Par leurs œuvres ou par leurs actes, nombreux sont les écrivains à s’être engagé dans la vie publique, politique ou sociétale. En s’ancrant dans leur époque, en portant des causes qu’ils considèrent comme justes, ils ont sorti la littérature des salons pour en faire un vecteur d’idées. Retour sur quelques exemples célèbres.
Avec l’époque moderne, le libre arbitre et l’égalité
Dès la Renaissance, nous constatons que l’humanisme a su se diffuser très largement, notamment grâce aux œuvres d’Érasme ou de Montaigne. Cependant, il nous faudra attendre le XVIIIe siècle, siècle des Lumières, pour que la littérature et les écrivains soient vus comme des vecteurs de changement de société. Sans cette période, les révolutions de la fin du siècle n’auraient jamais été fondées sur le même socle idéologique.
C’est aussi à cette période que se développe l’engagement public des écrivains qui prennent des risques en critiquant ouvertement la religion ou le fonctionnement des institutions. En témoigne la célèbre affaire Calas, où Voltaire s’engage contre la justice française pour réhabiliter un commerçant toulousain protestant accusé du meurtre de son fils, crime supposément destiné à empêcher sa conversion au catholicisme. L’écrivain en tire Traité sur la tolérance et prend position dans plusieurs affaires du même type (Sirven, De la Barre) pour protester contre la structure de la société de l’Ancien régime et son intolérance religieuse.
Les grands écrivains des Lumières ont tous contribué à mettre le curseur sur les problèmes de leur époque : Montesquieu la critique dans les Lettres persanes avant de poser, avec De l’esprit des lois, les bases de la séparation des pouvoirs, quand Rousseau, parallèlement à ses romans sentimentaux comme Julie ou la Nouvelle Héloïse élabore une nouvelle organisation avec Du contrat social et le Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes.
Des thèmes sociaux dont la littérature s’emparera dès lors très souvent, de Victor Hugo avec ses Misérables à Zola dans ses récits naturalistes peignant des milieux divers (Germinal, L’Assommoir, etc.). Le même Émile Zola sera également une figure de l’engagement avec sa tribune J’accuse, plaidoyer pour l’impartialité de la justice au moment de l’affaire Dreyfus.
Le XXe siècle : la lutte contre la guerre et pour l’émancipation des peuples
C’est au XXème siècle que la figure de l’écrivain « engagé » a véritablement marqué les esprits avec des formes très diverses de combats qui ont fait que la littérature a croisé la politique ou la lutte sociale. Des écrivains pacifistes (Romain Rolland, Stefan Zweig) aux hommes de lettres résistants (René Char, Romain Gary), les deux guerres mondiales ont alimenté le champ littéraire, les lecteurs apprenant dans les livres les opinions tranchées des auteurs.
Jean-Paul Sartre, dans la deuxième moitié du XXème siècle, fut de tous les combats, devenant aux yeux du monde un « intellectuel engagé », opposé aux guerres de décolonisation, se positionnant en faveur de la révolution cubaine ou des révolutionnaires de mai 68. Certains de ses contemporains ne seront pas en reste, comme Camus dans son activité de journaliste à Combat, Boris Vian avec sa célèbre chanson antimilitariste (Le Déserteur) ou Merleau-Ponty, membre de la gauche parlementaire dans les années 1950.
L’immédiate après-guerre a vu l’émergence d’homme de lettres pour qui le Français a été un vecteur de lutte contre une oppression. Aimé Césaire, resté longtemps maire de Fort-de-France, a marqué son temps par sa lutte contre le colonialisme et son exaltation de la négritude. À l’instar de Léopold Sédar Senghor ou de Frantz Fanon, il aura marqué l’histoire de la décolonisation et de l’émancipation raciale
Le féminisme : une émancipation au cours des siècles
L’égalité homme-femme et la lutte contre l’oppression, voire la libération sexuelle, ont été synonymes d’engagement littéraire tout au long des XIXe et XXe siècles. Depuis Olympe de Gouges, femme de lettres de la révolution en faveur des droits égalitaires et de l’abolition de l’esclavage, puis George Sand, qui lutta contre le mariage et les préjugés moraux, la problématique a été largement questionnée par la littérature.
La condition féminine a été le sujet de texte qui ont marqué des décennies de combat politique, avec Le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir ou Ainsi soit-elle de Benoîte Groult comme livres fondateurs d’un mouvement qui continue de nos jours par les mots comme par les actes son noble dessein.