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Peter Brook (1925-2022) : le théâtre contemporain perd une de ses figures d’avant-garde

04 juillet 2022
Par Félix Tardieu
Peter Brook dans son théâtre des Bouffes du Nord, en 2013
Peter Brook dans son théâtre des Bouffes du Nord, en 2013 ©Thomas Rome / Flickr

Le metteur en scène britannique Peter Brook, installé en France dans les années 1970, s’est éteint à l’âge de 97 ans. Théoricien de l’ « espace vide » et adepte des tragédies shakespeariennes, Peter Brook avait réhabilité et dirigé le théâtre des Bouffes du Nord, à Paris, pendant plus de 35 ans.

Le théâtre contemporain pleure l’un de ses plus grands représentants : Peter Brook, metteur en scène de théâtre, d’opéra et de cinéma, né à Londres en 1925, s’est éteint à l’âge de 97 ans. Ce passionné de théâtre a signé ses premières mises en scène pour la Royal Shakespeare Company à tout juste 21 ans (Peines d’amour perdues) et a été nommé directeur de production de l’Opéra royal de Covent Garden à 23 ans avant d’en être renvoyé quelques mois plus tard, anticonformisme oblige. Dans les années 1950, Peter Brook adapte des auteurs contemporains tels qu’Arthur Miller, Jean Genet, Jean Anouilh, Truman Capote ou Tennessee Williams, sans pour autant délaisser Shakespeare, et dirige les plus grands comédiens de son temps – Laurence Olivier, Orson Welles, mais également Jeanne Moreau et Jean-Paul Belmondo dans une adaptation cinématographique deModerato Cantabile (Marguerite Duras). 

Peter Brook fait un pas de plus dans le théâtre d’avant-garde dans les années 1960 en délestant la scène de ses décors et en développant son concept d’ « espace vide » : « Je peux prendre n’importe quel espace vide et l’appeler une scène. Quelqu’un traverse cet espace vide pendant que quelqu’un d’autre l’observe, et c’est suffisant pour que l’acte théâtral soit amorcé », explique-t-il dans son essai théorique portant le nom de cette idée radicale et novatrice. Peter Brook mettra notamment en pratique cette philosophie au sein du Centre International de Créations Théâtrales (CICT), qu’il fonde au début des années 1970 avant de l’installer aux Bouffes du Nord, théâtre qu’il sauva de la démolition aux côtés de la productrice Micheline Rozan. 

C’est dans ce théâtre dépouillé que Peter Brook donnera alors naissance à ses mises en scène les plus iconiques, de Timon d’Athènes (Shakespeare) à La Cerisaie (Anton Tchekhov), avec Michel Piccoli, sans oublier Le Mahabharata, sa pièce la plus connue, adaptation fleuve de neuve heures inspirée du poème épique aux fondements de l’hindouisme et montée pour la première fois au Festival d’Avignon en 1985 (et qu’il adaptera pour le cinéma quatre ans plus tard). Il quittera la direction des Bouffes du Nord en 2010, mais ne cessera d’y revenir pour y présenter ses dernières créations – et ce pas plus tard qu’en avril dernier lorsqu’il y présentait Tempest Project, résultat de ses recherches sur l’ultime pièce de William Shakespeare, La Tempête, qui l’a accompagnée tout au long de sa vie. 

Article rédigé par
Félix Tardieu
Félix Tardieu
Journaliste