Venue d’Islande, et membre des Sugarcubes, Björk a révolutionné la pop dans les années 1990. Innovatrice par ses choix instrumentaux et ses visuels, douée d’une aptitude vocale à la pureté inégalée, la chanteuse accompagne la vie de ses fans depuis quatre décennies. On fête son grand retour, avec l’album Fossora, au gré de dix tubes issus de son répertoire.
Birthday (The Sugarcubes) – 1987
Fille d’une activiste écologique et d’un électricien syndicaliste, Björk Guðmundsdóttir grandit en partie avec un beau-père guitariste. Dès son enfance, la jeune Islandaise commence à chanter et enregistre un premier album solo à onze ans. Elle va aussi participer à différents groupes, au début des années 1980, comme Kukl, avant de former avec son mari d’alors, Þór Eldon, The Sugarcubes, une formation new wave qui connaît un énorme succès en interprétant en anglais Birthday. Aux arrangements, typiques de l’époque, s’ajoute sa voix étincelante, capable de s’exprimer clairement même dans des passages suraigus. Le titre fait rapidement le tour du monde, permettant à The Sugarcubes d’enregistrer trois albums.
Big Time Sensuality – 1993
Après l’expérience Sugarcubes, Björk quitte l’Islande et s’installe à Londres. C’est là qu’elle échafaude Debut, dans lequel elle a rassemblé une dizaine de chansons, certaines ayant été écrites des années auparavant. Si les auditeurs des Sugarcubes retrouvent sa voix, les arrangements des chansons sont extrêmement différents. Et c’est là tout le charme d’un titre comme Big Time Sensuality, avec son rythme dance, son orgue lancinant, son solo de saxophone, sur lesquels la chanteuse impose un univers singulier par rapport à la pop d’alors.
Army of Me – 1995
Après le succès surprise de Debut, réalisé pourtant en quasi autarcie et en dépit des canons pop de l’époque, Björk s’entoure de la crème de la production underground britannique pour Post. Outre Tricky et Nellee Hooper – tous deux artisans du trip-hop et collaborateurs de Massive Attack – c’est le mancunien Graham Massey, du groupe d’acid house 808 State, qui a co-produit Army of Me. Ce titre ambitieux, avec sa rythmique martiale, montre le caractère guerrier et quasi « Amazone » de Björk, qui devait lui assurer une influence encore plus importante sur le monde de la musique.
All Is Full of Love –1997
La période de production d’Homogenic, si elle est émaillée d’un fait divers affreux (un fan obsédé a tenté de tuer Björk avant de se suicider), correspond, musicalement à un âge d’or. Alors que Debut et Post racontaient d’une quête identitaire, cette suite directe s’avère une affirmation féminine et universelle d’une personnalité sans équivalent. Magnifiquement clippé par Chris Cunningham, All Is Full of Love témoigne de cette plénitude, toutefois empreinte de mélancolie. L’arrangement personnel de Björk, à retrouver sur son best-of Greatest Hits, se fait plus organique que la version sur album.
I’ve Seen It All – 2000
Actrice depuis ses débuts en Islande, Björk retourne au cinéma à la fin des années 1990, avec la tragédie musicale Dancer In the Dark. Si l’on sait aujourd’hui combien le climat du tournage fut éprouvant pour la chanteuse, en partie à cause de la personnalité de Lars Von Trier, sa participation à la bande originale du film (Selmasongs) a laissé quelques titres éblouissants, notamment I’ve Seen it All, poignant duo avec Thom Yorke dont le beat a été construit à partir du rythme d’un train en marche, en correspondance avec une célèbre scène du film. Récompensée d’une palme de la meilleure actrice, Björk a abandonné le cinéma ensuite, avant son retour à l’écran en 2022 pour The Northman.
Hidden – 2001
Avec Vespertine, Björk devait nous inviter dans son monde intérieur. Première chanson de l’album, Hidden participe de cette volonté intimiste, avec ses chœurs diffus, son rythme lancinant, son expressivité comme contenue. Productrice et compositrice unique du morceau, la chanteuse islandaise y dévoilait son goût pour une électro plus minimaliste qu’auparavant, dans laquelle surnageait comme d’habitude une vive lumière mélodique.
Oceania – 2004
Le 13 août 2004, devant les téléspectateurs du monde entier, le comité olympique grec dévoilait son goût pour les prises de risques. Durant la cérémonie d’ouverture des J.O. d’Athènes, Björk apparaissait en guise de grand final, interprétant une chanson ésotérique, écrite pour l’occasion, Oceania. Avec ses arrangements très particuliers, basé sur le sampling de la voix humaine, ce titre plongeait les olympiades dans une ambiance spectaculaire et irréelle, tandis que la chanteuse islandaise assurait là un sacré coup de promo pour son album expérimental Medúlla, où figure Oceania.
The Dull Flame of Desire – 2007
Devenue en quelque sorte la marraine de la musique indé à tendance pop, Björk adoubait en 2007 l’une de ses continuatrices. Sur The Dull Flame of Desire, extrait de Volta, l’interprète islandaise accueillait en effet Anohni, alors vocaliste d’Antony and the Johnsons, pour un duo étincelant, avec ses cuivres majestueux et son texte, une traduction d’un poème de Tyutchev lu dans Stalker de Tarkovski.
Blissing Me – 2017
Pour son concept album féministe et mythologique, Björk s’entoure d’une jeune collaboratrice, Arca, qui contribue à la plupart des chansons d’Utopia. Blissing Me, l’un de singles issus d’Utopia, démontre que ce partenariat artistique coulait de source. Toujours à l’avant-garde, souvent anticipatrice des modes, la chanteuse islandaise réussit à paraître encore dans le coup en travaillant avec une productrice de vingt ans sa cadette !
Atopos – 2022
Tout en basse et en vent (notamment des clarinettes), Atopos voit Björk retrouver avec bonheur le champ expérimental, mais paradoxalement accessible, de son œuvre. Premier extrait de son nouvel album, Fossora, cette chanson témoigne de l’authenticité et de l’ouverture musicale de celle qui reste comme l’une des plus grandes novatrices de l’histoire de la pop, au sens large du terme.