En juin, les polars de poche se répartissent en plusieurs catégories : historique avec Charles Doherty et Carmen Mola, cosy mystery avec Joanne Fluke, Ann Granger et Ana T. Drew, voyageuse avec Donna Leon et Keigo Higashino, macabre avec Mathieu Lecerf et Claire McGowan, et enfin, psychologique avec Paula Hawkins. Petit tour d’horizon.
Le Don du mensonge – Une Enquête du commissaire Brunetti – Donna Leon (LGF)
Aussi typique qu’une gondole sur le grand canal, Donna Leon, la plus vénitienne des romancières américaines, fait aujourd’hui partie des murs de la cité des doges. Inlassablement inspirée par Venise malgré le tourisme de masse qui l’a poussé à quitter la ville il y a dix ans, celle qui a voué sa vie d’écrivaine au Commissaire Brunetti maintient sans faillir son rythme annuel de parution. Trente-et-unième enquête d’une série toujours pas traduite en italien (par peur des critiques autochtones ?), Le Don du mensonge débute dans une ville marquée par la pandémie et calmée par plus de deux mois de confinement. Dans cette ambiance paisible où la Sérénissime retrouve son éclat naturel, une amie de Brunetti vient lui demander d’enquêter sur son gendre embringué dans de sales affaires.
La Conspiration des mystérieux – Charles Doherty (10/18)
Enseignant et historien, Charles Doherty transmet sans relâche sa passion pour l’histoire médiévale de son Angleterre natale depuis plus de trente-cinq ans. Auteur de nombreuses séries policières historiques, il connaît ses plus grands succès avec les sombres aventures de Sir Hugh Corbett et les enquêtes d’une doublette explosive du XIVe siècle composée d’un prêtre érudit et du secrétaire du légiste royal de Londres. C’est dans cette dernière saga qui flirte avec le roman d’espionnage, débutée en 1991 et publiée en Angleterre sous le pseudonyme de Paul Harding, que s’inscrit La Conspiration des mystérieux. Cette fois, frère Athelstan et John Cranston sont appelés à la rescousse par la couronne pour résoudre une affaire de meurtres en série touchant des agents du renseignement du royaume.
Les sept divinités du bonheur – Keigo Higashino (Actes sud)
Figure incontournable du polar made in Japan, Keigo Higashino a multiplié les récompenses nationales avant d’être reconnu au niveau international et notamment en France où il reçoit en 2010 le prix du meilleur roman étranger lors du Festival polar de Cognac. Alors qu’une grande partie de son œuvre reste à ce jour inédite dans l’hexagone, le dernier épisode, primé au Japon en 2014, d’une trilogie noire dédiée à l’inspecteur Kaga Kyōichirō paraît aujourd’hui en version poche. Polar social questionnant les mutations d’une ville, Tokyo, et auscultant les tourments de la société japonaise, Les sept divinités du bonheur s’intéresse à la souffrance au travail à travers le meurtre d’un homme d’affaire un peu trop facilement imputé à un de ses employés maltraité que tout accuse pourtant. Peu convaincu par le mobile de la vengeance, Kyōichirō va faire ce qu’il fait de mieux : enquêter
Meurtres et cupcakes au caramel – Les Enquêtes d’Hannah Swensen T5 – Joanne Fluke (Points)
Faire matcher crimes et pâtisseries est une entreprise osée que la fringante octogénaire Joanne Fluke a réussi sans faute de goût avec Les Enquêtes d’Hannah Swensen. Une série cosy crime entamée il y a vingt-quatre ans mais publiée depuis peu en France où elle propose le concept original d’inclure à la narration les recettes détaillées de toutes les gourmandises pâtissières qui jalonnent son intrigue policière. Cinquième épisode de la saga à paraître en poche, Meurtres et cupcakes au caramel contraint la cheffe Hannah Swenson à user de ses talents de détective pour se sortir d’une nouvelle situation embarrassante. Cette fois, c’est au tour du cadavre d’un ancien shérif de sa bourgade de porter les traces d’un de ses fameux gâteaux signature. Fidèle à son mode opératoire, elle va mettre autant d’énergie à confondre le coupable qu’à monter ses blancs en neige.
Les Émeraudes de sang – Lizzie Martin T9 – Ann Granger (10/18)
Vétérane du cosy crime anglais, Ann Granger ajoute en 2006 une nuance à sa palette littéraire en initiant une série de polars historiques ancrés à Londres sous l’ère victorienne. Menées par une dame de compagnie au flair particulièrement affûté, les enquêtes de Lizzie Martin apportent une part de noirceur urbaine inattendue aux intrigues feutrées qui lui sont chères. Dans Les Émeraudes de sang, neuvième tome de la série, Ben Ross, inspecteur à Scotland Yard, sollicite une nouvelle fois la perspicacité de son épouse Lizzie pour mettre fin à une vague de cambriolages ciblant les demeures aisées de la capitale. Alors que l’enquête progresse, le vol d’un bijou d’une valeur inestimable et le meurtre d’un important informateur de la police qu’il venait d’interroger complique sérieusement l’affaire.
La Bestia – Carmen Mola (Actes sud)
Vraie fausse romancière espagnole, Carmen Mola est en réalité une autrice à trois têtes… masculines. Stratégie critiquable ou potacherie dérisoire, le public n’a pas manqué de réagir quand le trio de scénaristes qui se cachait derrière ce pseudonyme entretenu par un savant storytelling décide de faire tomber les masques en 2021. Avant cette révélation finale, l’autrice imaginaire a publié trois excellents thrillers élevés au rang de best-sellers de l’autre côté des Pyrénées. Dernier opus de la série sans lien avec ses prédécesseurs, La Bestia se présente comme un polar historique et ésotérique qui plonge dans les artères sordides et insalubres de Madrid au XIXe siècle. En proie à une épidémie de choléra et à la guerre civile, la capitale royale est alors sous tension, hantée par une série de meurtres rituels de jeunes filles que le peuple attribue à une monstrueuse créature chimérique. Réunis malgré eux par ces événements tragiques, un journaliste intrépide, un policier borgne et une petite voleuse vont mener l’enquête.
Ouvre-moi – Claire McGowan (Hauteville)
Après avoir réservé le pseudonyme d’Eva Woods à la face feel good de son inspiration, la jeune irlandaise Claire McGowan met aujourd’hui l’essentiel de son talent au service de thrillers tendus impliquant des couples confrontés au pire. Proche du roman d’épouvante à base de maison hantée, Ouvre-moi reste fidèle à ses préceptes en plongeant deux jeunes mariés dans un effrayant cauchemar domestique. Alors qu’ils pensaient avoir enfin trouver le moyen de régler leurs problèmes en s’installant à la campagne dans la maison de leurs rêves, Helen et George comprennent vite que quelque chose cloche dans ce cottage qu’ils viennent d’acquérir. Entre ambiance terrorisante et découvertes macabres, leur angoisse va atteindre son paroxysme en apprenant que la demeure fut il y a trente ans le théâtre d’un triple meurtre perpétré par l’ancienne propriétaire des lieux accusée d’être une sorcière. En panique, le couple va alors sombrer dans une paranoïa mortifère.
Angle mort – Paula Hawkins (Pocket)
Après des débuts plus que discrets sur les rives de la romance, Paula Hawkins a littéralement trouvé sa voie en 2015 avec La Fille du train. Un roman phénomène, brillamment adapté au cinéma dans la foulée, qui la sacra reine britannique de la nouvelle vague féminine du thriller mondial. Alors que l’ampleur du succès aurait pu la contraindre à surproduire, à l’instar de certaines de ses consœurs, elle n’est jamais entrée dans la spirale infernale du roman annuel. Soucieuse de maîtriser la qualité de son travail, elle n’a publié que quatre véritables romans en dix ans. Dernier en date, Angle mort met en scène l’histoire tragique d’un trio composé d’une fille et deux meilleurs amis. Un soir, alors qu’elle fuit une nouvelle dispute conjugale, Edie part se réfugier chez Ryan. Quelques jours plus tard, son mari est assassiné et tout accuse Ryan. Dévastée, Edie rentre chez elle et doit répondre aux questions d’une enquêtrice qui a compris que toute cette affaire est bien plus complexe qu’elle n’en a l’air.
La Mort dans l’âme – Mathieu Lecerf (Pocket)
Ancien journaliste cinéma, Mathieu Lecerf s’inscrit dans cette nouvelle génération d’auteurs qui donne un coup de fouet au thriller français. Aux côtés d’Antoine Renand, Nicolas Leclerc, Jérôme Loubry ou encore Alexis Laipsker, il contribue à dynamiser le genre en proposant des intrigues fouillées d’une noirceur absolue menées à haute intensité sur un mode narratif proche de la grammaire du septième art. Épisode final de sa Trilogie du démon, La Mort dans l’âme permet de retrouver le capitaine Manuel de Almeida, son frère journaliste et sa collègue Esperanza dans un épilogue ultra-tendu qui lève le voile sur de nombreuses zones d’ombre de la série. Tout commence par la découverte d’un corps supplicié de femme sur une péniche amarée sur les quais de Seine à Paris. Les conclusions du légiste vont démontrer que le mode opératoire est celui d’un insaisissable tueur en série sévissant dans la capitale depuis trente ans. La traque au monstre peut alors commencer pour le meilleur et sans doute pour le pire…
Les Périls de Paris – Les Enquêtes de Julie T5 – Ana T. Drew (Harpercollins)
Jeune prodige du cosy crime à la française, Ana T. Drew a la Provence dans le cœur comme son héroïne fétiche des Enquêtes de Julie. Mais, contrairement à son avatar romanesque, elle n’a pas encore quitté sa vie parisienne pour couler des jours heureux sous le soleil méridional. À moins que Les Périls de Paris, cinquième aventure de la détective pâtissière qui trouve toujours une petite enquête criminelle à se mettre sous la dent entre deux fournées de cookies, ne change la donne. Appelée à la rescousse par sa sœur jumelle menacée de mort par un inconnu, Julie monte en urgence à la capitale pour démasquer le sale type qui s’en prend à elle. Alors qu’aucune piste ne se dégage et que des événements troublants commencent à lui saper le moral, elle croise à sa grande surprise un charmant gendarme pour qui elle en pince et qui n’a pas l’air d’être là par hasard.
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