Disponible le 21 août sur Netflix, cette mini-série renoue avec le genre du thriller politique en s’intéressant aux relations entre l’Élysée et Downing Street. Et cette fois, le pouvoir prend les traits de visages féminins.
Alors qu’une rencontre au sommet a lieu à Downing Street entre la Première ministre anglaise, Abigail Dalton (Suranne Jones) et la Présidente française, Vivienne Toussaint (Julie Delpy), le mari de la première est kidnappé en Guyane française avec plusieurs de ses collègues de Médecin sans frontières. Les ravisseurs exigent la démission d’Abigail Dalton. Entre devoir envers son pays et envers sa famille, cette dernière est acculée.
Elle tente de négocier l’intervention de la France, mais Vivienne Toussaint est bientôt, elle aussi, victime d’un chantage. En cinq épisodes menés tambour battant, elles parviendront à découvrir qui se cache derrière cette machination. À l’arrière-plan politique, Abigail Dalton doit à tout prix enrayer une pénurie de médicaments frappant son pays, tandis que Toussaint souhaite une présence militaire française en Angleterre, pour une lutte conjointe contre l’immigration.
Deux femmes d’honneur
Écrite par Matt Charman, qui s’y connaît en thriller politique (on lui doit les mini-séries Double jeu et En traître, mais aussi le scénario du film Le pont des espions, réalisé par Steven Spielberg), Hostage reprend tous les codes du genre, avec option prise d’otages. On le sait depuis au moins 24 heures chrono : pour qu’une fiction de ce type touche sa cible, il nous faut une figure politique charismatique, un ou des méchants marquants et des rebondissements malins.

Hostage coche certaines cases, à commencer par des protagonistes principaux que l’on a envie de suivre, et dont la relation diplomatique évolue au fil de la saison. Suranne Jones (Gentleman Jack, Vigil), tout en sincérité et droiture, et Julie Delpy (Two Days in Paris, On the Verge), au caractère plus fuyant et tortueux (on sent que la série a été écrite par un Anglais) sont les deux atouts maîtres de cette production. Crédibles dans des rôles de femmes de pouvoir, elles possèdent une belle alchimie. On prend plaisir à observer la partie d’échec à laquelle elles se livrent.
Un thriller qui résonne avec l’actualité
Sobre et efficace, la réalisation accompagne les moments de tension et d’action (l’image devient plus saccadée quand on suit le Docteur Alex Anderson, incarné par Ashley Thomas, en Guyane) tout comme ceux, plus posés, des négociations. Les épisodes, d’une durée variant entre 35 et 45 minutes, permettent une action ramassée et peu de ventre mou. On ne vous les dévoilera pas, mais Hostage réserve ici et là de bons rebondissements, autant du côté des ennemis que des choix stratégiques effectués par Dalton et Toussaint pour tenter de se sortir de ce pétrin.

Le scénario de Charman ne se prive pas d’effectuer des clins d’œil appuyés à la situation politique actuelle en Europe, à travers l’inquiétude pour le système de santé anglais ou l’obsession européenne sur l’immigration. En lice pour obtenir un second mandat présidentiel en France, Vivienne Toussaint est tentée par un virage vers l’extrême droite.
Le public français ne s’y trompera pas : le personnage a tout d’une fusion entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen. Incarné par Vincent Perez, le mari de la Présidente française, Elias Vernier, est quant à lui un magnat des médias d’extrême droite qui tente d’influencer idéologiquement sa femme.

Si Hostage possède des qualités indéniables, elle ne réinvente pas pour autant la roue du thriller politique. La prise d’otages en elle-même s’avère des plus classiques dans sa mise en scène. Certains personnages, comme Sylvie (Isobel Akuwudike), la fille adolescente de la Présidente anglaise qui claque des portes et insulte sa mère à tout bout de champ, tombent dans un cliché vu et revu depuis Kim, la fille de Jack dans 24 heures chrono.
Une réflexion sur le pouvoir au féminin
Si les premiers épisodes intriguent, les ficelles se révèlent rapidement assez grosses et il ne faut pas être un expert en film d’espionnage pour relever des incohérences. On attendait mieux de la part de Matt Charman, qui s’est fait une spécialité du thriller politique. Sur le fond, la dichotomie entre devoir familial et devoir patriotique qui anime la Présidente anglaise reste un ressort classique du genre, surexploité quand un personnage féminin a du pouvoir.

La mini-série Crisis, menée par Gillian Anderson, adoptait déjà cet angle en 2014, avec une prise d’otages incluant le fils du Président. On sent que ce programme est particulièrement soucieux de faire passer son message sur la nécessaire transparence des élus politiques et les dangers de la montée de l’extrême droite en Europe. Pour cela, il met en tête de gondole deux protagonistes féminines.
Et c’est vrai qu’il est encore rare de voir sur un écran une Présidente – alors deux, n’en parlons pas ! Dans un monde qui peine à élire des femmes présidentes (ce n’est jamais arrivé en France, rappelons-le), ce choix fort d’une double représentation féminine est à saluer. Mais il ne fait pas à lui seul une excellente série.

Le message humaniste de Hostage est ainsi porté par des protagonistes qui prennent le temps de s’interroger sur le pouvoir qu’elles détiennent, ce que ne feraient peut-être pas des hommes politiques. C’est intéressant, mais la production traite le sujet de façon simpliste. Dans le genre du thriller politique porté par des personnages féminins, Homeland, Borgen ou plus récemment La diplomate sont passés par là et ont placé la barre haut en matière de représentation féminine dans des univers de pouvoir et d’espionnage.
Hostage reste au final une mini-série prenante, agréable à visionner pour un public amateur du genre, au rythme maîtrisé et interprétée par deux actrices au sommet de leur forme. C’est d’autant plus dommage que le scénario manque de subtilité et ne soit pas à la hauteur de leurs performances et des enjeux soulevés.