Critique

« Moon Music », le message optimiste de Coldplay

04 octobre 2024
Par Robin Negre
"Moon Music", le message optimiste de Coldplay
©Parlophone Records

Le groupe est de retour dans les bacs avec un dixième album studio, dans la continuité de « Music of the Sphere ».

Avec 25 ans de carrière, Coldplay est incontestablement devenu l’un des groupes les plus importants du second millénaire, marquant les années 2000, 2010 et 2020 de leur style unique, évoluant au fil du temps, et trouvant un nouveau public. Une longévité qui s’explique en partie par la lucidité du groupe et son approche sans cynisme de la musique.

Coldplay veut offrir de la joie et du bonheur, tout en allant dans la direction qu’il choisit, quitte à surprendre ou décevoir. Avec Moon Music, la formation de Chris Martin livre un album qui confirme cet état d’esprit. Le disque est premier degré à l’extrême, naïf, mais parvient à créer ce sentiment profondément caractéristique de Coldplay : l’évasion euphorique grâce aux notes et aux morceaux.

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Avec ses dix titres inédits suivant une logique précise, Moon Music pourrait se concevoir comme un album conceptuel. Mélange des genres, expérimentations sonores, rythme surprenant, l’album s’apprécie telle une histoire racontée par le groupe. Coldplay semble se confier. Point d’étape après ces 25 ans de carrière, ces dix albums, ces tournées gigantesques, ces prix et ces records battus les uns après les autres.

Le poids de l’héritage est désormais là pour le groupe, qui a suffisamment vieilli et grandi pour regarder en arrière et constater le chemin parcouru. Alors même que la formation évoque sa prochaine séparation après le douzième album – Moon Music, le dixième, était censé être l’ultime –, difficile de ne pas voir dans ce nouveau disque une sorte de témoignage quasi testamentaire. Coldplay s’assume, s’affirme, se fait plaisir et embarque le public qui le souhaite avec lui.

L’essence de Coldplay

Moon Music en devient anthologique. L’album puise dans toutes les facettes du groupe : l’aspect symphonique de Viva la vida, le côté pop de A Head Full of Dreams, l’onirisme de Ghost Stories, et l’expérimentation de Music of the Spheres.

Un voyage sonore marqué également par l’effacement de Chris Martin. Le chanteur mythique se permet d’être en retrait selon les morceaux, laissant la mélodie prendre le dessus ou offrant aux artistes invités l’occasion de briller. Sur Moon Music, Codplay partage en effet l’affiche avec Jon Hopkins et Ayra Starr, et réunit Little Simz, Burna Boy, Elyanna et TINI sur le morceau medley WE PRAY, mélange de pop, électro et rap, peu inspiré au demeurant.

Quand l’album est dans l’entre-deux, le résultat est décevant ou quelconque. Good Feelings ne convainc pas, et All my Love déçoit carrément, malgré la sincérité manifeste du titre et le retour à une ballade au piano. À l’inverse, quand le groupe assume la simplicité absolue ou la démesure grandissante, la recette fonctionne et Moon Music révèle toutes ses richesses.

Avec la chanson Moon Music justement, qui ouvre l’album, le groupe est touchant et débute son histoire par un symbolique « Once upon a time » (« Il était une fois ».) Avec Rainbow – le titre est un émoticône arc-en-ciel –, Coldplay prend de la hauteur et touche du doigt la promesse de Moon Music : un album aux sons contemplatifs et rêveurs, perdus dans les étoiles et l’espace, qui admire son histoire avec nostalgie et émotion. Même constat avec IAAM ou Aeterna, qui ajoutent un aspect énergique à Moon Music. Le single feelslikeimfallinginlove est une promesse assumée de renouer avec l’aspect hit de Coldplay, grâce à un titre dansant et percutant.

Petit frère de l’album Music of the SpheresMoon Music pourrait passer pour un album de transition avant que Coldplay ne débute le dernier chapitre de son histoire. Il en reste un propos porté sur l’optimisme et le bonheur qui passerait pour hypocrite ou malvenu chez d’autres, mais le groupe a démontré depuis longtemps sa bienveillance et son empathie.

Véritable marque de fabrique artistique de la formation, qui veut encore hurler et crier à une époque rongée par le cynisme ou le second degré que, parfois, la musique peut simplement servir à être heureux.

Assumer sa bienveillance et son empathie

Prises une par une, certaines chansons de Moon Music peuvent décevoir – quand d’autres s’imposent comme des hymnes déjà incontournables. Mais, pris tel un ensemble produit pour créer une émotion et une sensation d’évasion, Moon Music en devient plus complexe, plus affirmé et rappelle que Coldplay est vraiment un groupe singulier. La succession des morceaux, des mélodies et des rythmes instaure une ambiance, invite à se perdre pleinement et en conscience dans la portée de la musique. 

Le dernier morceau de l’album, One World, encapsule toute la force de l’album : ballade musicale progressive ne contenant que deux phrases répétées en boucle : « Only one world » et « In the end it’s just love ». Le message de Coldplay est on ne peut plus clair.

Puisant dans ses propres obsessions et revenant à son essence tout en acceptant les nouvelles tendances musicales, Moon Music est un album de Coldplay intéressant. Si le disque ne réconciliera certainement pas les fans de la toute première heure qui regrettent l’orientation plus pop du groupe depuis plusieurs années, il parvient à créer un mélange ambitieux de genres et de sonorités. Le résultat est parfois déroutant (ou raté sur une ou deux chansons), mais aussi évocateur et puissant.

Coldplay ne s’en excuse pas et ne cherche pas non plus à choquer ou transgresser. Au contraire, plus que jamais, la formation menée par Chris Martin adopte un style porté sur la bienveillance, l’empathie et l’ouverture. « Profitez avec nous tant qu’il est encore temps », semble dire Coldplay avec Moon Music. La formation britannique rappelle, en effet, qu’elle n’est pas éternelle, et pose un regard touchant sur sa propre longévité. Le début d’une belle fin ?

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