Endre Erno Friedmann alias Robert Capa (ou encore Bob Capa), ce nom ne vous dit peut-être rien et pourtant ce pionnier du photoreportage ne couvrît pas moins de cinq conflits majeurs du XXème siècle et contribua à fonder la coopérative de photographes Magnum Photos en 1947 (avec David Seymour, William Vandivert, Henri Cartier-Bresson et George Rodger), gage de cette indépendance qu’il n’eût de cesse de rechercher…
Il se forgea très tôt un nom dans le métier. Ainsi dès 1936, durant la guerre d’Espagne, il prit un cliché (qui deviendra célèbre) montrant un milicien tombant au combat. Mais ce n’est qu’un peu plus tard que celui que l’on présentait comme étant le « plus grand correspondant de guerre au monde » (selon le Picture Post de Londres) entrera dans l’Histoire.
En effet, au matin du 6 Juin 1944, ce dernier prît place à bord d’une barge de débarquement. En tant que civil on lui laissait le choix du moment où il mettrait le pied sur les plages normandes. Souhaitant rester fidèle à son credo à savoir : être au plus près de l’action afin de faire les meilleures photos possible (lui qui prétendait que si une photographie était ratée, c’était parce que l’on n’était pas assez près), il demanda à prendre part, aux côtés de la première division d’infanterie surnommée « Big Red One », à la première vague d’assaut à destination d’Omaha Beach (que l’on surnommera par le suite Bloody Omaha–Omaha la sanglante, tant les pertes en hommes y furent importantes).
Outre son audace, sa témérité et son courage, ce sont avant tout les clichés, dont 11 (The magnificent Eleven) seulement survécurent à l’accident de séchage survenu dans les laboratoires de Time-Life (même si aujourd’hui nous n’en gardons trace que de 10), qu’il prit ce jour-là qui le firent passer à la postérité. En effet, même si ce dernier ne connut jamais la concrétisation ultime, Robert Capa n’ayant jamais obtenu le Prix Pulitzer, il reçut en 1947 la Medal of Freedom de l’armée américaine « pour sa couverture de la Seconde Guerre Mondiale » et sa photo intitulée The face in the surf, montrant un GI américain se débattant dans les flots afin de rallier la plage, qui « figure aujourd’hui dans le top 100 des meilleures images du XXème siècle ».
En cette année commémorative du jour le plus long, Jean-David Morvan et Dominique Bertail lui consacrent un album magnifique. Dans un format à l’italienne peu commun, proche de celui d’une photographie et en noir et blanc (et lavis de gris) bien sûr, pour coller au plus près des clichés pris par Robert Capa durant l’opération Overlord, les auteurs nous proposent d’y découvrir l’histoire qui se cache derrière la mythique photo The face in the surf.
Omaha Beach, 6 Juin 1944 © Jean-David Morvan – Dominique Bertail / Dupuis – Aire Libre – Magnum Photos
Vous aurez compris qu’il s’agit-là d’un ouvrage à découvrir de toute urgence, amateur de bande dessinée ou pas !
(Sources : le dossier intitulé The magnificent Eleven. Les Onze magnifiques de Bernard Lebrun qui vient clore admirablement cet album)