Si l’art peut nous permettre de nous évader, de voyager, de nous changer les idées, il peut aussi mettre le doigt sur des sujets dont la gravité mérite plus qu’un simple détour. Nombreux sont les artistes de différents styles qui ont éveillé nos consciences à travers leurs chansons. Zoom sur dix-sept titres phares.
Fight the Power – Public Enemy (1989)
Cette sélection débute par un classique du rap. Fight the Power est l’hymne de Public Enemy, un des plus grands groupes de l’histoire du hip-hop. Issu de la bande originale de Do the Right Thing, ce morceau est si fédérateur et impactant qu’il sera également publié sur l’album du groupe, paru l’année suivante.
L’Etat Assassine – Assassin (1995)
Assassin est sans doute le groupe de rap français le plus engagé politiquement. Son album paru en 1995, L’Homicide Volontaire, est considéré comme un classique du genre. L’Etat assassine attaque frontalement le gouvernement ainsi que la police. Un morceau plus que jamais d’actualité qui fait écho aux récents événements en France.
Burnin’ and Lootin’ – Bob Marley and the Wailers (1973)
Fêtant ses cinquante ans cette année, ce morceau de Bob Marley issu de Burnin’ traite du soulèvement populaire des habitants de Trench Town (Kingston), où il vivait à l’époque, face aux institutions et au gouvernement jamaïcain. Il s’agit là d’un véritable appel à la révolte, en atteste le refrain sans équivoque.
Banlieusards – Kery James (2008)
Morceau fleuve issu du troisième album studio de Kery James, À l’ombre du show business, il est un hymne pour tous les habitants des banlieues. L’inégalité des chances dans une France fracturée est fustigée par un des membres les plus éminents de la Mafia K’1 Fry qui traite également d’autres sujets à l’instar de la colonisation. Un morceau important et intemporel.
Plus rien ne m’étonne – Tiken Jah Fakoly (2004)
L’artiste ivoirien publie Coup de Gueule en 2004. Un album une nouvelle fois très engagé politiquement qui s’ouvre sur Plus rien ne m’étonne. Un pamphlet à l’encontre des grandes puissances mondiales qui assoient leur domination à travers le globe.
Hardcore – Ideal J (1998)
Cette playlist aurait pu ne contenir des morceaux qu’avec Kery James tant il affectionne cet exercice. Ce dernier figure sur le légendaire Hardcore, paru il y a près de 25 ans. Un cri de guerre dans lequel chaque début de phrase démarre par le même mot. Là encore, le doigt est pointé sur de nombreux crimes. Un classique qui recevra les foudres du CSA.
Police – Suprême NTM (1993)
Si le rap américain possède Fuck Tha Police, on peut tout à fait affirmer que Police, du Suprême NTM est son cousin d’outre-atlantique. Issu de 1993..J’appuie sur la gâchette, ce morceau est un assaut assumé envers la police, comme en atteste le refrain, qui leur vaudra bien des ennuis avec la justice. Il n’en reste pas moins qu’il symbolise l’attachement de JoeyStarr et KoolShen aux enjeux politiques et sociaux de leur époque.
The Day the Niggaz Took Over – Dr Dre ft. Snoop Doggy Dogg, RBX and Daz Dillinger (1992)
Planqué entre deux morceaux plutôt apaisés avec Let Me Ride et Nuthin’ but a G’ Thang, ce morceau de Dr Dre issu de The Chronic en featuring avec trois rookies, qui deviendront pour certains des porte-étendards de la West Coast, relate des émeutes et pillages à South Central. La jeunesse noire-américaine de Los Angeles au printemps 1992 en a eu assez de voir ses frères et sœurs victimes de la police fédérale ainsi que des commerçants coréens et s’est révoltée durant plusieurs semaines. Un récit énergique, puissant et trop souvent oublié dans cet album phare des années 1990.
Sunday Bloody Sunday – U2 (1983)
Il y a quarante ans, U2 publiait War, son troisième album, considéré comme un des plus grands de l’histoire de la musique. Dans celui-ci, Sunday Bloody Sunday s’illustre. Ce morceau mentionne le Bloody Sunday, nuit sanglante du 30 janvier 1972 où 28 manifestants pacifiques à Derry (Irlande du Nord) ont été abattus par l’armée britannique. Une chanson particulièrement touchante et évocatrice du contexte brûlant de l’époque au Royaume-Uni.
11’30 contre les lois racistes (1997)
Retour au rap français avec ce très long morceau paru il y a vingt-six ans dans lequel figurent notamment Akhenaton, Fabe ou Assassin. La loi Debré entrée en vigueur en avril 1997, visant à durcir la législation vis-à-vis des immigrés en France est le détonateur de ce large featuring. Le racisme montant dans la France de l’époque est l’un des sujets de ce morceau durant près de douze minutes. Une période où le rap français était décidément bien plus engagé qu’il ne l’est aujourd’hui.
Zombie – The Cranberries (1994)
Nous mettons de nouveau cap sur la Grande-Bretagne où les Cranberries et leur chanteuse Dolores O’Riordan publient Zombie, en premier single de leur second album le 19 septembre 1994. Relatant la guerre civile en Irlande du Nord et singulièrement l’insurrection de Pâques en 1916, il est devenu viral par son refrain entêtant et enivrant.
Hexagone – Renaud (1975)
Un classique de la chanson française. Un morceau de Renaud qui raconte une année en France. Découpé en quatre couplets, il expose le mode de vie dans lequel sont enfermés les résidents de l’Hexagone, autre appellation de notre pays. Fortement engagé, ce morceau fut interdit sur France Inter durant la visite du Pape Paul VI.
Born in the USA – Bruce Springsteen (1984)
La guerre du Vietnam a profondément marqué la société américaine au XXe siècle. Largement évoquée dans le 7e art, elle l’est également dans la musique. Ce morceau de Bruce Springsteen traite de la réintégration d’un vétéran de cette guerre. Un sujet grave sur une instrumentale plutôt gaie au premier abord.
The Guns of Brixton – The Clash (1979)
Un morceau aux sonorités jamaïcaines réalisé par les Clash, au sein de London Calling, album référence des années 1970. The Guns of Brixton évoque le mode de vie des habitants de Brixton, quartier très cosmopolite de Londres, et de leur rapport à la police. Une chanson qui aura une résonance toute particulière après l’émeute de Brixton en 1981.
Demain c’est loin – IAM (1997)
Considéré par certains par le plus grand morceau de l’histoire du rap français, Demain c’est loin, d’IAM, conclut un album là aussi reconnu et respecté de tous, l’École du Micro d’Argent. Long de près de dix minutes, ce morceau ne comporte pas de refrain. Il traite simplement du mode de vie d’Akhenaton, Shurik’n et les leurs.
Redemption Song – Bob Marley (1981)
Ultime morceau sorti du vivant de la légende du reggae, Redemption Song est un titre fédérateur et clé dans la discographie de Bob Marley. Une simple mélodie jouée à la guitare vient accompagner sa voix calme et apaisée. Là encore, la cause noire est centrale dans ce morceau qui parachève Uprising ainsi que l’œuvre du King of Reggae.
PDM – Freeze Corleone ft. Alpha 5.20 et Shone (2020)
Enfin, nous terminons cette playlist par un morceau du très controversé Freeze Corleone. Ce dernier dévoile LMF (La Menace Fantôme) le 11 septembre 2020. Un album très sombre où le kickage est roi. L’un des derniers morceaux voit collaborer Freeze avec Alpha 5.20 et Shone, deux piliers du rap underground des années 2000 en France. Si le couplet de Freeze relève plutôt de l’egotrip, ceux des deux autres protagonistes sont bien plus conscients et politisés. La cause noire est largement traitée et mise en avant. Un morceau qui dénote du paysage rap de l’époque et qui revient aux bases de cet art.