Sélection

Le top des mangas alternatifs

18 avril 2024
Par Antoine
Le top des mangas alternatifs

Difficile de passer à côté de Dragon Ball, Naruto, One Piece ou L’Attaque des titans. Des lectures passionnantes mais à la structure assez similaire. Heureusement, le manga offre aussi d’autres types d’albums, non moins passionnants, avec d’autres thèmes et auteurs. Sélection non exhaustive et parfaitement subjective de quelques chefs-d’œuvre du manga alternatif.


Je-suis-ShingoJe suis Shingo, de Kazuo Umezu

Si l’on demandait à Junji Ito, Minetaro Mochizuki ou Kiyoshi Kurosawa leurs influences, nul doute qu’ils citeraient Kazuo Umezu. Né en 1936, on doit à Umezu d’avoir posé les bases du manga horrifique en quelques ouvrages : La Femme-serpent (1966), Baptism (1974) et surtout L’École emportée (1972), chef-d’œuvre dans lequel science-fiction, épouvante et charge politique se mêlent dans des planches d’une noirceur pénétrante.

Mais c’est Je suis Shingo, manga ambitieux et inclassable dont les six tomes ont enfin été traduits au Lézard Noir, qui finit de faire de Kazuo Umezu un auteur exceptionnel. Cette histoire d’amour naissant entre deux enfants et d’amitié avec une intelligence artificielle (l’écriture débute en 1982, bien avant que l’A.I. ne devienne une mode), a priori absurde, se fait poétique et métaphysique, servie par un dessin aussi inventif que la narration.

La Vis, de Yoshiharu Tsuge La-vis

Avec Yoshihiro Tatsumi et quelques autres mangakas, Yoshiharu Tsuge a développé au début des années 1960 au Japon le gekiga, genre littéraire qui s’émancipe des canons de l’époque : visuellement plus mature, à l’opposé des dessins enfantins d’alors, narrativement propre à embrasser des sujets graves, intenses ou violents.

En 1968, Yoshiharu Tsuge publie La Vis, recueil de nouvelles à l’inquiétante étrangeté et volontiers tournées vers le moi. Une révolution pour l’époque. Récemment redécouvert en France grâce à la publication tardive de ses ouvrages (L’Homme sans talent, et surtout Les Fleurs rouges puis La Vis en septembre dernier aux éditions Cornélius) et à une rétrospective d’ampleur en janvier 2020 au Festival d’Angoulême, Yoshiharu Tsuge révèle à travers ses pages ses démons, ses doutes, sa modernité et son génie.

L-integraleSolanin, d’Inio Asano

Quand ses héros ne sont pas des « freeters » (jeunes vivant de petits boulots) à l’avenir bouché, ils ont quitté les études pour se consacrer à leur groupe de musique, sont des mangakas en pleine crise existentielle ou des lycéens en manque d’amis… Du chef-d’œuvre Solanin à Dead Dead Demon’s Dededededestruction en passant par Un monde formidable et Errance, Inio Asano, né en 1980, raconte mieux que personne la jeunesse japonaise en mal de repères, le fossé grandissant entre ceux qui nous dirigent et ceux qui entrent sur le marché du travail, la tyrannie de l’édition littéraire, les atermoiements des jeunes adultes… Des thèmes au centre de l’histoire du couple formé par Meiko et Taneda dans Solanin.

L’Âme du Kyudo, d’Hiroshi HirataL-ame-du-Kyudo

Spécialisé dans le gekiga historique depuis ses débuts à la fin des années 1950, Hiroshi Hirata est fasciné par les samouraïs et la discipline qu’impose le budo, la discipline martiale japonaise. En 1969, l’auteur écrit L’Âme du Kyudo, fascinant docu-fiction sur l’art ancestral du tir à l’arc japonais et l’une de ses épreuves phares dans le Japon féodal : le concours de Kyudo du temple Sanjusangen-do à Kyoto.

Hirata raconte, dans un lieu d’exception consacré à la déesse bouddhique Kannon, le combat d’archers pour remporter une épreuve de tir à l’arc longue de 24 heures… Ou perdre et se faire seppuku.

Un ouvrage terrible et magnifique, qui emprunte autant au chanbara qu’au récit philosophique.

Le-pacte-de-la-merLe Pacte de la mer, de Satoshi Kon

Il y a Hayao Miyazaki, figure « officielle » de l’animation japonaise. Et il y a Satoshi Kon, qui en l’espace de dix années et quatre films (de Perfect Blue à Paprika), a montré un autre visage de l’animation, plus sombre et psychologique, jouant avec les codes et la censure.

Ce qu’on sait moins, c’est que si la postérité a retenu son talent de réalisateur, Kon fut aussi un mangaka. Le Pacte de la mer raconte un moment d’une petite ville en bord de mer, censément protégée par des sirènes qui voient leur territoire s’amenuiser au profit d’un parc d’attractions.

Entre animisme et urbanisation galopante, influencé tout autant par Hayao Miyazaki que par Katsuhiro Otomo, l’auteur d’Akira, Le Pacte de la mer est une œuvre remarquable, une autre façon d’entrer dans l’univers riche et intense – et malheureusement trop bref – de Satoshi Kon.

Une vie dans les marges, de Yoshihiro TatsumiUne-vie-dans-les-marges

Qui d’autre que le père du gekiga pour raconter l’évolution du manga dans le Japon d’après-guerre ? De l’âge d’or du manga à sa production industrielle, Une vie dans les marges constitue un document autobiographique et historique rare en deux tomes denses, qui convoquent tous les acteurs mythiques de l’époque. Une lecture fascinante pour les amateurs de mangas désireux d’en savoir plus sur ce médium, comme pour les néophytes amateurs de belles pages. Incontournable.

Les lives Japan Mania avec Sébastien Abdelhamid

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Article rédigé par
Antoine
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Libraire Fnac.com
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