Critique

Les Trois Mousquetaires : Milady, la consécration d’un diptyque ? 

13 décembre 2023
Par Robin Negre
Eva Green dans “Les Trois Mousquetaires : Milady”.
Eva Green dans “Les Trois Mousquetaires : Milady”. ©Ben King/Pathé

La suite très attendue du film Les Trois Mousquetaires : d’Artagnan confirme bien l’ambition voulue et offre une conclusion satisfaisante, à la fois épique et intime. Critique.

Quelle belle surprise, en avril 2023, fut la découverte des Trois Mousquetaires : d’Artagan, réalisé par Martin Bourboulon ! Avec un budget conséquent et l’envie manifeste de frapper fort, le film réadaptait l’œuvre d’Alexandre Dumas en assumant un parti pris réaliste d’aventure. Se terminant sur un cliffhanger légèrement trop sériel, Les Trois Mousquetaires : d’Artagnan n’était que la première partie d’un diptyque continué avec Les Trois Mousquetaires : Milady.

Le film sort sur les écrans ce 13 décembre et confirme tout le bien que l’on pouvait penser du projet : l’ambition est la même, mais le film parvient à avoir sa propre identité et à changer de formule. Une réussite, incontestablement, qui donne envie de continuer à découvrir l’œuvre de Dumas à travers le regard très personnel de Bourboulon et de son équipe.

François Civil, toujours aussi charismatique en d’Artagnan.©Pathé

En reprenant l’intrigue directement après la fin du premier volet, Les Trois Mousquetaires : Milady entre dans le vif du sujet instantanément – malgré une introduction inutilement estampillée série, façon « précédemment dans » –, et ne perd jamais son rythme jusqu’au dénouement final.

Les personnages sont désormais posés et connus, et le film se permet de les envoyer dans des directions parfois surprenantes, tout en offrant le premier rôle à celle qui porte le nom de ce second volet, Milady de Winter.

Concilier les enjeux personnels et le rôle de mousquetaire

D’Artagnan, Porthos, Aramis et Athos font face, avec les autres mousquetaires, à une guerre de religion au cœur même du Royaume de France, tout en ayant leur propre arc narratif, avec leurs envies et leurs objectifs.

C’est à la fois la force et la faiblesse de l’opus. Si suivre chaque personnage dans sa propre quête permet de leur donner une épaisseur, le sentiment de groupe n’est plus forcément le même, malgré de grandes scènes d’envergures. Par cet aspect, Les Trois Mousquetaires : Milady gagne une certaine émotion et parvient à alterner entre épique et minimalisme.

Vincent Cassel a l’arc narratif le plus touchant.©Pathé

La place de l’action est à nouveau au cœur de la réalisation de Martin Bourboulon, qui retrouve sa caméra à l’épaule lors de certains affrontements et conserve une approche orientée vers les plans séquences, donnant toute leur force aux combats et aux duels à l’épée.

Évoquée dans le premier film, le siège de la Rochelle est à ce titre l’un des temps forts du long-métrage, sorte d’infiltration sous tension par les mousquetaires, où le budget se voit énormément et où la camaraderie se fait particulièrement ressentir. Ces séquences confirment également un point déjà vu dans Les Trois Mousquetaires : d’Artagnan : l’attachement des personnages et la sympathie d’un casting toujours aussi solide donnent du cœur au projet et, quand le film va réellement dans le fond de son sujet sans se perdre, il en ressort des scènes pleines de bravoure et d’héroïsme.

Le siège de La Rochelle constitue l’un des temps forts du film. ©Pathé

François Civil, Vincent Cassel, Pio Marmaï et Romain Duris sont naturellement de retour et arrivent à enrichir une nouvelle fois leurs personnages. Les mousquetaires apparaissent alors paradoxaux, entre égoïsme absolu et don de soi total pour les autres. Tout le film joue avec cette dualité, et si Pio Marmaï est plus en retrait que dans le premier opus, François Civil brille à nouveau par son charisme et son implication totale dans l’action et dans le jeu physique de son personnage.

Les différents mystères évoqués dans Les Trois Mousquetaires : d’Artagnan trouvent des explications et le film peut réellement s’amuser avec ses retournements de situation, gardant l’intensité évoquée au même niveau pendant les deux heures. Tout repose sur un personnage en particulier, Milady, donc, admirablement bien interprétée par Eva Green.

Eva Green, resplendissante

Faut-il encore présenter Eva Green ? Sa carrière à l’international parle pour elle et son implication dans de nombreux films ou séries en ont fait une des plus grandes actrices de sa génération – à commencer par le show Penny Dreadful (2014), chef-d’œuvre gothique dans lequel Eva Green brille à chaque instant.

Avec Les Trois Mousquetaires : Milady, le personnage est enfin en mesure de sortir de son ambiguïté cachée, qu’elle tenait par la force des choses dans le premier film. Cette fois-ci, Milady se livre complètement et Eva Green en profite pour à nouveau briller, entre l’intensité de l’action qu’elle accueille à merveille et les scènes plus émouvantes qui parsèment le film. S’il n’y avait aucun doute que l’actrice allait donner à ce rôle une dimension particulière, ce second opus confirme bien sa pluralité de jeu. Fascinante.

Eva Green en Milady de Winter. ©Pathé

L’ambition du film se ressent à chaque niveau de la production : les décors, les costumes, les lieux d’action et également l’excellente musique composée par Guillaume Roussel, qui ajoute un aspect à nouveau très « Hans Zimmer » à sa bande-originale. La direction artistique conserve la même qualité et donne au film une authenticité qui va de paire avec la recherche de réalisme souhaitée. Le travail autour du long-métrage a une dimension intéressante dans sa façon de reproduire l’époque et le langage d’alors.

L’œuvre est très premier degré et le texte a une musicalité assez unique, qui pourrait tomber à plat sans cette ambition constamment présente. Les Trois Mousquetaires : Milady croit en son approche et permet ainsi d’emporter le spectateur avec lui.

Les mousquetaires du Roi. ©Pathé

Si la dualité évoquée du film lui confère une originalité et permet de bien le distinguer du précédent, il peut créer parfois un sentiment de frustration.

Difficile de résumer une œuvre aussi dense que celle de Dumas, même en deux films. Les Trois Mousquetaires : Milady donne réellement envie d’en voir plus, de suivre plus longtemps ces personnages, à cette époque, entre la noblesse et les trahisons affichées.

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En tant que tel, le film (ou le diptyque) a déjà tout d’un exploit et confirme bien que la production à la française de longs-métrages d’envergure est possible. Un piège bienheureux pour Martin Bourboulon et ses équipes, en réalité. En envahissant la chasse gardée du blockbuster américain, on en oublierait presque que ce n’est pas le même genre de budget.

En gardant le même réalisme que dans le premier film, Martin Bourboulon offre de splendides duels.©Pathé

C’est en combinant tous ces éléments de contradiction et tous ces paradoxes que Les Trois Mousquetaires : Milady devient un objet de cinéma fascinant à observer. Attachant et ambitieux, épique et minimaliste, replié sur lui-même et ouvert aux autres, il s’accueille d’une traite, sans répit, et réussit à offrir une envergure inespérée.

La bande-annonce du film Les Trois Mousquetaires, Milady.

Si quelques aspects ne servent pas forcément le film (comme une fin encore une fois trop hésitante), la richesse qui en ressort ne peut être que saluée. En espérant retrouver les mousquetaires du Roi, sans attendre 20 ans ?

Les Trois Mousquetaires : Milady, de Martin Bourboulon, avec Eva Green, François Civil, Romain Duris, Vincent Cassel et Pio Marmaï, 1h55, au cinéma le 13 décembre 2023.

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