le casque de réalité virtuelle, l’accessoire qui change tout
Un monde virtuel interactif vu sur un écran de smartphone, d’ordinateur ou de télévision ne sera jamais aussi immersif que s’il est vu par l’entremise d’un casque, qui nous plonge totalement dans un univers virtuel, tant par la vue que l’ouïe. Il affiche sur deux écrans, un pour chaque œil, des images en 3D. L’écran est réglé pour remplir toute notre vision périphérique afin de s’assurer que la personne soit bien « plongée » dans une réalité virtuelle.
Cette technologie, longtemps balbutiante, a décollé à partir de 2012, date de sortie de l’Oculus Rift. Il fit sensation pour la première fois à l’E3, le grand salon des jeux vidéo qui se tient chaque année à Los Angeles. Mais ce n’est qu’en mars 2016, après le rachat de la société par Facebook, que le casque verra réellement le jour. Devenu Meta depuis, le groupe de Mark Zuckerberg domine encore aujourd’hui le marché, même si la concurrence existe (DPVR, Sony, HTC, Pico, Valve…). Et le tout dernier casque présenté le 11 septembre 2022, le Meta Quest Pro devrait conforter encore un peu plus sa première place sur le podium.
Immersion et interaction, les deux piliers de la réalité virtuelle
Le but de tout système de réalité virtuelle est d’immerger complètement l’utilisateur dans un environnement simulé. Trois éléments permettent d’obtenir l’effet souhaité. D’abord, un casque totalement enveloppant pour ne plus voir la réalité, ne serait-ce que sur le côté de l’œil. D’autre part, un son diffusé au plus près de l’oreille voire par des écouteurs qui coupent du monde extérieur et diffusent un son surround. Enfin, la maîtrise du monde imaginaire en contrôlant la scène et ce que l’on voit par de simples mouvements de la tête. Cela peut être renforcé par des manettes pour disposer d’une capacité de préhension virtuelle.
L’interaction, justement, parlons-en ! C’est le second pilier de la réalité virtuelle. Avoir cette possibilité de jouer avec son environnement en ramassant un objet, attrapant un ballon, appuyant sur un bouton ou jouant d’un instrument de musique renforce le réalisme de l’expérience. Les interactions rendues possibles avec d’autres avatars ajoutent encore de la valeur de ces simulations 3D.
Et demain, place à la réalité mixte ?
Cette technologie est présentée comme l’étape suivante, celle qui remplacera réalité virtuelle et réalité augmentée. Ici, le but n’est pas d’isoler totalement l’utilisateur, du moins, pas tout le temps. Le principe est plutôt de superposer des images virtuelles sur un environnement bien réel. Contrairement à la réalité augmentée classique, cette surimpression se fait de manière très fine, au point qu’il devient difficile de différencier le vrai du virtuel. Par exemple, un meuble en 3D peut être intégré dans une pièce avec une telle précision (reflets de la lumière, ombres parfaitement placées, etc.) qu’il devient impossible ou presque de deviner qu’il n’est pas réellement là.
Le nouveau casque de Meta, le Quest Pro, promet justement de s’appuyer sur la réalité mixte. Il sera toujours possible de s’immerger totalement dans un metaverse ou un jeu vidéo à l’aide de bloqueurs de lumière périphériques amovibles, mais le casque pourra aussi jongler entre virtuel et réel. Meta imagine dans un premier temps un usage professionnel de cette nouvelle technologie très poussée, qui demande une importante puissance de calculs. Ce n’est pas sans raison que le Quest Pro est vendu près de 1 800 euros.
Manipuler virtuellement une machine en cours de création avec un collègue qui travaille à l’autre bout du monde, opérer un patient à l’aide de la réalité mixte, participer à une présentation par l’entremise de son avatar en ayant un œil sur son dossier à travers le casque et en pointant un détail d’un graphique à l’aide d’une manette… les possibilités du Quest Pro restent encore à explorer, mais semblent très vastes. En outre, un suivi oculaire et facial doit permettre de répliquer les mimiques du visage sur son personnage virtuel pour un rendu encore plus réaliste. Bref, il va falloir continuer à faire bonne figure en réunion, même en visioconférence.