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George Lucas au Festival de Cannes 2024 : “Star Wars a toujours été imaginé pour les enfants”

24 mai 2024
Par Lisa Muratore
George Lucas a mené une mastarclass au Festival de Cannes 2024.
George Lucas a mené une mastarclass au Festival de Cannes 2024. ©Denis Makarenko/Shutterstock

À la veille de sa Palme d’or d’honneur, remise à l’occasion de la cérémonie de clôture de la 77e édition du Festival de Cannes, George Lucas a donné une masterclass. L’Éclaireur y était et revient sur trois choses à retenir de cette rencontre d’exception.

George Lucas a fait son entrée dans le Théâtre Debussy au cœur du Palais des Festivals sous une pluie d’applaudissements, ce vendredi 24 mai. Le public présent dans la salle a, en effet, offert au mythique réalisateur une standing-ovation de plusieurs minutes, après avoir découvert une rétrospective de ses films bercée par la musique inoubliable de Star Wars. C’est avec une grande émotion que les cinéphiles du Festival de Cannes ont accueilli le cinéaste et producteur américain qui, pendant une heure et demie, s’est laissé aller au jeu des questions-réponses face au journaliste Didier Allouch.

Durant cette séance spéciale, le réalisateur est revenu sur son œuvre la plus fondamentale de sa carrière, mais aussi sur ses études de cinéma, sa rencontre avec Francis Ford Coppola, ou encore le tournage de THX 1138 (1971) et d’American Graffiti (1973). Il a également livré quelques anecdotes passionnantes sur ses obsessions, ses débuts en tant que cinéaste, ou encore sur sa façon de travailler vis-à-vis des studios hollywoodiens. Trois choses qui ont particulièrement marqué cette masterclass et sur lesquelles L’Éclaireur a souhaité revenir plus en détail.

1 Un réalisateur qui s’imaginait pilote automobile

La vitesse a toujours été l’une des obsessions de George Lucas. Que ce soit les courses de voitures d’American Graffiti, ou celles à bord du Faucon Millenium lancé à travers l’espace, l’œuvre du réalisateur est traversée par le mouvement. Ceci n’est d’ailleurs pas un hasard, George Lucas ayant confié avoir voulu devenir un pilote automobile lorsqu’il était jeune : « Quand j’étais lycéen, j’étais obsédé par les voitures. Je faisais des autocross sur des parkings avec ma Renault. J’étais très intéressé par les courses automobiles. Je voulais devenir pilote. » Néanmoins, ce rêve sera finalement empêché par un accident de voiture, une semaine avant la remise des diplômes de son lycée.

Après cet événement, George Lucas a préféré se détourner des courses de voiture, privilégiant la vitesse dans la fiction. « Plus tard, alors que j’avais déjà commencé à réaliser Star Wars, je me suis relancé dans les courses automobiles. Toutefois, le fait d’être un père de famille, célibataire, avec des responsabilités, m’a rapidement freiné. Je devais élever mes filles et ne pas prendre le risque de me blesser ou de mourir. J’ai arrêté les courses dans la vraie vie, mais pas dans mes films ! »

2 Personne ne croyait en American Graffiti

Avant de se lancer dans la saga Star Wars, George Lucas réalise, en 1973, American Graffiti. Si aujourd’hui ce long-métrage est considéré comme un film culte, à l’époque, les studios n’avaient pas parié sur son succès.

« À l’époque, j’ai passé un accord à Cannes pour American Graffiti. Je me suis battu pendant un an avec les studios, tout le monde refusait le film, jusqu’à ce qu’Universal se dise partant, après le phénomène Easy Rider. On essayait de diffuser le film et les studios ont organisé une avant-première remarquable. Je me souviens, le public est devenu fou. C’était comme un concert de rock, avec des cris et des ovations, mais le producteur du studio n’était pas de cet avis. Il m’a dit que ce n’était pas assez bien pour être présenté, et que je devais avoir honte de présenter un tel projet. Après une longue dispute durant laquelle Francis Ford Coppola m’a défendu, on a choisi d’enlever cinq minutes du film, pour ensuite apprendre qu’American Graffiti sortirait finalement à la télévision et non dans les salles de cinéma. »

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Mais George Lucas ne s’est pas laissé impressionner. Face à la résistance des studios, le réalisateur organise dans une salle universitaire une projection pour tous les membres d’Universal : « J’ai contacté tout le studio. On a réussi à remplir la salle. Il y avait aussi des personnalités de la télévision. Et comme la fois précédente, le public est devenu dingue. C’était la folie », se souvient victorieux George Lucas. Il faut dire que ce dernier avait vu juste, et son obstination a finalement payé : sorti dans à peine 50 salles aux États-Unis, pour un budget à faible coup, American Graffiti en rapporte finalement 25 millions durant les premières semaines d’exploitation. « C’est gigantesque pour l’époque », constate le cinéaste avant de conclure : « Le film est resté en salle pendant plus d’un an. Il a fini par rapporter plus de 100 millions de dollars au studio. » 

3 L’indépendance comme leitmotiv

Nul doute que ce genre d’expérience a façonné la manière de travailler de George Lucas avec les studios. Après American Graffiti, le réalisateur souhaite travailler vis-à-vis de l’industrie en totale indépendance, faisant de celle-ci l’un des leitmotivs de la création artistique. « Je suis têtu. Je ne veux pas que l’on me dise quoi faire, surtout sur un film, quand j’ai une vision. »

Le réalisateur a d’ailleurs pris comme exemple l’écriture de la première trilogie Star Wars la comparant de façon étonnante à « une saga pour enfants ». « J’ai réalisé Star Wars à l’époque où la guerre du Vietnam sévissait, mais je l’ai conçu comme un film pour les enfants. On se devait de proposer une échappatoire, car on voyait les gens revenir aux États-Unis dans des cercueils. C’était une époque très sombre. Je me suis dit que je voulais faire quelque chose de très puissant pour les enfants. Un film pour les jeunes de 12 ans qui se posent des questions, et qui expérimentent la puberté. Il y a des réponses à tout cela dans Star Wars. Les jeunes ont adoré le film, en 1977. »

Bande-annonce de La menace fantôme.

Alors quand George Lucas travaille sur la Prélogie à la fin des années 1990, c’est dans ce même objectif, avec cette indépendance vissée au corps, qu’il imagine les prémices de sa saga. Pourtant, dès sa sortie, La menace fantôme (1999) ne remporte pas l’adhésion générale. Des retours dont George Lucas n’a pas honte, le réalisateur assumant pleinement sa direction artistique et sa vision du space-opera : « Quand la trilogie est sortie, on m’a reproché le fait que c’était des films pour enfants et que le public qui avait grandi avec les premiers Star Wars voulait désormais voir des films pour adulte. Or, Star Wars a toujours été imaginé pour les enfants. Ça devait rester ainsi. C’est la vision que j’avais et mon indépendance vis-à-vis de cette idée ainsi que de mes autres projets a toujours été l’une de mes plus grandes fiertés en tant que cinéaste. »

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Article rédigé par
Lisa Muratore
Lisa Muratore
Journaliste