Nikon avait déjà adressé un clin d’œil appuyé à son glorieux boîtier argentique, avec le Z fc, appareil hybride au format APS-C. Mais cette fois, la filiation est directe, puisque le Z f adopte un capteur 24 x 36, et une ergonomie qui fait la part belle aux molettes, qui ont fait la réputation des reflex d’antan. Avec des performances dignes des récents Nikon Z, grâce à l’adoption du processeur Expeed 7.
En résumé
Après un Z fc abouti visuellement, mais plus en dessous de nos attentes à la prise en main, ce Z f s’impose comme le véritable héritier du FM2. Un boîtier hybride plein format solide, ancré dans l’histoire de Nikon (même le logo reprend la charte graphique des années 70), et dans le même temps, bourré de technologies dernier cri, aussi bien en photo qu’en vidéo, là où le Df, sorte de cousin rétro, version reflex, laissait un goût d’inachevé.
Le fait de le proposer en plusieurs coloris est une bonne idée, même si la marque aurait pu jouer la montre et les dévoiler progressivement avec des accessoires assortis, comme le fait Leica par exemple. Surtout, il faudrait peut-être étendre le choix de focales fixes « SE », dont le design colle à celui du Z f ; pour l’instant, il n’y a que les deux excellentes focales fixes 28 mm f/2,8 SE et 40 mm f/2 SE. Une fois qu’on utilise un zoom « classique », le charme du rétro s’évapore un peu. Reste alors à recourir à une bague FTZ II et solliciter les optiques AIS, pour jouer de la bague de diaph et des molettes…
Les performances sont bien au rendez-vous, et l’ensemble est équilibré. Au départ, l’absence de joystick déroute un peu, pour déplacer les collimateurs AF. Mais le fait de pouvoir le faire sur l’écran (pour la première fois orientable dans toutes les directions sur un hybride Nikon plein format), est une bonne chose. La prise en main est également perfectible, aussi l’offre de lancement, limitée jusqu’au 31 octobre, qui comprend une poignée SmallRig dédiée au Z f offerte, doit vraiment être considérée.
Voici un sérieux outsider dans la meute des boîtiers plein format situés autour des deux milliers d’euros, même si son prix boîtier nu (2499 €) aurait pu être revu à la baisse pour être encore plus compétitif. Une cohabitation avec un futur successeur du Z6 II semble en tout cas tout à fait envisageable, pour les utilisateurs peu sensibles aux charmes du rétro. Tout le creuset technologique est là.
Note technique
Les plus et les moins
- Design rétro réussi et construction robuste
- Très bon rendu en hauts ISO
- Autofocus et stabilisation très performants
- Caractéristiques haut de gamme
- Beaux modes noir et blanc
- LCD orientable dans toutes les directions
- Pas de joystick pour déplacer les collimateurs AF
- Seulement deux optiques rétro dans la gamme Nikkor Z
- Mode Pixel Shift (96 Mpxl) réservé à la post-production
- Grip supplémentaire nécessaire pour bien le prendre en main
Dans le rétro
Le Nikon FM2 connaît une seconde vie, en quelque sorte, ces dernières années, sur le marché de l’occasion. Fort de sa réputation, il fait le bonheur d’une jeune génération de photographes désireux de s’initier à l’argentique. À tel point que sa valeur a sérieusement été revue à la hausse. L’ancienne star du début des années 80 se monnaye autour de 400 €, boîtier nu. Nikon a probablement identifié ce phénomène. La marque a d’ailleurs proposé le Z fc, au format APS-C. Mais avec ce Z f, le clin d’œil au FM2 est total, puisqu’il s’agit d’un hybride 24 x 36.
Ce n’est pas la première fois que Nikon cède aux sirènes de la nostalgie à l’ère numérique. En 2014, le Df était déjà un joli reflex au design vintage, rappelant ses aînés argentiques, tout en intégrant des caractéristiques en phase avec les modèles numériques phares à l’époque, tel le D4. C’est à peu près la même approche pour le Z f, qui malgré un look résolument rétro, intègre des éléments à l’œuvre dans les Z8/Z9, sans compromis (le Df faisait l’impasse sur la vidéo).
Pour l’instant, seules deux focales fixes collent au design vintage du Z f. Il s’agit des 28 mm f/2,8 et 40 mm f/2 SE. Mais bien entendu, il est possible de monter n’importe quelle optique en monture Z, ou bien en monture F, dont les mythiques modèles AIS, grâce à la bague FTZ II. Le fait de mettre l’accès au noir et blanc sur le sélecteur photo/vidéo est une très bonne idée, pour souligner cette dimension vintage.
Design et ergonomie
Les utilisateurs nostalgiques des accès aux réglages à grand renfort de molettes, sans passer par les menus, seront comblés. Le dessus du Nikon Z f réunit l’essentiel, à savoir trois roues, respectivement dédiées à la sensibilité Iso, à la vitesse et à la correction d’exposition. Tandis que la petite fenêtre indique l’ouverture. Deux sélecteurs donnent le choix entre les modes PASM ou Auto, ainsi qu’entre trois univers : photo, vidéo… et noir et blanc (position BW). Bien vu, même si les Picture Control, permettant de choisir entre de nombreux profils couleur, sont toujours disponibles, dont deux nouveaux modes noir et blanc, particulièrement réussis (voir plus loin).
Sur le dessus, le toit, qui abritait un prisme sur le FM2, est reconduit. Pas de flash, et un viseur Oled de 3,68 Mpts avec un grossissement 0,8x en son sein. Lors de notre prise en main, l’affichage était parfaitement clair et confortable, mais un brin contrasté, par rapport aux sensations éprouvées sur les précédents Z 24 x 36. Un point à vérifier sur les modèles de série. À noter, l’affichage tient compte de l’orientation, ce qui facilite grandement la lecture des informations. Au dos, l’écran LCD s’articule dans toutes les directions, ce qui est inédit, sur un Nikon Z plein format. D’aucuns pourraient lui préférer l’articulation astucieuse du LCD implémenté sur le Z8, qui reste dans le même axe que le capteur, tout en pouvant pivoter latéralement ; mais une fois rabattu contre le boîtier, l’écran se fait oublier, et on a alors la sensation visuelle d’avoir un appareil argentique. Sa définition de 2,1 Mpx est confortable, et il sera possible d’utiliser sa surface tactile pour déplacer les collimateurs AF, en l’absence d’un joystick (même si le pad peut aussi servir à cela).
Pour insérer la ou les cartes mémoire (double port SD / microSD), il faut ouvrir la trappe d’accès à l’accu EN-EL15c, qui se recharge via le port USB-C. En façade, il y a une touche paramétrable. Par défaut, la poignée n’est pas très prononcée ; il existe un modèle en option, qui se greffe à la semelle et rend la prise en main plus confortable. Nu, le Z f pèse 710 g (144 x 103 x 49 mm en ce qui concerne les dimensions), et on a la sensation de tenir en main un boîtier robuste (il est conçu en alliage de magnésium), qui rappelle en effet le FM2. Bien plus que le Z fc, à la construction moins flatteuse.
Des caractéristiques haut de gamme
Le niveau de performances du Z f est assez remarquable, notamment par rapport aux Z5 et Z6/Z6 Mark II. L’adoption du puissant processeur Expeed 7 lui octroie des capacités dignes des modèles pros, dont le symbolique suivi autofocus 3D, tant apprécié sur les reflex, et repris sur les Z8/Z9 : diablement efficace pour suivre un sujet en mouvement. La stabilisation sur cinq axes est améliorée, avec un gain de 8 IL revendiqué. Les effets « Maquillage » et « Réglage du rendu des portraits », vus sur le Z8, figurent bel et bien au menu du Z f.
La grande nouveauté sur le Z f, et chez Nikon de manière générale, est l’arrivée d’un mode haute définition ; l’assemblage de 32 clichés résulte dans un fichier de 96 Mpxl (voir plus loin). En vidéo, la 4K 25p est accessible sans recadrage ; en 50p, il faut composer avec un recadrage 1,5x ce qui est la norme sur la majorité des boîtiers de cette gamme. L’enregistrement peut atteindre 125 minutes en interne, en H.265 10 bits, avec le profil N-LOG. Les Z8 et Z9 vont eux conserver un tournage sur toute la largeur du capteur dans ces conditions, grâce à leur capteur de nature empilée : la puce incorporée permet d’accélérer le traitement des données et de réduire de manière significative l’indésirable effet de rolling shutter.
La batterie EN-EL15C offre une autonomie plutôt confortable, dépassant les données annoncées par Nikon (360-380 clichés) : une fois ce nombre de vues atteint , il restait trois barres sur la jauge, sans filmer, au demeurant, mais en consultant régulièrement les photos à l’écran. La possibilité de connecter le boîtier à un chargeur nomade permet de profiter des temps morts pour refaire le plein.
Au passage, on note la possibilité de connecter micro et casque, ainsi que la présence d’une sortie HDMI Type D. Malgré son aspect rétro, le Z f reste « branché ». Au niveau du stockage, il fait même bande à part, puisqu’en plus d’un port dédié au format SD (compatible UHS-II), on en trouve un dévolu aux microSD, plus en vogue dans les smartphones et autres action-cams. Pourquoi pas ?
Performances
Au vu de son design vintage, on pourrait croire que le Z f se cantonne à la street photo, ou du reportage de conflits, si on met de côté l’approche lifestyle, dans laquelle il figurera le plus souvent sur les images. Cependant, au vu des caractéristiques évoquées dans le chapitre précédent, on s’aperçoit que le champ de compétences du Z f en fait un hybride remarquablement polyvalent.
Le mode Rafale à 11 im/s en RAW, en exploitant la totalité de la définition du capteur (24 Mpxl) est largement suffisant pour figer des actions rapides. Et si cela ne suffisait pas, il y a un mode à 30 im/s, en obturation électronique. Mais gare au rolling shutter, bien visible sur des sujets rapides. Il existe même la possibilité d’opter pour un mode « Rafale de prédéclenchement », paramétrable sur trois niveaux : ainsi, des images sont enregistrées, jusqu’à une seconde avant la pression du déclencheur ; ce qui permet de ne pas manquer un moment fatidique comme un envol d’oiseau ou un départ de course.
L’efficacité de l’autofocus est un des gros points forts des appareils Nikon, à l’ère numérique. Le Z f conserve tous ces acquis, et prend clairement le dessus par rapport aux séries Z6 et Z7, en matière de détection et de suivi. La manière dont on parvient à faire le point, en très basse lumière, sur les bords du cadre, est assez épatante. De même qu’en mode AFC (autofocus avec suivi continu), en ayant activé au préalable la détection de sujets sur les personnes, le moindre visage qui apparaît dans le champ est matérialisé par un petit carré vert, dans le viseur ; et ce, même à longue distance, avec un télézoom comme le Nikkor Z 100-400 mm f/4,5-5,6 VR S. Il en est de même sur les véhicules, à deux ou quatre roues. Parmi les différentes fonctions, pas de possibilité d’utiliser le Z f en tant que « piège photo », procédé bien utile dans l’animalier ; cela reste la chasse gardée du Z9, bien que les deux appareils partagent le même processeur.
En vidéo, le suivi est excellent, mais on apprécie surtout l’efficacité de la stabilisation ; avec un zoom non VR comme le trans-standard Nikkor Z 24-70 mm f/2,8 S, il est possible de filmer aisément à main levée, en faisant quelques mouvements panoramiques, en gardant une image très fluide et stable. Comme nous l’avons observé sur la partie rafale, il faut rester vigilant vis-à-vis du rolling shutter. La richesse fonctionnelle en matière de tournage et le volet connectique complet prouvent que le Z f est un formidable outil vidéo.
La définition du capteur Cmos 24 x 36 n’évolue pas, en comparaison avec les Z5 et Z6/Z6 II : le Z f culmine à 24 Mpxl ; mais la fonction Pixel Shift permet d’atteindre quelque 96 Mpxl, grâce à l’usage d’un trépied, sur des sujets fixes (paysage, nature morte, packshot…), puisqu’il s’agit d’assembler des images d’une même scène. Une opération fastidieuse tout de même, puisque le résultat ne peut être visualisé dans le boîtier directement : il faut passer par le format RAW, puis effectuer l’assemblage avec le logiciel maison NX Studio 1.5.0 (gratuit, disponible sous Windows et macOS).
La qualité d’image est superbe avec des optiques de la gamme Z comme le Nikkor Z 40 mm f/2, dont le gabarit sied parfaitement au Z f. Les JPEG sont parfaitement exploitables, en allant jusqu’à 6400 Iso. Dans ce domaine, les Z6/Z6 II ou même le Z5, étaient déjà très bons, il n’y a donc pas de (mauvaise) surprise. Raison de plus pour photographier en JPEG (ou même en Heif, pour une compression sur 10 bits au lieu de 8), les nouveaux modes noir et blanc proposés dans les Picture Control, « Contraste doux » et « Contraste prononcé » ; pour les amateurs de noir et blanc, un accès direct figure même sur le sélecteur dédié à la bascule entre les univers photo et vidéo (mode BW).
Conclusion
Après un Z fc abouti visuellement, mais plus en dessous de nos attentes à la prise en main, ce Z f s’impose comme le véritable héritier du FM2. Un boîtier hybride plein format solide, ancré dans l’histoire de Nikon (même le logo reprend la charte graphique des années 70), et dans le même temps, bourré de technologies dernier cri, aussi bien en photo qu’en vidéo, là où le Df, sorte de cousin rétro, version reflex, laissait un goût d’inachevé.
Le fait de le proposer en plusieurs coloris est une bonne idée, même si la marque aurait pu jouer la montre et les dévoiler progressivement avec des accessoires assortis, comme le fait Leica par exemple. Surtout, il faudrait peut-être étendre le choix de focales fixes « SE », dont le design colle à celui du Z f ; pour l’instant, il n’y a que les deux excellentes focales fixes 28 mm f/2,8 SE et 40 mm f/2 SE. Une fois qu’on utilise un zoom « classique », le charme du rétro s’évapore un peu. Reste alors à recourir à une bague FTZ II et solliciter les optiques AIS, pour jouer de la bague de diaph et des molettes…
Les performances sont bien au rendez-vous, et l’ensemble est équilibré. Au départ, l’absence de joystick déroute un peu, pour déplacer les collimateurs AF. Mais le fait de pouvoir le faire sur l’écran (pour la première fois orientable dans toutes les directions sur un hybride Nikon plein format), est une bonne chose. La prise en main est également perfectible, aussi l’offre de lancement, limitée jusqu’au 31 octobre, qui comprend une poignée SmallRig dédiée au Z f offerte, doit vraiment être considérée.
Voici un sérieux outsider dans la meute des boîtiers plein format situés autour des deux milliers d’euros, même si son prix boîtier nu (2499 €) aurait pu être revu à la baisse pour être encore plus compétitif. Une cohabitation avec un futur successeur du Z6 II semble en tout cas tout à fait envisageable, pour les utilisateurs peu sensibles aux charmes du rétro. Tout le creuset technologique est là.