Intel et AMD, les deux principaux constructeurs de processeurs pour PC à l’heure actuelle, vont devoir affronter une nouvelle concurrence dès 2024 : l’arrivée d’une nouvelle architecture ARM, poussée par des constructeurs comme Qualcomm.
Les CPU de nos PC ont beaucoup évolué ces dernières décennies, mais ils ont tous une chose en commun : il partagent la même architecture x86, créée par Intel dans les années 70, et dont la dernière évolution date de 2003 avec l’introduction des processeurs 64 bits que nous utilisons aujourd’hui. Cette hégémonie est cependant sur le point d’être contestée, les constructeurs de processeurs s’intéressant désormais à une nouvelle architecture, nommée ARM, qui équipe depuis longtemps nos téléphones et objets connectés.
ARM, une vieille alternative à Intel
L’architecture ARM a été introduite en 1985 sous l’impulsion d’Acorn, un fabricant américain d’ordinateurs qui cherchait un meilleur processeur que les différents modèles 16 bits proposés à l’époque par Motorola ou Intel. Ne trouvant pas de solution convenable sur le marché, deux ingénieurs d’Acorn, Sophie Wilson et Steve Furber, travaillent sur leur propre architecture, qui porte alors le nom de code « Acorn RISC Machine », ou ARM.
Le premier processeur utilisant cette architecture, sobrement nommé ARM1, est fabriqué en partenariat avec VLSI Technologies et sort le 26 avril 1985. Ce n’est qu’en 1990 que l’architecture sera gérée par une entité séparée d’Acorn, ARM Ltd., et que l’architecture change de nom pour Advanced RISC Machines. Depuis, elle a connu neuf versions majeures et de nombreuses évolutions pour devenir aujourd’hui une architecture très populaire, dans le monde des smartphones notamment. Tous les fabricants l’utilisent en effet, de Samsung à Apple, et le constructeur Qualcomm est désormais le principal fournisseur de ce type de processeurs.
Cette particularité à fait d’ARM une architecture spécialisée dans certains domaines, proposant notamment des processeurs performants pour une consommation très réduite, idéale pour des appareils sur batterie comme des téléphones portables, mais aussi des consoles de jeux ou n’importe quel type d’appareil connecté.
Mais le tournant pour ARM dans le monde des ordinateurs est venu d’Apple. En 2020, le fabricant se sépare de son partenaire historique Intel et abandonne ses processeurs au profit de puces créées en interne par la marque, et qui utilisent justement l’architecture ARM. Les premiers modèles de Mac équipés du processeur M1 sur cette architecture sortent le 17 novembre 2020 et soulignent une fois de plus ses qualités en affichant des performances très satisfaisantes pour une consommation particulièrement réduite, même dans les tâches les plus lourdes.
Apple a ouvert la voie
Apple avait montré qu’il était possible de créer un ordinateur de bureau performant avec cette architecture et, du côté du PC, les marques concurrentes n’ont pas manqué la nouvelle. Microsoft travaille depuis quelque temps sur une version de Windows 11 compatible ARM, afin de se préparer à l’arrivée d’une nouvelle génération de processeurs.
Et ceux-ci pourraient arriver dès cette année, puisque Qualcomm, déjà leader des processeurs ARM pour téléphones portables a récemment annoncé la sortie de son processeur Snapdragon X Elite pour la seconde moitié de l’année 2024 sur PC. Pour l’occasion, la marque promet une puce qui devrait surpasser le M3 d’Apple et ainsi supplanter la bonne vieille architecture x86 d’Intel.
Qualcomm n’est toutefois pas le seul constructeur à s’intéresser de près l’arrivée d’ARM sur PC, puisqu’AMD, un des principaux fabricants de processeurs pour PC, travaillerait déjà sur des modèles basés sur cette architecture et espère pouvoir présenter ses premiers modèles dès 2025.
En face, Nvidia, surtout connu pour ses cartes graphiques, pourrait également se lancer dans l’aventure. Ce dernier a une histoire assez particulière avec ARM, ayant déjà créé des processeurs basse consommation sur cette architecture (notamment le Tegra, qui équipe la Nintendo Switch), et a même envisagé un rachat de la société ARM avant d’abandonner en 2022 face aux protestations des organismes de régulation de la concurrence.
Intel en dernier défenseur du x86
Aujourd’hui, l’architecture ARM est accessible sous licence pour quiconque veut s’en servir comme base pour créer un processeur, ce qui explique que Qualcomm, Apple, AMD ou encore Nvidia s’y intéressent de près pour leurs propres produits. Mais il reste un grand constructeur qui semble résister encore et toujours à cette tentation : son concurrent de longue date, Intel.
L’américain à l’origine de l’architecture x86 qui a dominé le PC pendant plus de quatre décennies n’a toujours pas annoncé de plan concernant un processeur ARM. Dans une déclaration fin 2023, Pat Gelsinger, PDG d’Intel, a expliqué suivre avec intérêt l’arrivée d’ARM sur PC, mais ne se dit pas inquiet quant à l’hégémonie de sa propre architecture.
Toujours est-il que les premiers PC sous Windows équipés d’un processeur ARM pourraient être disponibles pour le grand public après l’été 2024 et que de grands acteurs comme AMD ou Nvidia pourraient proposer leurs propres produits dans la foulée. Si Intel montre un visage serein pour l’instant, l’arrivée d’une alternative sur son terrain risque de transformer durablement le PC dans les années à venir.