À Grasse, le peintre Mallet célèbre les femmes et interroge leur place dans la société

19 août 2022
Par Apolline Coëffet
Jean-Baptiste Mallet, "La Pudeur les couvre de son voile", vers 1820, huile sur toile, 32,5 x 40,5 cm.
Jean-Baptiste Mallet, "La Pudeur les couvre de son voile", vers 1820, huile sur toile, 32,5 x 40,5 cm. ©Montpellier, Musée Fabre

Jusqu’au 2 octobre 2022, le Musée Fragonard de Grasse consacre une exposition à Jean-Baptiste Mallet. Tombé dans l’oubli après sa mort, le peintre interrogeait, dans ses œuvres, la place des femmes sous le Directoire et l’Empire.

Peintre seulement connu des initiés pour l’essentiel, jusqu’au 2 octobre prochain, Jean-Baptiste Mallet fait l’objet d’une rétrospective au Musée Fragonard de Grasse. Intitulée La Route du Bonheur, l’exposition revient sur son œuvre au travers de plus de 80 toiles. Parmi ses thèmes de prédilection figurent les femmes, représentant tantôt des allégories telles que la fidélité ou le somnambulisme, tantôt des aristocrates. Malgré quelques sujets prestigieux, de son vivant, l’artiste n’était parvenu à séduire la critique. Sa mort, en 1835, a ainsi achevé de le faire sombrer dans l’oubli, jusqu’à très récemment. Depuis sa création, il y a tout juste une décennie, l’institution des Alpes-Maritimes était décidée à mettre en lumière le travail de cet enfant du pays. 

Replacer les femmes au centre de leur histoire

Formidable chroniqueur de son temps, Jean-Baptiste Mallet écume les salons du Directoire et de l’Empire, au début du XIXe siècle. Dans des scènes d’intérieur d’une grande modernité, il dépeint les femmes qu’il place toujours au centre de compositions étudiées. Préférant montrer les absents de la sphère publique, il relaye alors les hommes au second plan et donne à voir les mœurs et les coutumes de celles qui demeurent dans l’ombre. Dans de sublimes décors pompéiens, athéniens, gothiques ou hollandais, elles apparaissent libres. Une représentation qui peut sembler paradoxale, compte tenu de la conjecture nationale qui est la leur et qui leur est si défavorable.

En 1804, Napoléon Bonaparte promulgue le Code Civil et prive les femmes du peu de libertés qu’elles ont acquis par le passé. À contre-courant, Jean-Baptiste Mallet prend alors le parti de l’audace et décide de leur rendre la part belle. À leur écoute, il traduit en peinture leurs préoccupations et autres tourments contemporains. À cet effet, il transpose ses modèles dans des cadres antiques dans lesquels il devient plus aisé d’aborder des sujets comme l’amour ou la maternité, mais aussi d’esquisser les contours de filles dénudées pour l’époque. Avec une sensibilité certaine, l’artiste – féministe avant l’heure – replaçait ainsi les femmes au centre de leur histoire et de la vie quotidienne, là où certains ont préféré les effacer. 

La Route du Bonheur, de Jean-Baptiste Mallet, au Musée Fragonard de Grasse.

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Article rédigé par
Apolline Coëffet
Apolline Coëffet
Journaliste