Décryptage

Les particularités du cinéma néo-zélandais

15 décembre 2020
Par Lucie
Les particularités du cinéma néo-zélandais

Bienvenue aux antipodes ! S’il est un cinéma étrange, déconcertant et fascinant, c’est bien celui de Nouvelle-Zélande. Empreint de folie et pourvoyeur de talents mondialement reconnus, il cultive sans arrêt sa particularité, comme le démontre L’Âme des guerriers qui sort enfin en DVD et BluRay.

Des films qui cultivent leur différence

En 1995, l’acteur néo-zélandais Sam Neill (l’une des stars de Jurassic Park), coréalisait un documentaire intitulé Cinema of Unease : A Personal Journey by Sam Neill. Il y décrivait en quoi, selon lui, le cinéma des antipodes était totalement différent de celui du reste du monde. Pour illustrer ses propos, il présentait des extraits de films tous plus étranges les uns que les autres, issus de sept décennies. Il faut dire que la Nouvelle-Zélande, de par son éloignement et son histoire, a longtemps fonctionné en autarcie et en vase clos. Forcément, lorsque le cinéma s’y engouffre, importé d’ailleurs par Gaston Méliès, frère de Georges, c’est pour y montrer cette réalité. Et du premier long-métrage tourné en 1920 au cinéma de la fin des années 1970, ce sont seulement les Néo-Zélandais, voire les Australiens, qui en profitent réellement. Car ces histoires qu’on leur conte n’appartiennent qu’à eux, rien qu’à eux et ne sont pas à partager. Du reste, qui pourrait les comprendre ? Entre légendes maories, guerres fratricides, consanguinité et culte du bizarre et de la folie, le cinéma néo-zélandais mettra plus de 50 ans à se faire connaître dans le monde entier.

Le début de la reconnaissance internationale

La-Lecon-de-piano-DVD

En 1977 sort Sleeping Dogs de Roger Donadson, avec Sam Neill, justement. Une dystopie angoissante sur une Nouvelle-Zélande transformée en état fasciste. Le film attire l’attention des aficionados du cinéma de genre et l’année suivante, le Parlement néo-zélandais crée la New Zealand Film Commission afin de permettre production et distribution de films locaux. En 1981, Goodbye Pork Pie de Geoff Murphy, considéré comme le Easy Rider des antipodes, dépasse les frontières et obtient un joli succès dans le monde entier.

Des réalisateurs commencent à se faire un nom et à participer à des festivals de cinéma, tels Martin Campbell, Andrew Niccol, Jane Campion ou Peter Jackson. Ce dernier est avant tout attiré par le cinéma de genre que ne renierait pas David Lynch période Eraserhead, avec des films comme Bad Taste ou Braindead. Et c’est à partir des années 1990 que ce petit monde quittera définitivement l’autarcie pour la reconnaissance.

Jane Campion obtient la Palme d’or pour La Leçon de piano (avec Sam Neill, tiens, tiens), Peter Jackson révèle Kate Winslet et reçoit le Lion d’argent à Venise pour Créatures célestes et Lee Tamahori met en avant le peuple maori dans un film violent et cathartique, L’Âme des guerriers, meilleur premier film à la Mostra de Venise en 1994.

La fuite des talents à l’étranger

Jojo-Rabbit-Blu-ray

Désormais, la Nouvelle-Zélande est braquée sous les projecteurs des amateurs de cinéma du monde entier. Voilà des films qui sortent de l’ordinaire, parvenant toutefois à générer un public de plus en plus large. Forcément, les réalisateurs et comédiens qui sont ainsi remarqués, se voient offrir des propositions alléchantes de la part des sirènes d’Hollywood. Tous partent, peu reviennent.

Du côté des comédiens, Russell Crowe fait partie des acteurs les plus demandés dès le début des années 1990, Anna Paquin, sitôt oscarisée pour La Leçon de piano, tourne pour Spielberg, Bryan Singer et Sam Neill (encore lui) alternent films d’auteurs et blockbusters dans le monde entier. Côté réalisateurs, Martin Campbell se destine aux superproductions (Le Masque de Zorro ou Casino Royale), Andrew Niccol cultive sa différence avec des films indépendants portés par des stars (Uma Thurman dans Bienvenue à Gattaca, Nicolas Cage dans Lord of War), Roger Donaldson met en scène Tom Cruise et Jason Statham, Lee Tamahori signe le James Bond Meurs un autre jour et dernièrement, le Maori Taika Waititi a réalisé Thor : Ragnarok et Jojo Rabbit, à la folie toute néo-zélandaise.

Exceptions à la règle, Jane Campion qui, après s’être s’encanaillée avec Meg Ryan dans In the cut, est revenue au bercail, tout comme Peter Jackson. Entre deux films de studio hollywoodiens, il fait en sorte de tourner le plus possible en Nouvelle-Zélande et de permettre à son pays natal de bénéficier de revenus dus à la production de films sur ses contrées.

La Nouvelle-Zélande entre tournages et retour à l’autarcie

Boy

Grâce aux trilogies Le Seigneur des Anneaux et Le Hobbit, la Nouvelle-Zélande est devenue le théâtre de décors naturels fort recherchés. Tous les paysages étant représentés dans ses deux îles (volcans, montagnes enneigées, désert, plages de sable noir, collines verdoyantes…), le pays s’enrichit grâce aux films, séries et franchises qui y sont tournés et aux circuits touristiques qui en découlent. Avatar, Mortal Engines, Le Monde de Narnia ou encore Alien : Covenant font partie des grosses productions ayant posé leurs caméras devant la nature luxuriante du bout du bout du monde.

De quoi suffire à la Nouvelle-Zélande dont le cinéma semble se replier sur lui-même depuis une dizaine d’années. Comme un retour en arrière, très peu de films désormais dépassent les frontières locales. Ou alors, ils retrouvent leur goût prononcé pour l’étrange comme Black Sheep, comédie horrifique sur des moutons tueurs. Il y a, heureusement, quelques exceptions, tel Burt Munro de Roger Donaldson, fidèle au poste ou Boy de Taika Waititi, mais on est loin de la flamboyance des années 1990-2000. Autarcie renforcée ou réouverture au monde, quelle sera la prochaine étape du cinéma néo-zélandais ? 

Article rédigé par
Lucie
Lucie
rédactrice cinéma sur Fnac.com
Pour aller plus loin
Sélection de produits