Véritable phénomène, Damso bouscule le rap francophone depuis plusieurs années maintenant. Portrait.
Depuis quelques années déjà, les rappeurs belges s’emparent de la scène francophone. Cette nouvelle génération est menée par Hamza, Shay, Roméo Elvis ou encore Damso. Ce dernier est d’ailleurs considéré comme l’une des principales figures de cette révolution musicale. Grâce à ses textes et à son univers, le rappeur a en effet su s’imposer comme l’un des ténors du hip-hop contemporain.
C’est sa verve désabusée qui lui a permis de se faire un nom. D’abord avec son premier album, Batterie faible (2016), puis avec Ipséité (2017), sur lequel figure le tube Macarena. Le morceau fait alors de Damso l’un des rappeurs les plus en vue de sa génération. Depuis, l’artiste enchaîne les hits. De ses débuts sous l’aile de Booba à ses featuring avec de nombreux artistes, Damso n’en finit plus de bousculer le rap.
Un travailleur acharné
Damso, de son vrai nom William Kalubi Mwamba, est né à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC). Rapidement, la guerre le force à quitter le pays ; un événement sur lequel il revient dans plusieurs de ses morceaux sortis en 2016, comme Graine de sablier, Exutoire ou BruxellesVie. Mais la capitale belge est aussi au centre de ses textes, et c’est dans ce pays-refuge qu’il découvre le rap. D’abord grâce à son frère qui l’initie au freestyle, puis aux côtés de son ami d’enfance, Dolfa, avec qui il monte le groupe OPG, en 2006. Travailleur acharné, Damso aiguise son flow et monte un véritable plan de carrière dans l’optique de devenir le rappeur phare de toute une génération.
Pour réussir, il n’hésite pas à arrêter ses études, à prendre ses distances avec sa famille, et même à devenir SDF. Comme s’il était persuadé que, pour arriver au sommet, il fallait avoir connu la rue, les squats et les couloirs de la gare de Bruxelles-Midi. Un pari d’une humilité folle, qui le place dos au mur – mais qui fonctionne. Alors qu’il n’a que 34 centimes en poche, sa chance tourne ; et le salut est français.
Après une première mixtape intitulée Salle d’attente, il pose en 2014 sur la playlist OKLM de Booba, pour le morceau Poséidon. La chanson lui permet de se faire connaître du grand public. Puis, c’est l’ascension grâce au featuring Pinocchio (2015) qu’il réalise avec le Duc. Il intègre alors le collectif 92i du rappeur et signe chez Universal. Grâce à ce tube, Damso bouscule le rap francophone. Son premier album, Batterie faible (2016) convainc autant la critique que le public. Disque d’or, disque de platine, double disque de platine… la machine Dem’s est lancée.
Un rappeur mûr et profond
Véritable forcené de la rime, il enchaîne en 2017 avec son deuxième album, Ipséité. C’est la consécration pour le chanteur de La Macarena, qui arrive à attirer les plus férus de rap comme les plus novices. Il n’en oublie pas pour autant ses principales sources d’inspiration, comme son passé en RDC, ses peurs de devenir père ou ses difficultés à trouver sa place dans la société. Une composition unique et mûre, qui montre la profondeur du rappeur.
Ipséité, tout comme son troisième album Lithopédion (2018), permettent à Damso d’asseoir sa propre identité dans l’univers du hip-hop et du rap francophones. Le chanteur possède un style, ainsi qu’un univers propres, qui paraissent désabusés – presque philosophiques. La prostitution, l’inceste, le suicide ou encore la pédophilie sont certains des sujets forts que le rappeur aborde dans ses chansons. Une sagesse créative qui séduit et qu’il affiche même dans les moments plus controversés. C’est le cas lors de la polémique autour de l’hymne belge, en 2018, lorsque la Fédération de football choisit Damso pour interpréter la chanson nationale de la Coupe du Monde. Ce choix a finalement été décrié par de nombreuses associations féministes, en raison des paroles sexistes de certains de ses morceaux. Une attaque face à laquelle l’artiste a préféré travailler sur son éducation.
Une évolution de style
Se remettre en question a toujours été important pour le rappeur et pour son identité musicale. Une priorité que l’on retrouve dans l’album QALF (2020), à travers lequel il prône une éducation historique du monde et de son pays d’origine, loin des clichés.
Grâce à ce disque, dont l’acronyme signifie Qui Aime Like Follow, Damso dévoile une facette plus optimiste de sa personnalité et de sa musique. S’il s’éloigne du rap grinçant qu’on lui associe à ses débuts, il parvient à convaincre la critique avec des sons plus accessibles, et tout aussi profonds. On pense à Deux toiles de mer, dédié à son fils Lior. Ce nouveau virage artistique persuade également le public, et QALF bat des records de ventes, après deux ans d’attente et une brève pause médiatique.
Pourtant, l’artiste n’a pas chômé entre-temps. En 2019, il donne plusieurs concerts à l’étranger, notamment au Canada, au Maroc ou encore au Sénégal. Si son profil Instagram précise à l’époque « Parti vivre un peu », Damso n’arrête pas non plus les collaborations. Il participe d’ailleurs à l’album de Nekfeu, Les Étoiles vagabondes (2019), avec le son Tricheur, retrouve Kalash et Hamza, et réalise des featuring aux côtés de Vegedream et Dadju. Autant de rappeurs confirmés auxquels Damso apporte sa plume et ses figures de style.
La fin des années 2010 est aussi l’occasion pour le chanteur de se diversifier. D’abord, en tant qu’auteur-compositeur pour des artistes tels que Kendji Girac pour l’album Amigo (2018), Shay pour Antidote (2019) et Louane pour Joie de vivre (2020). Depuis la sortie de QALF et sa réédition QALF Infinity (2021), il élargit son horizon artistique et pose des featuring avec plusieurs chanteuses populaires, comme Angèle pour le titre Démons (2021), Aya Nakamura pour Dégaine (2022) et, plus récemment, Selah Sue pour Wanted You to Know (2022).
Un phénomène qui fascine encore
Cette évolution fascine autant ses fidèles que les nouveaux adeptes et ne cesse de créer la surprise : le monde de la musique se l’arrache. Preuve que l’artiste, parti de rien, est devenu un véritable phénomène de la scène francophone et internationale. Les places de tous ses concerts sont sold-out en quelques minutes sans la moindre promo. On se souvient du Lithopédion Tour, vendu à guichet fermé dans les huit salles programmées, dont Bercy. Cette année, il a également remporté l’Ultratop Streaming Award, prix qui récompense l’artiste belge le plus streamé en 2021 et s’est hissé en première place du classement Spotify avec QALF Infinity comme l’album le plus écouté en 2021.
Aujourd’hui, à la tête de deux labels, 34 centimes et TheVie Music, Damso est également poussé par ses réseaux sociaux, sur lesquels il entretient l’attrait et le mystère autour de ses projets. À ce propos, l’artiste nous donne rendez-vous le 30 mai 2025 – un teasing aussi excitant que déstabilisant. Pour certains, il s’agit d’un album, pour d’autres d’un film ou d’une date de concert au Stade de France. Autant de théories qui prouvent la fascination du public pour le phénomène Damso !