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Pourquoi les jeunes font-ils un rejet des appels téléphoniques ?

21 janvier 2025
Par Pierre Crochart
Pourquoi les jeunes font-ils un rejet des appels téléphoniques ?
©Mzynasx / Shutterstock.com

Ils passent leur temps sur leur téléphone mais refusent de répondre à un appel. Pas d’inquiétude : c’est générationnel.

23 % des jeunes adultes issus de la génération Z assument ne plus du tout répondre aux appels téléphoniques, expose une enquête réalisée l’an dernier par Uswitch. Un rejet qu’il est important de ne pas prendre pour soi et de mettre en perspective avec les modes de communication d’aujourd’hui. Le Point s’est penché sur ce sujet fascinant.

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Les appels “anxiogènes”

Chloé, 22 ans, est catégorique : « C’est simple, je ne décroche jamais. » La jeune femme est, comme de nombreuses autres personnes de sa génération, angoissée à l’idée de répondre à un appel téléphonique. « Mais qui appelle encore ? », s’étonne même une autre personne interrogée par l’hebdomadaire français.

C’est vrai, le temps d’appels téléphoniques a baissé en France de 12,5 % entre 2014 et 2024. De la même manière que le SMS n’a plus la cote, l’appel est désormais perçu comme une relique du passé. Un passé où, il faut le reconnaître, il n’y avait guère d’alternative !

Depuis l’apparition des smartphones et leur connexion permanente à Internet, depuis l’apparition des réseaux sociaux et des messageries instantanées, on ne manque plus de façons de se parler. Surtout, l’aspect asynchrone de ces méthodes de communication est justement ce qui séduit les jeunes générations.

Dominique Servent, psychiatre et responsable de l’unité sur le stress et l’anxiété du CHRU de Lille, explique à nos confrères : « L’appel peut être très déstabilisant pour ces générations abonnées au virtuel et aux réseaux sociaux. Face à l’habitude du monde contrôlé, sinon défensif, du numérique (WhatsApp, Instagram, Snapchat…), la confrontation, plus directe, de l’appel peut constituer une crainte, une charge émotionnelle, et créer des blocages et des inhibitions. »

Les vocaux, le bon compromis

Si 61 % des Gen Z préfèrent de très loin un SMS à un appel téléphonique, les messages vocaux ont le vent en poupe. D’après l’étude Uswitch citée plus haut, 37 % des 18-34 ans considèrent que les « vocaux » sont leur moyen de communication privilégié et y recourent dans environ six échanges sur dix.

« Les “vocaux” permettent de répondre quand on veut, mais aussi de prendre le temps de réfléchir à ce qu’on va dire et de le formuler, sans pression », détaille au Point Louis, 19 ans. Pas étonnant pour Catherine Lejealle, docteure en sociologie et spécialiste des usages numériques à l’ISC Paris, qui qualifie la Gen Z de « génération à la demande ». « Elle a pour habitude de consommer ce qu’elle veut quand elle veut où elle veut (séries, musique, podcasts…). Cette pratique “à la carte” est ancrée et se manifeste aussi dans sa communication qu’elle veut libre, organisée comme bon lui semble. »

Là où il serait tentant de voir de l’impolitesse, voire le signe d’une génération en perdition, il n’y a donc finalement qu’une évolution naturelle des modes de communication. Une bonne vieille fracture générationnelle, à laquelle personne n’a échappé. Ne vous êtes-vous jamais fait réprimander par vos parents pour le temps que vous passiez au téléphone ? D’une certaine façon, les jeunes d’aujourd’hui n’ont jamais été aussi loquaces. Mais ils le sont sur un terrain que, peut-être, vous ne fréquentez pas… encore ?

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Article rédigé par
Pierre Crochart
Pierre Crochart
Journaliste