Du 16 décembre 2021 au 11 janvier 2022, le plasticien allemand Anselm Kiefer expose ses toiles grand format dans l’intégralité des espaces du Grand Palais Ephémère et poursuit un travail de longue haleine sur la mémoire européenne.
Conçues comme un hommage vibrant au poète germanophone Paul Celan (1920-1970), les dix-neuf toiles gigantesques réalisées par l’artiste allemand Anselm Kiefer – installé en France depuis le début des années 1990 – trônent impassiblement dans l’enceinte du Grand Palais Ephémère, imposante construction en bois de 10 000 m2 conçue par l’architecte Jean-Michel Wilmotte pour accueillir les événements du Grand Palais durant la rénovation du monument. Anselm Kiefer revient en terrain plus ou moins connu : en 2007, le plasticien investissait déjà la nef du Grand Palais pour la toute première exposition Monumenta et est aujourd’hui le premier à disposer de l’entièreté de cette structure éphémère. Anselm Kiefer y déploie ainsi ses toiles monumentales inspirées par les poèmes de Paul Celan, rescapé de la barbarie nazie, qui mettra fin ses jours à Paris en 1970. Kiefer a toujours été obsédé par les vers du poète d’origine roumaine, en particulier depuis la découverte du poème Todesfuge (« Fugue de mort« ) dans sa jeunesse. Les toiles de Kiefer, déposées sans cimaises, ni chronologie, ni explications, se suffisent à elles-mêmes : il n’y a que l’oeuvre et son dialogue subtil avec la poésie de Celan.
Dans ce dialogue à travers le temps et l’Histoire, le plasticien allemand prolonge sa réflexion artistique sur la mémoire de la Shoah et le cataclysme de la Seconde Guerre mondiale. Il interroge ainsi sa propre identité, pieds et poings liés à la faute impardonnable de la nation allemande, dans des toiles aux dimensions écrasantes qui mélangent les matériaux (plomb, paille, sable, tissus, cendres, cheveux, etc.) et laissent apparaître des traces d’altération, de destruction, des brûlures que seule la création artistique peut apaiser ou transcender. Kiefer inscrit alors sur ses toiles les vers de Paul Celan, à la craie, dont les mots qui prennent vie donnent en retour un peu de vie aux peintures inanimées de l’artiste.