Sélection

Voyage littéraire aux Etats-Unis, étape 4: les Grandes Plaines

26 octobre 2016
Par Angèle
Voyage littéraire aux Etats-Unis, étape 4: les Grandes Plaines

Dakota du Nord et du Sud, Nebraska, Kansas, Oklahoma… Imaginez-vous sillonner ces vastes étendues, quasi désertiques suite à de nombreux désastres écologiques (causés par les hommes mais aussi par un climat difficile), imaginez-vous trembler de froid l’hiver et crever de chaud l’été. Laissez-vous aller à suivre les traces fantômes des bisons et des Indiens des plaines au fil de quelques pages et attention au « dust bawl »…

Dakota

Mille femmes blanchesMille femmes blanchesde Jim Fergus

Dans ce roman d’aventure au féminin, l’auteur retrace le destin de mille femmes « données » à Little Wolf, un chef Cheyenne, par le président Ulysses Grant dans le but de maintenir la paix entre les peuples. Certaines de ces femmes étaient volontaires mais la plupart ont été choisies dans les prisons et les asiles. En s’inspirant d’un très vague fait historique, Jim Fergus vous embarque dans une superbe épopée : si le choc des cultures est rude pour certaines de ces femmes, d’autres y verront l’occasion de se défaire du carcan imposé par leur époque et de goûter enfin à la liberté ! La suite, La vengeance des mères, vient de paraître aux éditions Cherche midi.

L’agent indien, de Dan O’BrienL'agent indien

Inspiré de faits et de personnages réels, ce roman retrace les évènements qui ont conduit à la création de la réserve de Pine Ridge où fût « enfermé » Red Cloud. Le jeune docteur Valentine McGillycuddy est nommé agent indien des Sioux Oglagla et doit veiller au bon départ de la réserve. Mais c’est sans compter sur la pression qu’il subit de la part du gouvernement, les tentatives de corruption, et surtout l’opposition du grand chef indien à la sédentarisation. Malgré son honnêteté et sa bonne volonté, McGillycuddy ira de désillusions en défaites : les terres cédées aux Indiens sont ingrates, les promesses sont trahies, l’alcool fera des ravages… Ce récit illustre parfaitement la tragédie du peuple Indien et fait suite à Médecine blanche pour Crazy Horse, qui relate la rencontre entre Valentine et le célèbre Crazy Horse.                                                                                                                      

Twisted treeTwisted Treede Kent Meyers

Twisted tree, petite ville paumée au milieu de rien… Ah, si ! Il y a la nature sauvage, les moutons, les crotales et l’autoroute I-90, pas loin, celle du tueur, oui. Ah, et puis il y a Hayley Jo, victime du tueur de l’I-90, une enfant de Twisted tree. Et puis il y a une poignée d’habitants de la communauté à qui l’auteur donne une voix pour raconter les secrets et les drames qui constituent le fil rouge du récit. Destins entrelacés, superstitions, isolement, Twisted Tree est le lieu idéal pour planter le décor d’un roman noir magistral. L’écriture est vibrante, à la fois chargée de tension et pourtant si lumineuse quand elle rend justice à la beauté de la nature. La galerie de personnages est remarquable et la polyphonie rend le texte très vivant, ce livre est une belle réussite !

61 heures, de Lee Child61 heures

Action et suspens sont au rendez-vous pour ce thriller qui a pour cadre l’hiver glacé du Dakota du Nord. Accidenté, perdu dans le blizzard, un bus rempli de personnes âgées a la chance de compter Jack Reacher parmi ses passagers. En un rien de temps, cet ex-policier miltaire aide les autorités locales à mettre tout le monde en lieu sûr. Enfin presque, car Bolton abrite un pénitencier où gronde la révolte suite à l’arrestation d’un très méchant biker, qui donne dans le trafic de drogue international. Transi par l’hiver rigoureux, restreint à un espace limité à cause de la tempête, en proie au doute, Jack Reacher va pourtant proposer son aide. L’écriture est affûtée, les dialogues plein de verve et les rebondissements nombreux, un très bon polar !

Kansas

Les secrets de Bent RoadLes secrets de Bent Road, de Lori Roy

Un roman noir mené de main de maître : l’atmosphère est oppressante, les personnages sont complexes, fragiles, attachants ou au contraire brutaux, repoussants, inquiétants. Nous sommes à la fin des années 60, à Détroit où les émeutes raciales poussent Arthur à rentrer au bercail, accompagné de sa famille. Il n’a pas remis les pieds au Kansas depuis une vingtaine d’années, depuis la disparition brutale de sa soeur. Avec son retour, de troublants secrets de famille refont surface et l’implacable mécanique du doute se met en place, tenant le lecteur en haleine. Dans ce climat de suspicion, de mélancolie, le poids de la religion et des non-dits fausse les relations humaines. La mosaïque des sentiments de chacun offre une lecture addictive jusqu’à la fin de l’intrigue.


Le saloon des derniers mots doux, de Larry McMurtry

Le saloon des derniers mots doux

Ce roman se passe presque au Kansas mais pas tout-à-fait, mais comme il se passe aussi presque dans le Texas et presque au Nouveau-Mexique mais pas tout-à-fait… Le Kansas fera l’affaire ! C’est l’histoire de quelques légendes de l’Ouest qui voient leur monde changer, se déliter petit-à-petit. La bonne vieille sauvagerie des cow-boys et des Indiens n’est plus qu’un souvenir, voici que les trains amènent la civilisation dans la prairie, que les femmes n’en font qu’à leur tête, que leur quotidien est montré en spectacle dans le cirque de Buffalo Bill. C’est un livre drôle mais mélancolique, qui signe la fin de toute une époque, celle de l’Ouest sauvage. C’est une sorte d’adieu au western et un peu, aussi, à la liberté.



Nebraska

DalvaDalva, de Jim Harrison

Grand maître incontesté de la littérature américaine des grands espaces, Jim Harrison dresse ici un magnifique portrait de femme : Dalva, revenue dans le ranch familial, essaie de reprendre sa vie en main. Ce retour aux sources la plonge dans un passé difficile, fait d’amour contrarié, de pertes brutales, de deuils impossibles. Mais la présence de son ami, passionné d’histoire amérindienne, va l’encourager à fouiller dans les racines familiales et à comprendre d’ou elle vient. Ce qui lui donnera la force d’affronter le présent et d’aller au-devant de ce qu’elle recherche ardemment. C’est un livre très fort où l’explosion de la beauté de la nature, magnifiquement décrite par l’auteur, le dispute à la profondeur des sentiments de Dalva. Ce récit est un monument !



Outside Valentine, de Liza WardOutside Valentine

A la fois passionnant et dérangeant ! Hiver 1957-58, Nebraska, un couple d’ados tue 11 personnes au cours d’un road trip funèbre. Liza Ward est la petite-fille de certaines des victimes de ce massacre. Ce qui ne l’empêche d’écrire un roman juste et impartial sur les personnages pris dans cette spirale infernale. En situant son livre à plusieurs époques et en se glissant dans la peau de chaque protagoniste, elle réussit à reconstituer le puzzle des évènements tout en restant dans le « roman ». Ici, point de biographie, d’essai ou d’investigations journalistiques. Avec élégance et sobriété, Liza Ward comble les vides, rend hommage aux survivants, redonne un peu d’humanité à ce drame…

Oklahoma

Le kid de l'oklahomaLe kid de l’Oklahomade Elmore Leonard

Dans l’Amérique rurale des années 20-30, on a vite fait de devenir un homme ! A 15 ans, Carl Webster a déjà tué un voleur de bétail et croisé la route d’un vrai bandit. Quand il devient marshall quelques années après, il n’hésitera pas à jouer de la gachette et à se lancer dans des poursuites picaresques afin de neutraliser gangsters et autres malfrats. Dans ce roman mi-western mi-pulp, Elmore Leonard s’amuse et brouille les pistes, la frontière entre gentils et méchants est très floue et le style est dynamique, soulignant parfaitement l’aspect « aventures dans l’Ouest »: prohibition, braquages, vol de bétail… tout y est!



Coyote crossingde Victor GischlerCoyote crossing

Archétype du looser, Toby Sawyer est adjoint à mi-temps du shérif de Coyote Crossing, un bled miteux. Revenu dans sa campagne pour enterrer sa mère, Toby s’est retrouvé papa un peu trop rapidement et il vit dans un mobil-home avec sa petite famille… Rien de bien folichon! Mais alors qu’il doit veiller sur le cadavre d’un voyou local, le corps disparaît entraînant le pauvre Toby dans une spirale de galères et de violence à laquelle il n’est pas préparé. Mais l’instinct de survie, la débrouillardise et l’amour sans faille qu’il porte à son fils lui donneront des ailes. Une nuit infernale, un récit sous adrénaline, des situations impossibles, les amateurs de sensations fortes et de lectures explosives seront conquis!


Que la mort vienne sur moi

Que la mort vienne sur moide James David Osborne 

Arlo et Sepp Clancy sont frères et mènent une existence très moyenne dans une petite ville paumée de l’Oklahoma. Si Arlo tente de s’en sortir en travaillant dans un magasin de sport, Sepp a lâché l’affaire et il deale des pilules sur internet. Le jour où ils trouvent une tête humaine en allant pêcher, leur destin va basculer inexorablement… Car Danny Ames, videur dans une boite miteuse et gros bras occasionnel pour le compte du caïd du coin, est à la recherche de son frère disparu. Roman noir, roman social, Que la mort vienne sur moi est écrit avec finesse et intelligence. Ici, pas de misérabilisme ou de clichés, juste le constat que certains sont laissés sur la touche dans cette bonne vieille Amérique. L’intrigue est bien menée, les personnages sont soigneusement travaillés, l’écriture concise et efficace. C’est un premier roman, et c’est un auteur à surveiller !



Voici un échantillon de la littérature des Grandes Plaines, une région âpre à l’image de ses habitants, comme c’est souvent le cas quand la nature décide et donne le tempo. Un panel de lecture dure, rurale, noire mais aussi chargée d’histoire et riche d’humanité !


Article rédigé par
Angèle
Angèle
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