Brian de Palma est bien plus que « l’héritier d’Hitchcock ». Maître incontesté du thriller qu’il transcende par sa virtuosité technique et son goût pour les images-choc mémorables, il a su entremêler comportements dépravés, violence sanguinaire, érotisme débordant et même la tragédie antique. Une recette qui lui a valu nombre de chefs-d’œuvre controversés. Voici une sélection de ses meilleurs films
Sœurs de Sang/Sisters
Après quelques films indépendants de styles divers où il affine son style, Brian Russell de Palma trouve le genre idoine pour son style visuel : le thriller. Contrairement aux scénarios décevants de ses premiers films, Sisters bénéficie d’une intrigante histoire de sœurs jumelles (jouées par Margot Kidder) qu’il co-écrit. Ce script lui permet de donner libre cours à ses obsessions : les femmes fatales, les hommes voyeuristes, les déviants meurtriers, Alfred Hitchcock. Avec Soeurs de sang, De Palma dégaine son arsenal de mise en scène : plans-séquences, effets spectaculaires, angles bizarres. Ne manque que l’érotisme. Un cinéaste est né.
Phantom of the Paradise
Phantom of the Paradise est un opéra-rock mixant allègrement le chef-d’œuvre de Gaston Leroux, Le Fantôme de l’Opéra, avec le Faust de Goethe. Enfin nanti d’un meilleur budget, Brian de Palma se déchaîne dans la flamboyance, bien aidé par une BO électrique et des décors grandioses. Tirant le meilleur parti de ses personnages ravagés et d’une histoire de vengeance, le réalisateur nous entraîne dans une course lysergique qui se fracassa à sa sortie mais est depuis devenue culte.
Carrie au bal du diable
Maintenant, pas une année ne se passe sans au moins une demi-douzaine d’adaptations de Stephen King. Brian de Palma en est le responsable. Grâce à l’excellente adaptation par Lawrence D. Cohen du premier roman du Maître de l’Horreur, de Palma aligne les scènes d’anthologie lors de cette terrible histoire d’une ado harcelée (Sissy Spacek) découvrant ses pouvoirs télékinésiques. De l’incipit des règles à la vengeance finale en passant par le numéro étourdissant de Piper Laurie en mère bigote, Carrie au bal du diable est un tour de force propulsant de Palma et King sur orbite. En prime, le premier jump scare moderne du cinéma d’horreur !
Furie
Preuve royale de la maîtrise visuelle de Brian de Palma, Furie est un thriller excitant alors même que le pitch de John Farris à base de cellules secrètes, d’extralucides et de plans délirants à la James Bond aurait dû sombrer dans le n’importe quoi. En parvenant à nous river à ce script incontrôlé par la seule puissance des images stupéfiantes qu’il invoque, de Palma pare tous les pièges et consolide son statut de virtuose à la fois fidèle et plus extrême qu’Hitchcock.
Blow Out
Réponse de Brian De Palma au Blow Up d’Antonioni, le son remplaçant la photographie, le cinéaste élabore avec Blow Out une réflexion sur la production cinématographique, et en particulier le son, son côté brut, ses transformations. L’histoire d’un ingénieur du son (John Travolta) enregistrant involontairement la preuve d’un assassinat est le scénario ad hoc pour le film. Nouvelle maestria de mise en scène au soutien d’une narration brillante, Blow Out est un des sommets absolus de la filmographie de Brian de Palma.
Scarface
Dans le délicat exercice du remake, Brian de Palma livre son film le plus populaire : Scarface. Bien que dénué de la froideur impitoyable de l’original de 1932 signé Howard Hawks, Brian de Palma accentue le côté psychotique et taré de son héros Tony Montana (Al Pacino), de l’ascension parmi les mafiosos à sa chute. Ouvrant toutes les soupapes au scénario théâtral d’Oliver Stone, Scarface déploie son discours sur les chemins sans retour de la violence au rythme de scènes choquantes.
Body Double
Poussant à fond son hommage à Hitchcock, Body Double est sans doute le film de Brian de Palma transpirant le plus sa dette au Maître du suspense. Mix malin de Fenêtre sur Cour, Sueurs froides et du Crime était presque parfait, scènes de nu en sus, Body Double est un exercice de style réussi doublé d’une régalante angoisse. Le réalisateur poursuit ici la déconstruction des méthodes de cinéma, ici les doublures de comédiens.
Les Incorruptibles
Après l’échec de Mafia Salad, Brian de Palma retente une approche classique de la mafia. S’appuyant sur les mémoires d’Eliot Ness, l’homme qui fit tomber Al Capone durant la Prohibition, le réalisateur signe avec Les Incorruptibles un classique du film de gangsters, riche en portraits hauts en couleur et de scènes inoubliables, incontournable des 80’s. Le film souligne aussi le talent immense du dramaturge David Mamet, très à son aise dans ce récit choral.
Outrages
Un des films les plus méconnus de Brian de Palma, Outrages est pourtant un des films les plus captivants sur la guerre du Vietnam – Tarantino approuve. Le film est inspiré de faits réels où le soldat Eriksson (Michael J. Fox) a dû affronter sa hiérarchie et ses camarades pour dénoncer le viol d’une vietnamienne par ses collègues. De Palma et le scénariste David Rabe en tirent un film de guerre violent, rude, digne des modèles du genre pourtant plus reconnus. A redécouvrir.
L’Impasse
Carrefour des talents du scénariste David Koepp (Jurassic Park) et de Brian de Palma, L’Impasse est sans doute le plus tragique des films du cinéaste. Carlito Brigante (Al Pacino), ex-trafiquant, sort de prison, décidé à se refaire une nouvelle vie loin du crime, mais la fatalité l’y ramène inexorablement. Dense, tendu – la poursuite finale est un modèle du genre – L’Impasse est un implacable ouragan de noirceur qui n’épargne personne, régulièrement cité comme l’apothéose du cinéma de De Palma.
Mission impossible
La franchise de Tom Cruise continue son triomphe. 30 ans plus tard, le film où tout a commencé demeure un des meilleurs dans sa catégorie. Grâce au trio diabolique David Koepp–Robert Towne (Chinatown) et Steven Zaillian (La Liste de Schindler), De Palma bénéficie d’un script à toute épreuve et dirige la star dans Mission Impossible. Cette palpitante histoire d’espionnite, clin d’œil souvent mutin à la série originale de Bruce Geller, est du pur divertissement, de haute volée.
Le Dahlia Noir
Le meurtre irrésolu du Dahlia Noir dans les années 40 demeure un des plus grands traumatismes des Etats-Unis. James Ellroy en a tiré un polar légendaire en 1987, luxueusement adapté par le scénariste Josh Friedman et Brian de Palma. Retranscrivant à merveille le Los Angeles poisseux et corrompu de l’époque, le cinéaste nous entraîne dans un tourbillon ténébreux aux multiples symboles. Le Dahlia Noir constitue sans doute le chant du cygne du réalisateur, malgré trois autres films moins convaincants.
