La world music vient de perdre ce 22 mai 2020 l’un de ses chanteurs les plus reconnus, l’artiste guinéen Mory Kanté, dont on se souvient, entre autres, du tube planétaire Yéké Yéké qui avait fait danser toute la planète à la fin des années 1980.
De la tradition orale aux premiers groupes musicaux
C’est un début de vie atypique qui attendait le jeune Mory Kanté : petit dernier d’une famille de 38 enfants, il est issu d’une lignée de griots, ces conteurs et chanteurs guinéens qui mettent en musique des histoires traditionnelles qu’ils transmettent de génération en génération. Mory est appelé à devenir lui-même griot à son tour. Il y est initié à l’âge de 15 ans et découvre le chant par la même occasion. Peu à peu, le jeune homme s’ouvre à de nouveaux horizons musicaux, apprend la guitare et mêle modernité et tradition en créant son propre groupe. C’est lors d’un de ses concerts qu’il est remarqué par le saxophoniste malien Tidiani Koné, avec lequel il intègre l’orchestre Rail Band de Bamako en compagnie de Salif Keïta, au début des années 1970.
Yéké Yéké, le tube international funk et griot
Devenu leader du groupe, Mory Kanté se fait connaître de toute l’Afrique de l’Ouest, recevant le trophée de la Voix d’or en 1976 et apprenant à jouer du kora, un instrument à cordes malien, qui deviendra sa marque de fabrique. Il crée un nouvel orchestre autour du kora, auquel il amalgame différents courants musicaux, comme le rock et le funk. Son succès le conduit à enregistrer un premier album à Los Angeles, Courougnègnè en 1981, suivi de N’Diarabi l’année suivante. Installé en France, il sort désormais des albums en Europe : À Paris en 1984 qui le conduit à faire des tournées notamment en Italie ou sur la scène de Bercy, aux côtés de Jacques Higelin et Youssou N’Dour. Il sort l’album 10 Cola Nuts, encensé par la critique et en 1988, après une nouvelle tournée internationale, il crée une nouvelle version de sa chanson Yéké Yéké issue de À Paris, mais avec des arrangements funk. Cinq millions d’exemplaires vendus plus tard, Mory Kanté fait danser le monde entier et son album Awkaba Beach s’arrache.
Des albums aux influences internationales
Dès lors, il multiplie les projets. Il chante à New York, s’installe en Guinée, crée un complexe culturel et un musée des griots. C’est là qu’il compose son album Nongo Village, au son du balafron, instrument de percussion malien. En 1996, il se met à la techno avec l’album Tatebola et il se fera plus rare dans les années 2000. En continuant d’explorer culture griote, sons traditionnels et influences musicales variées (hip-hop, soul, blues…), Mory Kanté sortira encore quelques albums avec parcimonie (Tamala – Le Voyageur en 2001, un best of en 2002, Sabou en 2004 et La Guinéenne en 2012). Le dernier des griots nous a quittés en laissant derrière lui une ultime pièce maîtresse de son talent, un livre audio, Cocorico ! Balade d’un griot, raconté par le comédien Reda Kateb. De quoi redonner envie de danser au son de Yéké Yéké tout l’été !