Tout au long de la semaine L’Éclaireur est au Festival de l’Alpe d’Huez pour vous partager ses temps forts. Rencontres, comédies et raclettes, on vous raconte tout.
Après la neige, le beau temps !
Le soleil est revenu sur la station de l’Alpe d’Huez, ce mardi 16 janvier. Cependant, impossible de gravir les pistes, car il est déjà temps pour nous de partir en salle de projection dès 8h45. Le programme de cette matinée ? Bis Repetita une comédie réalisée par Émilie Noblet, portée par Louise Bourgoin et Xavier Lacaille.
Le long-métrage suit Delphine (Louise Bourgouin), une professeure de latin désabusée, qui a fait un pacte avec ses élèves : ils lui fichent la paix et en échange, elle leur distribue, à toutes et tous, de bonnes notes. Seulement, cette méthode va se retourner contre l’institutrice lorsqu’elle et sa classe vont être sélectionnés pour participer au championnat européen de latin. Comble du cauchemar, le neveu de la proviseure, respectivement incarnés par Xavier Lacaille et Noémie Lvovsky, sera l’accompagnant du voyage, obligeant Delphine à tricher, mais aussi à remettre en question toute sa vie.
Premier arrêt, l’Italie
Bis Repetita marque le retour à la comédie de Louise Bourgoin. Après Hippocrate, série dramatique dans laquelle elle incarnait une médecin confrontée à la crise hospitalière, La Montagne (2022) ou Anti-Squat (2023), l’actrice révélée sur Canal+ se frotte de nouveau au genre comique. Si elle a déjà incarné dans Un métier sérieux (2023) de Thomas Lilti le rôle d’une professeure, Delphine dans Bis Repetita est bien différente.
Aussi cynique que désabusée, son personnage représente une vraie force comique nonchalante qui face au talent rythmique de Xavier Lacaille, universitaire maladroit, donne une véritable fraîcheur au film.
À cela s’ajoute, les talents de comédienne et d’improvisation de Noémie Lvovsky, une proviseure totalement larguée, qui offre un personnage secondaire attachant et drôlissime. Mais il ne faut pas non plus oublier la troupe de jeunes acteurs qui composent la classe de latin envoyée à Naples. Chacun, à leur manière, propose des séquences hilarantes, et tendres.
À l’instar des nombreuses thématiques que convoque le film – l’amour, le désir, l’éducation – Bis Repetita peut compter sur une troupe de comédiens venant de divers horizons et offrant de vastes registres comiques à cette pépite humoristique, présentée en compétition durant le Festival de l’Alpe d’Huez.
Enfin, l’ingéniosité du long-métrage repose également sur le jeu des langues. Du français à l’anglais, en passant évidemment par le latin et l’italien, le film de Noémie Noblet repose sur une écriture, réfléchie qui en plus du langage comique, joue sur le sons des langues, et le comique de situations.
À travers une mise en scène travaillée, également, la réalisatrice est parvenue à mettre en place une comédie efficace, qui ne tombe jamais dans le misérabilisme que le cadre scolaire impose parfois. Il choisit de ressusciter le latin – langue réservés aux élites – pour en faire un ingrédient de comédie hilarant. Une très belle découverte du Festival de l’Alpe d’Huez !
Voyage à travers les souvenirs
La journée se déroule ensuite au grès des rencontres avec les différents artistes présents sur place avant la projection, le soir, d’un nouveau long-métrage en compétition officielle, devant une salle comble, en présence d’une partie de l’équipe du film : Nous, les Leroy, réalisé par Florent Bernard.
Dans ce premier long-métrage, Sandrine — incarnée par Charlotte Gainsbourg — annonce à Christophe — José Garcia — sa décision de le quitter, après plusieurs mois de communication difficile. Christophe, bien décidé à sauver son couple, emmène Sandrine et leurs deux enfants ados dans un road-trip improvisé sur les traces de leur passé. Mais entre les déconvenues, les surprises et les rencontres improbables, le voyage ne ressemble pas vraiment à ce que Christophe espérait.
Nous, les Leroy est écrit et réalisé par Florent Bernard, artiste connu pour sa participation au collectif Golden Moustache et scénariste de nombreuses séries ou films, tels que Bloqués (2015), La Flamme (2020), Jack Mimoun et les secrets de Val Verde (2022) ou encore le récent Vermines (2023). Nous, les Leroy, sa première réalisation pour le cinéma, reprend son style d’écriture habituel, entre la comédie, le drame et l’émotion.
Le film se construit via le prisme classique du road-trip voué à l’échec, entre un père bien trop enjoué, une mère désabusée et des enfants occupés par le peur propre problème d’ados. Mais derrière un genre vu et revu, le réalisateur/scénariste ajoute beaucoup de cœur à son œuvre, en donnant vie à ses personnages et en rendant les relations entre eux tangibles et authentiques. L’écriture n’hésite pas, entre les francs moments de rire, à aborder des sujets plus délicats et à explorer le passif et le trauma de ses personnages.
C’est en résumant, sous forme d’introduction, la vie de Sandrine et Christophe — de leur rencontre à leur « présent » –, que le film parvient à impliquer émotionnellement les spectateurs pour la suite de l’aventure.
Florent Bernard s’épargne aussi de nombreux écueils. Nous, les Leroy, derrière son étiquette de comédie, n’est pas vouée à tomber dans une résolution facile de son intrigue. Le film accepte que tout n’est pas toujours simple dans la vie ou dans le couple, et propose de vrais instants de tensions et de conflits, portés par un José Garcia en très — très — grande forme et une Charlotte Gainsbourg qui laisse place à l’émotion, le doute et la fragilité.
S’ajoutent également les deux enfants du couple, Lily Aubry et Hadrien Heaulme, surprenants de justesse et de réalisme, et qui offrent au film leur propres enjeux et problématiques, pour faire de Nous, les Leroy une fresque dense (parfois trop), qui touche à différentes thématiques.
Si l’émotion arrive ainsi à être présente, c’est dans le rire que le film de Florent Bernard est probablement le plus éclatant. L’aspect road-trip permet différentes rencontres souvent improbables et se terminant mal la plupart du temps. Le réalisateur invite alors certains de ses collaborateurs habituels, pour offrir des petites pastilles humoristiques des plus savoureuses. Jérôme Niel, Simon Astier ou Baptiste Lecaplain sont peu présents, mais disposent de scènes hilarantes.
Nous, les Leroy est ainsi une nouvelle bonne surprise de ce Festival de l’Alpe d’Huez. Entre le rire, l’émotion et une conclusion somme toute très douce-amer, le film s’intéresse avec justesse aux relations familiales, et a, visiblement, conquis le public présent dans la grande salle.
Mais l’heure est déjà à la fin de cette seconde journée riche en émotion. Il est temps pour nous d’aller déguster la deuxième fondue du séjour, avant de se préparer pour le lendemain à de nouvelles découvertes cinématographiques.